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Afrique du Sud : la réglementation menace la santé publique !

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Plus de 6 ans pour autoriser la mise sur le marché d’un médicament, c’est la triste réalité que connaissent les Sud Africains mis en marge d’une partie des avancées médicales. Dans son article publié en collaboration avec Libre Afrique Jasson Urbach, analyste pour the Free  Market Foundation, dénonce la lenteur de l’administration en charge des demandes d’autorisation de commercialisation de nouveaux médicaments. Il fait alors une proposition pertinente et peu couteuse qui coule de source et que d’autres pays appliquent déjà.

Cette dernière décennie, l’un des problèmes les plus frustrants affectant le secteur pharmaceutique de l’Afrique du Sud est la lenteur de l’instance de réglementation pharmaceutique à approuver les médicaments. Il lui faut parfois six ans alors même que les médicaments ont déjà été approuvés dans d’autres pays avancés. Ainsi, environ 16 000 médicaments sont en attente d’approbation de commercialisation. Non seulement ces retards impactent les coûts pour les fabricants de médicaments, mais ils surtout ils empêchent les patients d’avoir accès aux médicaments en temps voulu.

La lenteur de l’administration

On pourrait penser qu’un organisme de réglementation local est nécessaire pour garantir la sécurité des produits cependant, l’inertie bureaucratique empêche des milliers de patients sud-africains d’avoir accès à des médicaments déjà approuvés ailleurs et susceptibles de guérir ou d’atténuer leurs symptômes. Pour les patients atteints du cancer et du VIH, ces retards pourraient être fatals. Environ la moitié des dossiers en attente d’approbation sont destinés à de nouveaux médicaments utilisés déjà à l’étranger. La moitié de ces produits figurent sur la liste d’attente des autorisations de mise sur le marché depuis plus de cinq ans. Un fabricant de médicaments a déclaré avoir attendu sept ans avant d’obtenir une approbation réglementaire sur certains produits, et en ce moment plus de 250 dossiers de médicaments sont en attente d’approbation.

Si un médicament n’est pas enregistré auprès de l’organisme de régulation des médicaments en Afrique du Sud (Autorité de réglementation des produits de santé d’Afrique du Sud), le patient peut parfois y avoir accès au moyen d’un permis délivré en vertu de l’article 21, qui lui permet de l’importer de l’étranger. Ce processus est coûteux car les assurances ne remboursent pas un patient pour un médicament non enregistré. Bien que cela puisse soulager ou sauver les patients ayant les moyens de payer le prix fort, cela ne résout la racine du problème

Pourquoi tant de retard ?

Le manque de ressources humaines est l’un des facteurs contribuant à ces retards. Un autre facteur pourrait être la politique du gouvernement en faveur des génériques. La législation des médicaments, a été crée ironiquement, il y a quelques années, dans le but d’accroître l’accès aux médicaments. Elle exigeait l’importation de médicaments moins chers de l’étranger et le remplacement obligatoire des médicaments innovants par des génériques. La réforme a naturellement conduit à une croissance exponentielle des demandes d’enregistrement des fabricants de génériques. Cette politique doit être abandonnée de toute urgence.

Fait encourageant, la présidente du conseil d’administration de l’organisme de réglementation des médicaments, Helen Rees, a suggéré que l’autorité de réglementation se réfère aux examens antérieurs d’autres organismes de réglementation lors de l’enregistrement des médicaments. Cela a beaucoup de sens car la plupart des médicaments sont d’abord examinés par la Food and Drug Authority (FDA) des États-Unis ou son équivalent dans l’UE, l’Agence Européenne des Médicaments (EMA), avant d’être mis sur le marché.

Un moyen simple et peu couteux

Bien que la référence à l’avis d’autres organismes de réglementation soit un premier pas important vers la mise en place d’un système de réglementation des médicaments modernisé et efficace, les choses pourraient être bien meilleures. Par exemple, Singapour a sélectionné des régulateurs de médicaments de six pays (États-Unis, Canada, Suisse, Japon, Australie et Nouvelle-Zélande) et l’EMA, et si un nouveau médicament en question est approuvé par au moins deux de ces régulateurs, il est automatiquement autorisé. Ainsi, l’approbation d’un médicament est obtenue dans les 90 jours suivant le dépôt de la demande d’enregistrement. Singapour est  ainsi devenu l’une des principales destinations du tourisme médical. S’il n’avait pas adopté cette approche, il est peu probable que son industrie du tourisme médical se soit développée parce que les patients n’auraient pas accepté de ne pas bénéficier de produits efficaces mais indisponibles dans le pays concerné.

Rajoutons que les fabricants sont dissuadés d’investir et d’installer des usines dans un pays où ils sont confrontés à un processus d’approbation du marché imprévisible, inefficace ou lent. Ils ne veulent pas que leur investissement soit mis en veille du fait de la lenteur de l’autorité de réglementation pharmaceutique locale.

Pour un pays à revenu intermédiaire comme l’Afrique du Sud, qui doit faire face à de multiples problèmes de santé et un manque criant de ressources, le choix politique pratique pour accroître l’accès aux médicaments et sauver des vies, ainsi que pour économiser des ressources rares, consiste à approuver automatiquement les médicaments, génériques et originels, qui ont déjà été approuvés par les autorités de réglementation pharmaceutique des pays avancés.