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Dossiers Bouda, DGA Douane, 70 millions: le combat du procureur du Faso pour la bonne gouvernance

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Le procureur du Faso près du Tribunal de grande instance de Ouagadougou, Harouna Yoda a rencontré, ce jeudi 18 juin 2020, la presse pour donner des éclairements sur des dossiers ouverts tel que l’affaire dite de l’ex-ministre de la Défense Jean Claude Bouda, celle de faux ordres de missions des gendarmes du groupement en charge de la sécurité à la présidence du Faso, celle des 70 millions pour étouffer un dossier sur le maire de Ouagadougou Armand Béouindé, celle dite du directeur général adjoint de la douane William Alassane et celle de l’Agence Conseil et de Maitrise d’Ouvrage (ACOMOD).

En ce qui concerne l’affaire dans laquelle est incriminé l’ex-ministre burkinabè Jean Claude Bouda, le procureur Yoda a informé que c’est suite à une plainte du Réseau national de lutte anti-corruption (RENLAC), le 26 avril 2019, qu’une information judiciaire a été enclenchée sur des faits de faux et usage de faux en écriture privée, de fausse déclaration d’intérêt et de patrimoine, de délit d’apparence et de blanchiment de capitaux.

Selon le procureur, le mis en cause n’a pas pu justifier son patrimoine de 252 845 115 F CFA accumuler en trois ans de fonction ministérielle, malgré les documents produits par l’intéressé, qui du reste «ne semblent pas avoir une force probante (…) ce qui laisse penser à de faux documents établis à dessein».

«A la réception du réquisitoire introductif, le juge d’instruction a rendu une ordonnance aux fins d’incompétence partielle en ce qui concerne les faits de fausses déclarations d’intérêt et de patrimoine», a déclaré M. Yoda, qui a soutenu que pour ce qui est des autres faits, le ministre est poursuivable devant le juge de droit commun.

Des gendarmes «escrocs» !

Des gendarmes burkinabè sont actuellement poursuivis devant le Tribunal de grande instance de Ouagadougou pour des faits de faux en écriture publique, usage de faux en écriture publique, escroquerie, blanchiment de capitaux et de complicité. Ces gendarmes qui font partie des agents du Groupement de sécurité et de protection républicaine (GSPR), chargé, notamment de la sécurité de la présidence, ont reconnu avoir établi «sept faux ordre de mission» et «ont perçu» au total «5 334 000 FCFA)». Ils «ont perçu (chacun) entre 700 000 et 1 480 000 F CFA».

«Ces frais de mission ont été perçus par les agents commanditaires au détriment de ceux dont les noms figurent sur les ordres fictifs de mission. Les éléments supposés être des missionnaires ont été invités à émarger mais les sommes d’argents perçues leur ont été retirés par les premiers. Ils n’ont bénéficié que de gratifications pour avoir signé sur les documents sachant qu’ils n’ont pas effectué des missions», a expliqué le procureur du Faso Harourna Yoda, informant que le dossier est en attente de programmation.

70 millions pour étouffer un dossier en justice

L’affaire des 70 millions F CFA qui a abouti à l’arrestation du magistrat Narcisse Sawadogo et Allassane Bagagnan, a été soulevée par le journal l’Evènement et saisie par la suite par le parquet.

Ces individus sont entrés en contact avec le maire Armand Béouindé pour lui proposer leur service qui consisterait à faire étouffer le dossier des 77 véhicules où le bourgmestre est incriminé. Des enregistrements de leurs conversations réalisés par le M. Béouindé attestent les faits relatés par le journal et mettent en cause ces deux personnes.

L’enquête n’a pas permis de retenir des charges contre le substitut général Dieudonné Bonkoungou, le Doyen des juges d’instruction Emile Zerbo, le juge d’instruction Daouda Koanda et Moussa Sané dont les noms sont cités dans les enregistrements audio.  

«Narcisse Sawadogo et Allassane Bagagnan ont reconnu les faits et le contenu des enregistrements audio effectués par le maire», a dit M. Yoda. Ils sont poursuivis pour escroquerie et diffamation suivant la procédure de flagrant délit. «La poursuite de diffamation contre eux fait suite aux plaintes de Dieudonné Bonkoungou, le Doyen des juges d’instruction Emile Zerbo, le juge d’instruction Daouda Koanda», a précisé le procureur.

Selon M. Yoda, «en raison de sa qualité de magistrat» Narcisse Sawadogo «bénéficie d’un privilège de juridiction conformément à l’article 523-1 et 3 du code de procédure pénal», raison pour laquelle lui procureur a formulé une requête à la Chambre criminelle de la Cour de Cassation à l’effet de désigner la juridiction de jugement.

Le directeur général adjoint de la douane mis en examen

William Alassane Kaboré directeur général adjoint de la douane, son épouse et Salif Sylla ont été mis en examen sans être placés en détention mais sous contrôle judiciaire pour des faits d’enrichissement illicite, de délit d’apparence et de blanchiment, selon le procureur Harouna Poda qui a été saisi d’un procès-verbal d’enquête du Commissariat central de police de Ouagadougou qui avait été saisi par l’Autorité supérieure du contrôle d’Etat (ASCE/LC).

De l’enquête «il ressort que M. Kaboré a, par une simulation illicite, utilisé Christophe Anne Kaboré en vue de l’achat et la mise en valeur de 15 parcelles à Ouagadougou dont le montant cumulé serait 1 300 000 000 F CFA», a affirmé le procureur Yoda, notant qu’en sa qualité de fonctionnaire des douanes, il est difficile d’amasser une telle fortune en 23 ans de service.

Il a «usurpé» également «l’identité de salif Sylla pour acheter 655 tonnes de ciment et pour la construction de plusieurs immeubles». Il a aussi fait «des transferts de fonds, sous couvert d’autrui, dont il n’arrive pas à justifier l’origine et la nécessité des opérations.

ACOMOD en justice

A la suite d’une enquête circonstanciée, il est ressorti que le directeur général de l’Agence de conseil et de maitrise d’ouvrage (ACOMOD) a autorisé deux marchés publics au profit de son épouse à travers un groupement de soumissionnaires. «Il en est de même pour l’ex-président du Conseil d’Administration de ACOMOD en la personne de Moussa Sankara, bénéficiaire effectif de l’entreprise 2ARTS, qui a été attributaire d’un marché de 155 704 000 F CFA», a déclaré le procureur Harouna Yoda.

Ainsi le DG de ACOMOD a été mis en examen sans être placé en détention. Quant à l’ex-PCA, Moussa Sankara et Ibrahim Sanou seront également mis en examen selon M. Yoda.

Le procureur a tenu à féliciter et encourager les médias, notamment ceux d’investigations pour le travail abattu malgré certaines difficultés. «Je m’engage à travailler avec mes collaborateurs à ce que l’effort consenti par les médias d’investigations ainsi que toutes les structures publiques ou privées qui luttent pour la bonne gouvernance dans notre pays ne soit pas vain», a conclu le procureur du Faso.

Par Daouda ZONGO