Accueil A la une Côte d’Ivoire: la grâce qui a glacé Laurent Gbagbo!

Côte d’Ivoire: la grâce qui a glacé Laurent Gbagbo!

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Henri Konan Bédié (à gauche) et Laurent Gbagbo, autour de Alassane Ouattara (Ph. d'archives)

Extension du bénéfice de l’indemnité de logement à l’ensemble des fonctionnaires et agents de l’Etat; revalorisation de 20 000 FCFA par mois de l’indemnité de logement pour l’ensemble des fonctionnaires et agents de l’Etat; revalorisation de la prime mensuelle de transport; revalorisation de l’allocation familiale, de 2500 à 7500 FCFA par enfant et par mois pour tous les fonctionnaires et agents de l’état; augmentation prévue dans les prochains mois du Salaire minimum interprofessionnel garanti (Smig); instauration d’une prime exceptionnelle de fin d’année représentant un 1/3 du salaire indiciaire, payable début janvier de l’année suivante; et un nouveau statut général de la Fonction Publique qui devrait voir le jour dans quelques semaines. C’est Noël en plein mois d’août pour les Ivoiriens!

Dans son costume cravate sombre, qui tranchait avec le complet et bonnet rouge-blanc du vrai «petit papa Noël», Alassane Ouattara, n’avait pas moins la hotte chargée qui va avec, la veille de la célébration du 62e anniversaire de l’accession à la souveraineté internationale de la Côte d’Ivoire. Les retraités de la fonction publique comme du privé ont également été mouillés par la pluie des bonnes nouvelles. Si ceux du public bénéficient d’une hausse de l’allocation familiale à 5 000 FCFA par enfant et par mois, ceux du privé connaîtront une hausse de 5% de leur pension. Et toutes ces décisions entrent, en principe, en vigueur dès ce mois en dehors de la prime exceptionnelle qui elle sera d’actualité en janvier 2023.

Mais le chemin sur lequel les Ivoiriens s’étaient amassés et attendaient le plus le «PRADO», lisez président ADO, c’est bien celui de la décrispation qui doit conduire au port de la réconciliation et de la cohésion sociale. Le chef de l’Etat a répondu présent à ce rendez-vous qu’annonçait la rencontre, ce 14 juillet, entre l’homme et ses prédécesseurs. A ce stade, Alassane Ouattara a présenté au peuple, une palette de décrets qu’il a pris et qui vont de la grâce présidentielle accordée à Laurent Gbagbo (LG), avec le dégel de ses comptes et le paiement de tous ses arriérés de rente viagère, à la grâce collective à environ 3000 détenus, en passant par la libération conditionnelle au contre-amiral Vagba Faussignaux et au commandant Jean-Noël Abehi. Mais loin de réjouir les bénéficiaires, ces mesures de grâce et libération conditionnelle ont été plutôt une douche froide pour certains d’entre eux, notamment le condamné le plus emblématique, Laurent Gbagbo.

En effet, l’illustre acquitté de la Cour pénale internationale (CPI) et ses nombreux fans espéraient mieux, soit l’amnistie. Car ils caressent le dessein à peine dissimulé de relancer pleinement dans la vie politique nationale, notamment la course aux élections, le président du Parti des peuples africains (PPA-CI). Il faut dire que le «christ de Mama» malgré son retour triomphal à la maison après son long exil judiciaire, avait toujours pendu sur sa tête, cette épée de Damoclès qu’est sa condamnation par contumace à 20 ans de prison pour le fameux casse de la BCEAO nationale, en pleine crise post-électorale ivoirienne de 2010-2011. Certes, ce glaive de la justice ne menace plus Laurent Gbagbo, mais celui-ci ne retrouve pas non plus la jouissance de son droit d’électeur, encore moins d’éligibilité. Qui a dit que Alassane Ouattara grand économiste, n’était qu’un politicien à la petite semaine?

Donc, «c’est bon, mais c’est pas arrivé», comme le disent les commerçants du marché d’Anono, non loin de la mosquée de Riviera Golf où Alassane Ouattara accomplit souvent sa prière musulmane du vendredi. Dans cette logique, faut-il craindre pour la machine de la décrispation et de la réconciliation nationale avec cette douche froide prise par le camp Gbagbo? En tout cas, toutes les leçons semblent avoir été aussitôt tirées par les anciens présidents ivoiriens, Laurent Gbagbo et Henri Konan Bédié qui ont brillé par leur absence aux festivités organisées à Yamoussoukro, sur les terres de Félix Houphouët-Boigny, pour marquer le 62e anniversaire de l’indépendance de la Côte d’Ivoire. Si le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) a produit un communiqué pour justifier, par des «raisons personnelles», le «boycott» magistral et stratégique opéré par son champion, LG qui n’a certainement pas encore digéré cette grâce qui ne passe pas, est resté, pour l’instant muet comme une carpe.

Mais les Ivoiriens attendent sans doute davantage que le trio de pachydermes inusables qui a pris en otage, depuis la mort du «Vieux» dont le long règne n’a pas fait que du bien à la Côte d’Ivoire, s’éclipse enfin pour donner une nouvelle vie et de nouveaux visages au sommet de la politique sur les berges de la Lagune Ebrié.

Par Wakat Séra