Accueil Editorial Attentats terroristes au Burkina : ce n’est pas du cinéma !

Attentats terroristes au Burkina : ce n’est pas du cinéma !

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Les Forces de défense et de sécurité burkinabè sans cesse sur la brèche (Ph. d'illustration)

Alors que Ouagadougou vit à 100% la fête du cinéma africain, le Burkina vit une fois de plus des heures sombres, car des « individus armés non encore identifiés » ont encore frappé. A Samorogouan, Ouagadougou, Intagom, Tin Akoff, pour ne citer que ces cas, les terroristes ont fait feu et endeuillé de nombreuses familles, surtout les Forces de défense et de sécurité. Désormais, Baraboulé, Tongomayel et Diguel ont allongé la liste des localités où ils ont apposé leur signature funeste. Comme pour confirmer que le Burkina Faso est bel bien dans l’œil du cyclone, les djihadistes qui jusque-là ne se signalaient qu’aux abords ou bien loin des frontières de ce pays y frappent à tout vent. S’ils ont longtemps épargné cet oued burkinabè dans ce vaste désert sahélien où les attaques terroristes s’enchaînent aux enlèvements d’otages surtout occidentaux, les « barbus » ont visiblement mis fin à cette sorte de pacte non écrit qui protégeait le Burkina de leurs assauts sanglants.

Dans la nuit du lundi 27 au mardi 28 février 2017, ces « individus armés non encore identifiés », pour utiliser la formule serinée par les autorités à chaque attaque, ont fait abattre la foudre presqu’en instantané, sur deux commissariats et une préfecture. Bilan : un blessé et beaucoup de dégâts matériels. Ils ont semé par la même occasion à Baraboulé et Tongomayel, la graine de la psychose qui a déjà éclos à Samorogouan, Intagom et  Nassoumbou, contraignant les populations à l’exil pour certaines et aux nuits blanches pour les autres. La vie dans le Sahel burkinabè est désormais rythmée par les descentes fréquentes des djihadistes, qu’ils viennent d’ailleurs ou que ce soit des cellules dormantes, issues de l’école de Ibrahim Malam Dicko. Il fera probablement encore parler de lui, ce prédicateur radical, devenu une véritable terreur dans le Nord du Burkina où il est accusé d’être impliqué dans bien des attaques terroristes dont celle qui a coûté la vie à 12 militaires burkinabè à Nassoumbou, le 16 décembre 2016. Dans la région de Djibo d’où il est originaire, l’imam recrute et n’a jamais caché ses atomes crochus avec Hamadoun Koufa, un autre prédicateur tout autant radical, lui d’origine malienne. Ensemble, les deux islamistes comptent réimplanter un grand royaume peul dans la région. Malam Dicko qui affirmee maintenant être à la tête du mouvement « Ansarul Islam », a fait ses armes aux côtés des combattants de l’ex-Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao). Les expéditions punitives mortelles constituent sa recette pour dissuader ceux qui le lâchent dans son entreprise terroriste. Qui arrêtera l’imam Dicko, ancien détenu des prisons maliennes, de continuer à écumer le nord du Burkina, où il sème la mort au nom d’une religion qui pourtant prône le pardon et l’amour ?

Où se trouve la porte du salut pour les Burkinabè, notamment ceux du nord qui ne savent plus à quel saint se vouer ? En tout cas, l’optimisme n’habite plus les esprits face à la facilité presque déconcertante avec laquelle les terroristes frappent. La riposte tarde à se dessiner. Viendra-t’elle-même un jour, se demandent les plus pessimistes, en face du manque de réaction adéquate des Forces de défense burkinabè armées d’une volonté inoxydable mais démunies devant la lourde artillerie déployée par des djihadistes qui s’érigent même en maîtres d’un terrain dont ils ont meilleure connaissance. Pire, les services de renseignement, unité centrale de la sûreté nationale répondent peu ou prou présents. L’Etat met-il l’accent sur ce volet névralgique de la défense du territoire ? Difficile de répondre par l’affirmative, dans la mesure où les Forces de défense et de sécurité burkinabè sont toujours surprises et défaites dans leurs positions. Plus que jamais, le défi sécuritaire doit constituer la priorité, et le Burkina ne pourra pas le relever par des déclarations ou en rejetant tout le temps le tort sur le régime déchu. Seule une stratégie bien pensée et exécutée par des hommes bien équipés et au moral d’acier peut faire gagner cette guerre asymétrique au Burkina. En tout cas, le tout nouveau ministre de la Défense qui vient d’être malheureusement cueilli à froid l’a dit : « Les terroristes seront terrorisés ». Qui dit mieux ?

Par Wakat Séra