Accueil A la une G5 Sahel: des larmes de crocodile sur les tombes fumantes doivent cesser!

G5 Sahel: des larmes de crocodile sur les tombes fumantes doivent cesser!

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Les présidents des pays du G5 Sahel à Niamey (Ph. AFP)

71 soldats ont été massacrés à Inates, au Niger, la semaine dernière, plongeant une énième fois le Sahel dans le deuil, mais surtout dans le désarroi, face à un drame terroriste auquel nous ne répondons que par des hommages, des décorations à titre posthume et des sommets. Comme s’ils n’attendaient que cette hécatombe qui n’est que le grain d’un long chapelet de tueries les plus ignobles les unes que les autres, les autorités nigériennes ont sorti les drapeaux aux couleurs nationales, les médailles et surtout les décrets de deuil national en mémoire de nos «héros morts pour la patrie». On n’aura bientôt plus de héros à pleurer, tant la hargne des «individus armés non identifiés» et la soif inextinguible des combattants de Al qaida au Maghreb islamique (Aqmi) ou du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans et à l’islam (GSIM) sont meurtrières. En attendant de le faire à la prochaine attaque terroriste qu’ils dénonceront encore avec la même véhémence, les têtes couronnées du G5 Sahel, contrairement à la coutume chères à elles d’aller s’incliner individuellement ou en groupe sur les dépouilles des militaires tombés contre les assaillants, elle ont choisi de tenir un sommet sur les tombes encore chaudes des vaillants «71 de Inates». Il faut le dire sans ambages, cette réunion de trop, est certes une marque importante de la solidarité humaine et de voisinage dans les épreuves difficiles, mais, sauf miracle, elle n’apportera rien de nouveau dans la lutte contre le terrorisme.

Le mal est connu. Mieux les ennemis sont connus et même bien connus. De quel diagnostic ont encore besoin nos dirigeants et nos armées pour mettre fin au terrorisme? Même si cette guerre est dite asymétrique, comme pour masquer une impuissance face aux assauts incessants des terroristes, il ne reste plus qu’à faire face avec des stratégies idoines et des méthodes de ruse comme en ont à souhait ceux d’en face, pour les anéantir. Du reste, cela n’est pas fortuit de le rappeler, la meilleure défense, c’est l’attaque. Malheureusement, démunies de matériel à la hauteur des armes lourdes de leurs adversaires et surtout sérieusement handicapées par un service de renseignement à la pointe, les armées du G5 Sahel (Mauritanie, Tchad, Niger, Burkina Faso, Mali) se font toujours surprendre et battent soit en retraite ou sont contraintes de se battre jusqu’au dernier souffle. Et c’est bien le moment de rendre hommage à ces militaires qui sont obligés d’assumer l’incurie de leurs dirigeants dont la mal gouvernance et l’absence presque totale de vision pour gérer un pays et non des clans ou des partis. Le seul objectif de sauver son fauteuil présidentiel ou ministériel ou encore de simple parti politique, est un mal qui nourrit le terrorisme. Les divisions sociales, la marginalisation, l’injustice, la stigmatisation, le développement orienté des régions et surtout l’absence de cohésion sociale sont également, entre autres, un terreau fertile dont se nourrissent à satiété, le terrorisme et le grand banditisme. En tout cas, l’heure n’est plus aux gémissements et aux slogans du genre «le peuple burkinabè ou le peuple malien vaincront». Trop de morts jonchent ce chemin vers une victoire qui ne se dessine que dans les discours et sur les réseaux sociaux.

Mais sans verser dans le cynisme, on peut saluer ce malheur des morts de Inates qui tombe à pic et rappelle à nos dirigeants et populations que s’ils faut aller à Pau pour répondre à l’invitation de Emmanuel Macron pour «clarifier» leur position sur la présence de la force Barkhane dans le G5 Sahel alors que ne fait que monter dans cette espace «le sentiment anti-français», il est important de parler de la même voix. Contrairement à ce chef de l’Etat, Roch Marc Christian Kaboré, le président du Faso, qui, dès le lendemain de l’annonce officielle de l’invitation du président français, avait répliqué qu’il irait à Pau pour parler «franchement». Même si cela ne fait plus l’ombre d’un doute que, compte tenu de la proportion des événements sur le terrain et n’en déplaise aux nationalistes et panafricanistes d’une autre époque qui veulent chasser sans autre forme de procès, les «blancs » des «riches» terres «africaine», il est important de mener le débat sans passion et surtout entre partenaires. Pas entre colons et ex-colonisés.

Par Wakat Séra