Accueil Editorial Migrants vendus en Libye: les larmes de la honte!

Migrants vendus en Libye: les larmes de la honte!

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Des images de la honte (Ph. lagauchematuer.fr)

La honte! Et peut-être que le mot est trop faible pour qualifier ce que vient de révéler une vidéo de la chaîne CNN. Des migrants subsahariens vendus comme des bêtes de somme en Libye. Ni plus, ni moins. Et comme il fallait s’y attendre, dans ce commerce ignoble et ignominieux, ce sont des Noirs qui sont vendus, comme dans les temps immémoriaux de l’esclavage. Seulement que le drame se joue en plein 21è siècle, alors que l’abolition de l’odieux phénomène date des années 1800, soit 1808 aux Etats Unis, 1833 dans les colonies britanniques, 1848 dans les colonies françaises et 1860 dans les colonies hollandaises. C’est dire combien cette plaie, restée ouverte et même béante dans certaines sociétés, dont la plus tristement emblématique en Afrique reste la Mauritanie, n’a jamais été guérie. Juste que l’exhalaison fétide de cette bêtise humaine charriée par les ondes hertziennes américaines et colportées dans les hameaux les plus lointains du continent, grâce à la magie des réseaux sociaux, a créé un émoi inimaginable dans un monde où l’hypocrisie est le sport le mieux en vogue. Artistes de renom, stars de football, et surtout des dirigeants et autres politiciens en manque de publicité ont donc saisi cette perche inattendue tendue par le dieu de la mauvaise foi, pour redorer leur blason terni sur le dos de migrants qu’ils n’ont rien fait pour retenir chez à la maison.

Abandonnés depuis belle lurette à leur triste sort, ces pestiférés dont on ne parle que pour se donner bonne conscience peuvent-ils être aujourd’hui être pleurés par de simples tweets et rappels d’ambassadeur sans conséquence, alors qu’ils ont fui leurs pays d’origine où l’horizon leur était bouché et le quotidien d’une précarité sans précédent par la faute de ces mêmes dirigeants obnubilés par leurs intérêts égoïstes et très personnels? N’est-ce pas l’incurie de ces mêmes gouvernants qui encourage l’immigration clandestine, sauvage et meurtrière de cette jeunesse africaine qui comme une bombe est prête à leur exploser au nez, du fait de la misère endémique à laquelle elle est confrontée? En quoi les déclarations enrobées de compassion douteuse et sans conviction de stars de musique, de radio ou de sport peuvent-elles changer le quotidien de ces désespérés qui fuient la peste pour le choléra? Pourtant, une infime partie de la richesse financière ou du relationnel de ces «grands» de la chanson, du ballon rond ou du micro, aurait pu créer des écoles, centres de formation ou d’apprentissage à même de faire de ces fuyards de la misère, des ouvriers qualifiés et des champions de l’auto-emploi. Que dire des condamnations «fermes» mais tout autant creuses de l’Union africaine ou de l’Onu, au nez et à la barbe de qui se tient ce marché honteux de traite négrière et qui n’ont jamais songé à bannir de leur sein, les nations qui la pratique encore dans sa plus simple expression ou ses multiples formes déguisées ?

Il est temps que les peuples noirs, véritables victimes de ce cancer des temps modernes se révoltent contre eux-mêmes pour se créer les conditions de prise en charge de leur propre destin en s’opposant avec la dernière énergie à ces dirigeants dont la mal gouvernance et le manque criard de vision les contraint à la pauvreté et in fine aux affres et incertitudes de l’exode. Il est temps que les Africains, propriétaires de sous-sols immensément riches mais aux greniers désespérément vides arrêtent les jérémiades et travaillent à compter sur leur propre force au lieu de continuer à survivre de l’aide distillée en goutte-à-goutte par un Occident qui paradoxalement profite et abuse des matières premières et de l’or, de l’uranium, du pétrole, du diamant, etc., des cerveaux du continent noir. Question: pourquoi dit-on pompeusement à toutes les tribunes que l’Afrique est le continent de l’avenir alors que ses fils et filles la fuient en masse pour se faire engloutir par la Méditerranée ou finir comme esclaves? Paradoxe des paradoxes… En tout cas, « quand l’homme noir respectera l’homme noir, personne ne marchera sur l’homme noir », avait dit Malcolm X.

Par Wakat Séra