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46 militaires ivoiriens détenus au Mali: et si le colonel Goïta mettait balle à terre?

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Le colonel Assimi Goïta

Alors que la Côte d’Ivoire, évoquant des dysfonctionnements et des incompréhensions dans l’affaire dite des «49 militaires ivoiriens arrêtés le 10 juillet à l’aéroport de Bamako» demeure dans un souci d’apaisement et de maintien de relations pacifiques entre pays voisins et frères, la junte militaire malienne, comme possédée par les esprits belliqueux de Mars et Arès, des dieux de la guerre dans la mythologie grecque, ne fait que faire monter les enchères. Forte de la foi en la médiation des présidents africains dont le Togolais Faure Gnassingbé, Abidjan, toujours dans un élan de règlement à l’amiable de ce qui n’aurait jamais dû être une source de friction entre deux pays liés par la géographie et l’histoire, entend, désormais confier le dossier, entre autres, à la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO).

Mais comme si elles craignent le retour du bâton qui fait très mal, les autorités de la transition militaire malienne, poussent des cris d’orfraie et mettent en garde l’organisation sous-régionale, à travers un communiqué dont une copie truffée de fautes circule sur les réseaux sociaux. Car pour les double-putschistes maliens, l’affaire est judiciaire et bilatérale. La junte militaire essaie même de faire croire que la Côte d’Ivoire reconnaît sa responsabilité dans ces bisbilles alors qu’à travers la déclaration du secrétaire général de la présidence ivoirienne, lors de la libération de trois des 49 «otages», des dames, «la République de Côte d’Ivoire déplore que des manquements et des incompréhensions aient été à l’origine de cet événement fortement regrettable». Trouvez l’erreur!

Pourquoi le colonel Assimi Goïta s’entête-t-il à garder cette posture de ravisseur en détenant les 46 militaires ivoiriens que la junte militaire traite diversement de «soldats», d’«éléments» et de «mercenaires» et qui sont en fait des «otages» de Bamako, pour emprunter le mot à Abidjan? De toute façon, Assimi Goïta ne contredit pas les autorités ivoiriennes, car le modus operandi des militaires maliens est simplement celui d’otages libérés contre le paiement de rançon ou en échange de quelque chose.  Ici, le deal proposé par le colonel Goïta porte sur un échange des «otages» ivoiriens contre la livraison de personnalités maliennes qui ont, fort heureusement pour leurs vies, pris la poudre d’escampette au plus tôt, après le putsch militaire des hommes de la garnison de Kati.

Comme l’ancien Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga mort dans une clinique de la place alors qu’il était dans les geôles de la junte militaire, Boubou Cissé, Karim Keïta et Hubert Tiéman Coulibaly, tous d’anciens dignitaires du régime de Feu Ibrahim Boubacar Keïta, auraient pu également subir le même sort. Mais ayant pu échapper, pour l’instant en tout cas, au filet lancé par les putschistes maliens engagés dans une chasse aux sorcières qui ne dit pas son nom, voilà qu’ils sont visés par des mandats internationaux lancés par la junte militaire qui pense, à tort, que cette procédure est systématiquement exécutée. En tout cas, tant que les vies des bannis de Bamako seront en danger, ces mandats risquent bien de rester lettres mortes. D’ailleurs, Abidjan a annoncé que les personnes dans le collimateur, au sens propre, de la junte ne sont plus établies sur les bords de la lagune Ebrié.

Que fait donc de la bonne entente séculaire entre pays frères et amis, la junte militaire malienne? L’arbre à palabre africain qui a fait ses preuves dans le prestigieux empire mandingue n’a-t-il plus le moindre sens sur les rives du Djoliba? Pourquoi vouloir faire payer avec cette rancœur profonde au président ivoirien, les dures sanctions financières et commerciales prises par la CEDEAO contre le Mali et qui constituent le tarif appliqué aux putschistes, les putschistes maliens qui, eux, s’étaient octroyés de surcroît, envers et contre tous, une transition hors norme de cinq ans? Pourtant, il aurait été plus facile et davantage efficace de négocier!

Et si Assimi Goïta essayait de mettre balle à terre pour sauver ce qui peut encore l’être, pour son statut peu enviable de putschiste que ses défenseurs indécrottables semblent oublier, aveuglés par les actions populistes et propagandistes de la junte militaire malienne? Il n’est jamais tard pour bien faire!

Par Wakat Séra