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Soudan: agir contre les généraux, pour que plus tard ne soit trop tard!

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Le peuple aura-t-il raison jusqu'au bout? (Ph. lechodalgerie-dz.com)

Ce mardi, était encore jour de manifestation à Khartoum. Dans sa lutte acharnée de déloger les militaires du palais présidentiel où ils sont en train de s’enkyster, pour une transition interminable, après la révolution populaire qui a conduit au départ forcé de l’ancien chef de l’Etat Omar el-Béchir, le peuple soudanais ne lâche rien. Cette nouvelle journée de fronde sous haute tension, est une énième mais la première, deux jours après la démission du Premier ministre soudanais qui était devenu «otage» des militaires, mais «traitre» du peuple qui lui reproche d’accompagner ses nouveaux bourreaux dans leur forfaiture. Désormais seuls maîtres de la transition, en attendant de trouver, un autre chef du gouvernement civil, taillable et corvéable à merci, les généraux continuent leur œuvre de répression sanglante.

Abdallah Hamdok est depuis ce dimanche, l’ancien Premier ministre de la transition soudanaise. Après son échec dans la tentative de formation d’un gouvernement, le visage civil de la transition militaire a jeté l’éponge. Il sort ainsi définitivement des plans des généraux putschistes, qui, après l’avoir mis aux arrêts et fait passer par la case résidence surveillée l’ont rhabillé de ses attributs vides de chef du gouvernement civil. Cette démission, c’est un véritable plaisir, sans doute, savouré par la junte militaire qui ne poursuivait d’autre objectif que de se débarrasser de ce colis gênant pour son entreprise diabolique de confiscation du pouvoir.

Si les militaires s’étaient rangés du côté du peuple, lors de la révolution d’avril 2019, pour pousser hors du jeu politique, l’ancien président Omar el-Béchir, leur stratagème n’a fonctionné que pour un bout de temps. Car c’était uniquement pour sauvegarder leurs intérêts et prérogatives personnels, amassés grâce à leur emprise sur l’économie nationale. Les militaires n’ont pas mis du temps pour montrer leur intention réelle de faire échec à toute reprise en main du pouvoir par un peuple assoiffé de justice, de bonne gouvernance, de liberté d’expression. Oui, les Soudanais, privés sur des décennies de la saveur inimitable de la démocratie, n’entendaient plus se remettre sous le joug d’un régime militaire, surtout pas revivre le retour aux affaires de leurs anciens «maîtres».

Mais, maintenant que le général Abdel Fattah al-Burhan et ses frères d’arme ont repris, seuls, la transition en main, sans doute dans la ferme intention de la faire durer le plus longtemps possible, voire s’installer durablement au pouvoir, que peuvent les manifestants, malgré leur détermination à continuer la lutte? En tout cas, pour l’instant, le scénario leur est peu favorable, même s’ils tentent de raviver et maintenir allumée, la flamme révolutionnaire qui leur avait permis de venir à bout du pouvoir absolu de Omar el-Béchir. Les généraux répriment sans état d’âme et dans le sang, soutenus, dans la sous-région par des voisins comme l’Egypte de Abdel Fattah al-Sissi l’homonyme presque parfait du général al-Burhan, les deux portant les mêmes prénoms, et à l’international par des pays peu ou prou portés sur les vertus de la démocratie, comme la Russie et la Chine.

Chaque journée de fronde contre les généraux est ponctuée par ses morts qui viennent gonfler le bilan des 250 personnes qui ont perdu la vie, lors de la révolution qui a conduit à la chute de l’ancien président el-Béchir. Et les morts s’enfilent, dans le plus grand silence, la junte ayant pris l’option lâche de couper l’internet et donc les réseaux sociaux, et de faire taire les organes de presse. Les sanctions prises ou annoncées, ciblées ou non, de la communauté internationale, l’Union africaine, les Etats-Unis et l’Union européenne en tête, n’ont d’autre effet sur les généraux que celui de l’eau qui coule sur le dos d’un canard.

La communauté internationale a intérêt à agir avec plus de promptitude, et surtout d’efficacité, contre les «généraux tueurs», afin que le peuple soudanais puisse récupérer sa révolution confisquée et jouir des fruits de la souveraineté pour laquelle elle se bat sans faiblir. Sinon, plus tard sera trop tard.

Par Wakat Séra