Accueil A la une Du Burkina au Sénégal: la paix par la prière?

Du Burkina au Sénégal: la paix par la prière?

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La prière à elle seule pourra-t-elle ramener la paix? (Ph. d'illustration)

Une journée de jeûne et de prières pour la paix! C’était ce samedi, sur toute l’étendue du territoire burkinabè et sur initiative du gouvernement. Que ce soit dans les temples évangéliques ou autour des autels de sacrifice, des prières ont été dites et des sacrifices effectués pour implorer le soutien de Dieu et des mânes des ancêtres, dans la guerre engagée contre les forces du mal.

Certes les supplications de ce week-end sont montées au ciel et vers les dieux, selon une requête des autorités de la transition. Mais, depuis 8 ans que l’hydre terroriste a pris pour cible le Pays des hommes intègres, les fidèles chrétiens et musulmans n’ont jamais cessé de prier pour le retour de la paix au Burkina. La «prière pour notre pays» s’est même incrustée dans le rituel de la célébartion eucharistique, que ce soit en semaine ou le dimanche, avant que les prêtres ne prodiguent la bénédiction finale qui renvoie leurs ouailles à leurs occupations quotidiennes ou au repos dominical. Il en est de même dans les mosquées, ou sur les grandes places comme celle de la Révolution à Ouagadougou ou celle Wara Wara de Bobo-Dioulasso, lors des grandes célébrations du Ramadan ou de la Tabaski.

Malgré tout, les attaques terroristes n’ont pas cessé. Pire, elles faisaient davantage de victimes et de personnes déplacées. Autant les prières montaient, autant les hommes sans foi ni loi faisaient la loi sévissaient, comme si Dieu était sourd aux sollicitations de ses enfants. Les Burkinabè avaient peut-être oublié ce précieux enseignement de l’adage «aide-toi et le ciel t’aidera». Maintenant que les prières accompagnent «la montée en puissance» de nos vaillantes Forces de défense et de sécurité (FDS) et de leurs supplétifs, les Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), elles devraient produire plus d’effets pour anéantir les forces du mal. Cependant, ce serait illusoire, voire suicidaire de mettre toutes les forces dans la prière et dégarnir le front ou négliger le fait que l’ennemi commun c’est bien ce terrorisme qui met à mal la cohésion nationale en dynamitant le tissu social, retournant des Burkinabè contre des Burkinabè.

Au Sénégal, c’est tout autre chose qui a amené les fidèles catholiques de la Casamance dans les églises où ils ont prié pour la paix ce week-end. En effet, le pays se trouve à la veille d’une nouvelle convocation de l’opposant Ousmane Sonko par la justice. Dans l’affaire dite «Adji Sarr» du nom de l’ex employée d’un salon de massage qui accuse le maire de Ziguinchor de viols répétés et de menaces de mort, toutes les présentations de celui-ci aux palais de justice de Dakar ont provoqué des émeutes meurtrières, dans un Sénégal pré-électoral en ébullition. La plus grande coalition de l’opposition, Yewwi Askan Wi, considérant que c’est une cabale politique qui est ourdie contre son leader en course pour la présidentielle sénégalaise de février 2024, ne décolère pas contre le pouvoir en place qu’elle pointe du doigt comme instrumentalisant la justice pour écarter les opposants qui visent le fauteuil de Macky Sall et permettre à ce dernier d’aller chercher un 3e mandat. Pourquoi donc aller chercher la paix dans les églises alors que les ennemis de cette paix qui est devenue une denrée rare sont connus?

Au Sénégal, comme en République démocratique du Congo (RDC), où les religieux s’impliquent dans la quête de la paix, ce sont encore les hommes politiques qui sont à l’origine de la constante détérioration du climat social. N’est-ce pas paradoxal d’aller prier pour la paix dans les églises et les mosquées sénégalaises? Pourtant, tous savent que cette paix est mise à rude épreuve pour des intérêts individuels et très égoïstes de politiciens, l’un se cachant derrière son statut d’opposant pour échapper à la justice en la défiant et d’autres profitant de leur pouvoir pour mettre des adversaires hors-jeu. Il est temps de ramener chacun face à ses responsabilités et que force reste à la loi qui réprime les viols et à la constitution qui interdit le 3e mandat! Et la paix reviendra!

Par Wakat Séra