Accueil Editorial 8ès Jeux de la Francophonie: Akwaba* à Abidjan sous haute surveillance

8ès Jeux de la Francophonie: Akwaba* à Abidjan sous haute surveillance

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(Ph. yehnidjidji.com)

La solidarité légendaire africaine et surtout le sens de l’hospitalité reconnu et apprécié de la Côte d’Ivoire à travers l’esprit «akwaba»-bienvenu ont été conjugués à souhait pour marquer d’une pierre blanche, les 8ès jeux de la Francophonie qui s’ouvrent à Abidjan ce 21 juillet pour durer jusqu’au 30 de ce mois. Les Ivoiriens ont mis les petits plats dans les grands pour permettre à leurs hôtes de vivre des moments inoubliables. Ils seront en principe plus de 4 000 athlètes et artistes à jouir de cet accueil où tradition et modernité se donnent la main pour que la francophonie triomphe à travers des compétitions sportives, culturelles, artistiques, littéraires, etc. L’enjeu est énorme et le pays de Alassane Ouattara qui a arraché l’organisation de ces jeux devant son unique adversaire du Tchad, est consciente que la réussite de cette manifestation mondiale dépendra fortement de ces petites touches originales qu’elle apportera pour agrémenter la fête. Car après tout, ces jeux doivent être un grand rassemblement de convivialité pour que le sport puisse mériter sa plus grande vertu d’être avant un facteur de rapprochement des peuples, des communautés, des humains tout simplement. Sur les aires sportives, toutes les barrières, qu’elles soient linguistiques, ethniques, religieuses, etc., tombent, au profit des performances victorieuses dans le fair-play et surtout la fraternité. Si après Casablanca, Antananarivo et Niamey, Abidjan est la quatrième capitale africaine à accueillir les Jeux de la Francophonie, elle pourrait aussi se targuer malheureusement d’être la ville qui a joué le plus à se faire peur, à la veille de l’événement.

Sous haute surveillance, les 8ès Jeux de la Francophonie le seront, dans un contexte de mutineries à répétitions et d’actes inquiétants dont le dernier encore tout frais dans les esprits est cette attaque de l’Ecole nationale de la police, rien que ce mercredi par des individus dont l’identité est encore officiellement ignorée. Ce qui semble certain, c’est que les assaillants qui auraient emporté des armes sont toujours dans la nature, avec leur butin très incompatible avec l’esprit des jeux. C’est dire combien l’aspect sécuritaire reste très volatile dans une Côte d‘Ivoire où l’armée est un fourre-tout où se côtoient militaires de carrière et ex-rebelles intégrés dans les effectifs après un processus de désarment plus que hâtif et très douteux. Ce n’est donc pas étonnant que des caches d’armes soient aujourd’hui découvertes comme par enchantement! Dans le même temps, une justice des vainqueurs, donc très sélective a définitivement plombé une réconciliation serinée à toutes les tribunes mais qui n’a jamais été sincèrement été le souci du pouvoir Ouattara. Et c’est ce cocktail explosif avec lequel les uns et les autres jouent, se croyant être à l’abri des déflagrations, qui transforme aujourd’hui la Côte d’Ivoire en une poudrière qui pourrait s’embraser à la moindre étincelle. Comme quoi, le feu couve bel et bien sous ce gros tas de cendre laissée par la guerre civile, la rébellion et la crise postélectorale, des années de braise 2002-2011.

Et pour ne rien arranger, la guerre de positionnement fait rage dans le landernau politique ivoirien, avec 2020 comme point de mire, l’actuel président n’ayant plus la possibilité de briguer un troisième mandat. Du reste, Alassane Ouattara a promis ne plus se présenter. Toutefois, les accords entre lui et Henri Konan Bédié, son allié du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) pour le passage de témoin à la présidence ont visiblement volé en éclats. De fait, le Rassemblement des républicains (RDR) entend visiblement conserver ce pouvoir qui lui a été offert sur un plateau rouge de sang. Pour le salut de leur pays, et si les politiciens ivoiriens mettaient à profit l’esprit sain des Jeux de la Francophonie pour parler la langue, non de Molière, mais celle du pardon et de la réconciliation? Guillaume Soro, quel que soit l’intérêt que cela pourrait cacher vient d’ouvrir la brèche en demandant pardon à tous les Ivoiriens, «même au président Laurent Gbagbo», dont il a été ministre et premier ministre avant d’en être l’un des principaux tombeurs.

L’esprit du rassemblement et du fair-play passera peut-être par les 8ès Jeux de la Francophonie pour atteindre les politiques, pour la stabilité et la paix en Côte d’Ivoire. Vive les Jeux de la Francophonie!

Par Wakat Séra

*akwaba: la bienvenue en langue baoulé (Côte d’Ivoire)