Accueil Editorial Emmanuel Macron: 13 minutes chrono pour convaincre les Gilets jaunes

Emmanuel Macron: 13 minutes chrono pour convaincre les Gilets jaunes

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Bienvenue dans le royaume des Gilets jaunes (Ph. lesoir.be)

Après leur quatrième sortie, les «Gilets jaunes» français ont donc poussé Emmanuel Macron dans les cordes et l’ont contraint nà sortir de la léthargie dans laquelle il s’était réfugié depuis le 1er décembre dernier. Ce lundi 10 décembre, dans un discours très solennel montrant toute la gravité de la crise, a commencé par condamner les violences lors des manifestations avant de se livrer à un mea culpa notamment sur ses paroles qui ont pu blesser et conclure par des annonces importantes dont la portée n’est pas des moindres.  Le successeur de François Hollande, qui a pris les clés de l’Elysée, envers et contre tous les pronostics qui ont été surpris par la mort subite des dinosaures de la politique française, a pris la parole pour s’exprimer contre cette poussée de fièvre jaune qui met à rude épreuve la France de la liberté, de l’égalité et de la fraternité. Le mouvement, en quelques jours a, du reste, sérieusement impacté négativement l’économie française. Le président français, plus connu pour sa réplique vive, avait, cette fois-ci préféré mettre en première ligne son premier ministre. C’est donc Edouard Philippe qui, jusque-là prenait tous les coups, rencontrant, entre autres, les chefs de partis politiques et les Gilets jaunes. Désormais, Macron est revenu dans le jeu, même s’il n’a pas réussi à convaincre les « jaunes » en face, ceux-ci ayant jugé les propos du président mitigé, mettant par ailleurs en exergue, ce déficit de confiance qui les sépare maintenant de Emmanuel Macron.  C’est clair, par ses mots de presque capitulation, tout en dénonçant les actions de grande violence qui ont embrasé Paris ces premiers jours du dernier mois de la deuxième année de sa gouvernance, le plus jeune président de la France entend réorienter son quinquennat. Mais les mesures annoncées qui relèvent le Smic de 100%, améliorent les conditions de vie des retraités et des femmes,  faites par le locataire de l’Elysée n’ont pas calmé les ardeurs des Gilets jaunes qui, certainement en veulent plus. Les appels au dialogue et au rapiècement du tissu social français effiloché n’ont pas encore fait tomber le mercure.

Qu’attendre maintenant de Macron pour remettre de l’ordre dans la maison suite à cette deuxkième crise majeure après celle provoquée par l’affaire Benalla à l’époque? Celui que ses contempteurs qualifient de «président des riches», devra en tout cas faire plus d’accoutumée pour ramener le typhon jaune à des proportions plus raisonnables de simple tempête. Mais la tâche du premier des Français ne sera pas des plus simples. La majorité de ses concitoyens, des jeunes sans emploi aux plus vieux retraités, en passant par des femmes au foyer qui dénoncent la baisse du contenu du panier de la ménagère sont devenus Gilets jaunes ou tout au moins des sympathisants. Qui plus est, tous les Français, d’une manière directe ou indirecte, sont des consommateurs de carburant dont la hausse programmée pour le 1er janvier 2019 et finalement annulées sous la pression de la rue. Mais la température était trop montée et sa chute ne peut donc être brusque, les Français ayant sans doute trouvé le moyen de faire descendre de son piédestal qu’il a construit trop haut pour être proche de leurs réalités qu’ils jugent de plus en plus dures. Et c’est pour contrer cette précarité qui les guette que les compatriotes de Macron lui garderont le couteau à la gorge. Tout ceci à l’air de déjà vu en Afrique où des organisations de la société civile et le peuple, de façon spontanée ou sous la coupe de mouvements de lutte contre la vie chère bousculent des pouvoirs en place et en font tomber parfois certains.

Le printemps arabe fera-t-il des enfants de l’autre côté de la Méditerranée? C’est moins certain, surtout qu’en Europe, on a non des hommes forts, mais des institutions fortes, bien huilées qui, malgré l’absence d’un chef comme la Belgique à plusieurs reprises depuis la crise politique de 2007-2008 dans ce pays. Mais c’est la même Belgique, qui, comme par hasard, atteinte par la spirale des Gilets jaunes, emboîte le pas à sa voisine, la France. C’est dire aussi qu’il est temps pour l’Europe de changer de modèle socio-économique pour mieux prendre en compte les préoccupations des couches dites plus démunies. En attendant, on attend les premiers effets du nouveau contrat social proposé par Macron pour panser les plaies ouvertes de la France. Les mots vont-ils pouvoir guérir tous les maux? Rien n’est moins sûr!

Par Wakat Séra