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Le Mali entre manifestations et mort du chef de Aqmi: 24 heures de braise!

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Des rues de Bamako noires de monde lors d'une manifestation contre IBK (Ph. d'illustration)

Vingt-quatre heures de braise! Ainsi peut-on qualifier la journée du vendredi 5 juin dernier qui a fait succéder, à un rythme infernal, des événements qui ont bousculé le régime de Ibrahim Boubacar Keïta. Une tuerie attribuée à des hommes en tenue militaire, fait passer de vie à trépas, 29 civils, habitants du village malien de Binedama, dans le cercle de Koro, Région de Mopti. Selon un communiqué du gouvernement malien, ce même vendredi, des détenus surexcités ont réussi à défoncer les portes de leurs cellules et ont pris à partie les surveillants de prison. Une mutinerie qui a malheureusement provoqué la mort de quatre pensionnaires de la maison centrale d’arrêt de Bamako et fait huit blessés, dont un surveillant de prison et une habitante des concessions avoisinantes. Toujours ce vendredi, une autre manifestation qui a frisé l’insurrection populaire, a fait monter la température de la rue, dans une marche de milliers de Maliens scandant des slogans hostiles au pouvoir de IBK, dont ils réclamaient la démission.

Mauvaise gouvernance, insécurité chronique, corruption, éducation à l’agonie, système de santé en panne avec des hôpitaux fermés, chômage des jeunes, services d’électricité et d’eau perturbés, résultats tronqués des dernières législatives de mars-avril. Ce sont les principaux griefs, ramassés en bilan catastrophique», et reprochés au régime IBK par des manifestants qui ont bravé la nuit noire de Bamako et les forces de l’ordre pour aller signifier leur mécontentement au chef de l’Etat, sous les fenêtres de sa résidence de Sébénicoro.

Cela ne fait l’ombre d’aucun doute, le pouvoir de Ibrahim Boubacar Keïta, dont les partisans annoncent pour bientôt, une gigantesque contre-manifestation à celle de ce vendredi,  rentre dans une zone de très fortes turbulences, face à la détermination d’un peuple qui veut mettre fin à sa souffrance. C’est la conclusion qui se tire d’elle-même de cette démonstration de force que viennent d’imposer au régime IBK, les manifestants du vendredi, sous la houlette du Front pour la sauvegarde de la démocratie (FSD), de la Coordination des mouvements, associations et sympathisants (CMAS) de l’Imam Mahmoud Dicko, de la société civile, de Espoir Mali Koura (EMK) et de partis politiques de l’opposition. Car il faut le dire de go, si cette crise repose sur des revendications sociales, elle est également à forts relents politiques. Ce sont des manifestations qui ont été planifiées depuis une dizaine de jours et que plusieurs tractations et négociations n’ont pas réussi à désamorcer.

Maintenant, jusqu’où iront les déflagrations de cette bombe dont le dégoupilleur en chef n’est, en réalité, que l’Imam Mahmoud Dicko? Ce responsable religieux, poil à gratter de IBK et qui jouit d’une forte popularité dont il use, et abuse selon ses contempteurs qui n’apprécient pas qu’il se serve de la religion pour aller en guerre contre le pouvoir, voire à la conquête du fauteuil présidentiel, si affinité. Il faut rappeler à escient que le mouvement qui soutient l’homme de Dieu a été recalé pour les dernières législatives. Ceci pourrait donc bien expliquer cela, l’Imam et ses ouailles se sont fabriqués une opportunité en or démontrer qu’ils sont forts et légitimes. La manif du vendredi constitue un peu comme l’aiguillon pour faire bouger les lignes dans le futur, pourquoi pas l’aujourd’hui du Mali politique. En attendant que les politiques trouvent le bon bout pour faire avancer le Mali et son peuple dans la voie du développement, la Force Barkhane, elle, essaie, tant bien que mal, de débarrasser le Sahel des terroristes qui ont fait de cette région de l’Afrique leur sanctuaire.

C’est ainsi que sur leur tableau de trophées, les «Macron Boys», engagés dans la lutte contre le terrorisme dans la bande sahélo-saharienne, peuvent accrocher fièrement, depuis le mercredi 3 juin dernier, le scalp de l’émir de Al-Qaida au Maghreb islamique, Abdelmalek Droukdal. C’est un tweet de la ministre française des Armées, Florence Parly qui a porté la nouvelle au monde entier, le vendredi 6 juin. Cette information qui a constitué l’éclaircie dans le ciel noir de fumée de Bamako, le vendredi, ajoute que c’est avec le soutien de leurs partenaires, certains l’aide des Américains en renseignement, que les Français, dans une opération au nord du Mali, ont mis hors d’état de nuire, le chef d’Aqmi. Mais, cette victoire d’étape de Barkhane, symbole important, est loin de sonner la disparition de la nébuleuse terroriste, car comme une hydre, aussitôt la tête coupée, elle repousse. Peut-être même que le successeur de Abdelmalek Droukdal est déjà connu dans les troupes de Aqmi.

En tout cas, si Ibrahim Boubacar Keïta sort bien fragilisé de cette journée de braise pour le Mali, Barkhane, frappée du fort sentiment anti-français qui a pris racine dans le Sahel sans solution face au terrorisme, pourrait bien amorcer un retour en grâce dans les esprits des Africains, suite à ces récents succès sur le terrain, dont la neutralisation du patron de Aqmi.

Par Wakat Séra