Accueil A la une Assassinat de Thomas Sankara: 32 ans de disparition, 32 ans d’éloges

Assassinat de Thomas Sankara: 32 ans de disparition, 32 ans d’éloges

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«Je me suis fait une raison. Soit je finirai vieil homme quelque part, soit ce sera une fin violente car nous avons tellement d’ennemis». Oui, il l’avait dit et mieux, l’avait prédit. Thomas Sankara, le prédicateur, le président le plus pauvre du monde, le révolutionnaire qui n’avait pas sa langue dans sa poche fut «liquidé» le 15 octobre 1987 au sein du Conseil de l’Entente à Ouagadougou par un commando de militaires du Centre national d’entrainement commando (CNEC). Le perchoir fut occupé immédiatement par le numéro 2 de la révolution, le capitaine Blaise Compaoré, celui-là qui est suspecté d’être le commanditaire de l’assassinat du père de la révolution d’août 1983. «Les grands hommes ne meurent pas», c’est le cas de cet «homme intègre» qui fait toujours parler de lui, 32 ans après sa mort. Il est devenu comme un prophète pour certains de ces admirateurs et un mémorial est en projet de réalisation, en son nom.

Le 15 octobre 1987 fut une date où la révolution burkinabè a pris un coup. Le putsch qui a porté le capitaine Compaoré au perchoir et qui s’est soldé par la mort de celui qui a amené le pays des «Hommes intègres» à l’autosuffisance alimentaire en quatre ans de gestion du pouvoir, a emporté également la révolution. Une perte qui n’a pas laissé indifférent le monde entier. Si certains se réjouissaient de la mort du leader de la révolution burkinabè et ont même tenté de faire disparaitre son nom, d’autres par contre n’ont de cesse de pleurer l’homme et travailler à faire vivre ses idéaux. Partout dans le monde des gens se réclament sankaristes.

«La bière n’est pas une priorité. Qu’est-ce qu’on choisit, le mil pour manger ou le mil pour boire ? Je crois qu’il faut d’abord nourrir les gens. Ensuite on verra le sort de ceux qui veulent boire. Tous les burkinabè ne boivent pas de la bière, mais tous les burkinabè mangent chaque jour. Il y aura de la bière premièrement à condition que les gens aient fini de manger à leur faim, deuxièmement à condition que ce soit à partir de mil du Burkina. Est-ce qu’un régime politique sérieux peut avoir comme préoccupation principale le sort des buveurs de bière ?», disait-il le 4 octobre 1987, quelques jours avant sa mort qui a été qualifiée de «mort naturelle».

Panafricaniste, anti-impérialiste, socialiste, révolutionnaire, voici entre autres les qualificatifs qui collent au natif de Yako (Nord du Burkina), Thomas Sankara (21 décembre 1949-15 octobre 1987). De sa gestion des affaires de l’Etat à nos jours, le père de la révolution burkinabè n’a cessé d’inspirer et les citoyens du monde et même des dirigeants dans le monde qui le prennent pour exemple et marchent sur ses pas, du fait des actions positives qu’il a pu poser durant sa vie. Trente deux ans après la mort du «Che Guevara africain», son souvenir reste dans les esprits de ceux qui ont connu l’homme, qui l’ont côtoyé et même ceux qui ne l’ont pas connu, notamment la jeune génération.

«Mort naturelle» ou pas un dossier lié à son assassinat a été ouvert à la justice burkinabè et son instruction évolue. A ce jour, 23 personnes dont l’ex-président Blaise Compaoré et le général Gilbert Diendéré, ont été inculpées. Selon les avocats de la famille Sankara, deux mandats d’arrêt ont été émis, l’un contre M. Compaoré qui s’est retrouvé en côte d’Ivoire après sa chute du pouvoir en 2014 et l’autre contre son chef de sécurité au moment des faits, Hyacinthe Kafando, qui est lui aussi à l’extérieur.

«Il serait bon pour tout le monde, pour la conscience collective burkinabè, pour Blaise Compaoré lui-même et même ses supporters qu’il puisse venir au Burkina et être entendu par la justice, qu’il puisse se défendre et donner sa version», a soutenu Me Prosper Farama, l’un des avocats défendant la famille Sankara, au cours d’une conférence de presse le lundi 14 octobre 2019.

Le dossier dont l’instruction évolue verra-t-il son dénouement ? En tout cas pour le moment il est sur le bon chemin, selon ceux qui sont proches de l’affaire. Des dossiers ont été même déclassifiés en France pour permettre la bonne instruction du dossier de l’assassinat de Thomas sankara.

Par Daouda ZONGO