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G5 Sahel: une force bien faible!

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La Force G5 Sahel pourrait bien ne pas avoir les moyens de ses ambitions (Ph. d'illustration-france24.com)

Un accouchement inquiétant, ou tout au moins très difficile. C’est le scénario qui se dessine pour la force du G5 Sahel dont la mission originelle est de lutter contre le terrorisme et toutes les formes de trafic dans la bande sahélo-saharienne. En effet, contrairement à ses sœurs aînées qui accomplissent déjà cette tâche avec plus ou moins de bonheur, la force du G5 Sahel, portée devant le Conseil de sécurité des Nations unies par la France au nom de ses pays membres, n’a pas reçu l’acceuil escompté. Les Etats-Unis et la Grande Bretagne ayant soigneusement et âprement lutté contre toute caution onusienne que lui donnerait une résolution. Un malheur n’arrivant jamais seul, ce bébé pourrait bien naître en l’absence d’un de ses cinq géniteurs, en l’occurrence le Tchad dont le président, Idriss Deby Itno, émet des réserves sur son opérationnalisation. Evoquant la conjoncture économique difficile que traverse son pays et exprimant ouvertement tout son dépit du fait de n’avoir bénéficié d’aucun soutien financier dans son engagement contre le terrorisme, l’homme fort de N’Djamena, prévient en tout cas ne pas être en mesure de déployer des troupes en même temps au titre de la Mission des Nations unies pour la stabilisation du Mali (Minusma) et dans le cadre de la Force du G5 Sahel.  Difficile de lui donner tort sur ce plan, dans la mesure où les Tchadiens sont également sur d’autres théâtres d’opération comme la Centrafrique, sans oublier le Nigeria, dans la guerre contre Boko Haram.

Et la France dans tout ça? Emmanuel Macron dès sa prise de fonction comme président et chef des armées n’a pas caché sa détermination dans la traque aux djihadistes dans le Sahel. Sa première sortie hors de l’Europe fut même réservée aux éléments de la Force française Barkhane à Gao au Mali. Mais, le nouveau chef de guerre français n’en n’a pas moins exigé des armées africaines une plus grande implication dans la lutte. Sans annoncer un désengagement quelconque dans cette guerre contre les djihadistes qui écument le Sahel, agissant dans le nord malien en territoire conquis, les Français n’arrivent cependant pas à cacher une certaine lassitude sur le terrain. Preuve s’il en fallait encore, la déclaration sans équivoque du chef du Commandement des opérations spéciales (COS) lors de cette prise d’arme exceptionnelle à Paris, ce 27 juin, à l’occasion des 25 ans de ce corps qui a fait ses preuves dans les attaques terroristes de Bamako et de Ouagadougou et la formation d’unités anti-terroristes en Afrique. Le gradé français a été, on ne peut plus clair, en affirmant en substance que le COS ne s’éternise pas sur les terrains d’opération. Plus précis, il a signifié que le COS n’a pas vocation à rester au Mali, en tout cas «pas sous la forme actuelle».

Certes, les troupes françaises ont été très présentes sur le terrain africain de la lutte contre le terrorisme. Mais la France n’a pas pris les devants de cette guerre pour les beaux yeux des Africains. C’est dans cette logique que leur départ pourrait bien être davantage préjudiciable pour les intérêts français qu’ils ont pour mission de protéger, les menaces des «fous de Dieu» se faisant encore plus précises contre les cibles occidentales sur le continent. En témoignent la dernière attaque terroriste contre le campement de Kangaba au Mali et la foudre que menace de faire descendre le chef djihadiste Al-Sahraoui sur des communautés de ce pays, communautés qu’il accuse de collaborer avec la France. S’il faut reconnaître que les armées locales doivent être en mesure de défendre leurs frontières souveraines, il n’en demeure pas moins que la puissance de feu en face les dépasse souvent et que la logistique leur fait encore défaut. Sans infantiliser les armées locales, il faut le dire sans ambages, elle ont encore besoin du soutien des Occidentaux qui après tout, sont les cibles privilégiées des djihadistes.

Question: et si au lieu de multiplier les forces et de disperser la force, les Sahéliens et plus généralement les Africains s’appuyaient plutôt sur une grande force coiffée par l’Union africaine ou des institutions sous régionales comme l’Ecomog battant pavillon Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest? L’union fait la force, dit-on!

Par Wakat Séra