Accueil A la une Afrique: les généraux tuent au Soudan, les colonels frondent la CEDEAO!

Afrique: les généraux tuent au Soudan, les colonels frondent la CEDEAO!

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Le Soudan compte toujours ses morts (Ph d'archives)

Au Soudan, les manifestations du peuple contre la confiscation de sa révolution par les généraux se suivent et rivalisent avec leurs comptabilités macabres. Les dernières en date, celles de ce jeudi qui ont fait descendre dans les rues des grandes villes du Soudan, des dizaines, certains chiffres évoquent des centaines, de milliers de personnes, ont été réprimées sans ménagement par les militaires au pouvoir depuis huit mois, après leur coup d’état contre la transition militaro-civile. A Khartoum la capitale où ces manifestations dites «marche du million» ont toujours drainé une foule dense d’irréductibles, le bilan provisoire de ce jeudi fait état de six morts. Encore une œuvre des voleurs de la révolution populaire qui n’ont en réalité sacrifié Omar el-Béchir en son temps, que pour sauver les privilèges immenses que leur accordaient leurs galons de généraux à la tête non de troupes militaires, mais de l’économie soudanaise. Le coup d’Etat du général Abdel Fattah al-Burhan continue donc d’égrener son long chapelet de morts.

Le pouvoir kaki tue avec la même désinvolture, est-on tenté de dire, surtout que la communauté internationale qui fait montre d’une impuissance criarde n’est d’aucun secours pour des populations qui essaient de défendre, les mains nues face aux canons de l’armée, leur liberté éphémère retrouvée avec la chute, le 11 avril 2019, de Omar el-Béchir, le président danseur à la canne. Les Soudanais qui pensaient alors être sortis de l’auberge, ont vite déchanté, ceux qui les avaient aidés à porter l’estocade finale à leur bourreau qui a dirigé d’une main de fer le pays depuis 1993, ayant ôté leur déguisement d’agneau pour sortir leurs crocs de loups. Les masques tombés, c’est le calvaire qui a continué pour un peuple qui, malgré les répressions sanglantes et meurtrières de ses mouvements de protestation, ne lâche rien. Mais jusqu’à quand les «révolutionnaires» tiendront-ils le coup, malgré leur détermination qui ne s’émousse guère devant la force brute et aveugle d’une armée dont le rôle premier est, pourtant, la défense du territoire et des populations?

Pendant que les généraux tuent au Soudan, au Mali, en Guinée et au Burkina Faso, ce sont les colonels qui donnent des nuits blanches au président en exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO), le Ghanéen Nana Akufo-Addo et ses pairs de la sous-région. En effet, après les putschs militaires dont ils ont été les auteurs, chacun des colonels s’est offerte, envers et contre la CEDEAO, une transition dont la durée est presqu’égale à un mandat normal de président élu. Les derniers calendriers électoraux que le Malien Assimi Goïta, le Guinéen Mamadi Doumbouya et le Burkinabè Paul-Henri Sandaogo Damiba, n’ont toujours pas satisfait l’organisation sous-régionale qui est toujours prête à dégainer, en matière de sanctions.

Le Mali en sait quelque chose, même si l’«arrogance» de ses dirigeants, s’appuie sur une propagande sans borne, pour les faire passer pour des sauveurs de populations qui, pourtant, se débattent comme de beaux diables entre l’enclume des attaques terroristes et le marteau des conséquences assommantes de sanctions financières et économiques. Sans oublier que comme le Burkina qui lui également est loin d’avoir échappé à la fatwa de la CEDEAO, le Mali continue de pleurer ses morts d’attaques des Hommes armés non identifiés, les fameux HANI, ou de terroristes reconnus de l’Etat islamique au Grand Sahara (EIGS) ou du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Jnim).

24 mois pour le Mali. 36 mois pour le Burkina. 39 mois pour la Guinée. Ainsi se présente, à la date d’aujourd’hui, la durée de la transition fixée différemment par chaque junte militaire. A la réunion de ce dimanche 3 juillet, à défaut de durcir les sanctions contre le Mali ou d’en prendre contre le Burkina et la Guinée, la CEDEAO ne manquera sans doute pas, de sommer les colonels putschistes à revoir la durée de leurs transitions politiques à la baisse, dans un «chronogramme raisonnable», afin que le pouvoir revienne au plus vite aux civils. Même si selon des lois électorales qu’ils se sont taillées sur mesure, certains, comme le Malien Assimi Goïta, troqueront, le treillis militaire contre le boubou bazin. Car aux termes de la nouvelle loi électorale malienne, un militaire peut prétendre à la présidence ou à un poste électif! Il lui suffit d’opérer la mue, quatre petits mois avant les échéances électorales! Comme quoi, les balayeurs ont bien la volonté de s’installer dans les maisons qu’ils ont nettoyées!

Par Wakat Séra