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Gabon: un mois d’état de grâce pour le général Oligui, et après?

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Un mois du général Brice Clotaire Oligui Nguema à la tête du Gabon

Arrivé par effraction au pouvoir le 30 août 2023, alors que les résultats de la présidentielle venaient d’être traficotés comme à l’accoutumée pour perpétuer la dynastie des Bongo Ondimba au Gabon, le nouveau locataire du Palais de bord de mer a été salué comme un messie. Ainsi en est-il toujours pour les putschistes, dans les pays où le long règne s’installe et empêche alternance et alternative. Du coup, le peuple qui ne savait plus à quel sauveur se vouer, et surtout l’opposition privée de tout moyen de conquête du pouvoir, avaient applaudi à tout rompre le putsch militaire au Gabon.

Ainsi, un état de grâce de fait a été accordé au nouveau président de transition, le général Brice Clotaire Oligui Nguema, qui, n’en demandant pas mieux, a prêté serment dans la foulée, plus précisément le 4 septembre, sur une charte de la transition, accomplissant ainsi la deuxième étape de la nouvelle mode de prise du pouvoir par les armes. Et en dehors du Professeur Albert Ondo Ossa, champion d’Alternance 2023, la coalition de l’opposition qui continuait de revendiquer sa victoire contre le président désormais déchu, Ali Bongo Ondimba, tout le Gabon venait d’accueillir avec enthousiasme un coup d’Etat. Même ceux qui étaient persuadés que ce coup de force perpétré par l’ancien aide de camp du père et patron de la garde républicaine du fils, avait un air de révolution de palais, pour que le clan des Bongo puisse se maintenir en vie.

Un mois après cet épisode, heureux ou malheureux dans l’histoire du Gabon, c’est selon, le général Oligui a, humblement rencontré toutes les forces vives, sans distinction, allant jusqu’à se rendre à la résidence de son plus grand pourfendeur de l’heure, le candidat rendu malheureux par les urnes, mais qui exigeait le renversement des résultats de l’élection présidentielle du 26 août qu’il croit dur comme fer, avoir remportée. Très vite, le président par intérim, bien qu’ayant été de ceux qui ont bénéficié, et largement, des privilèges du pouvoir qu’il a renversé, a ouvert la chasse contre ceux qui ont transformé la caisse de l’état en banque familiale. Résultat des courses, une bonne partie du colossal pactole détourné a été récupéré dans des résidences privées ou ailleurs. A en croire des images virales sur les réseaux sociaux, c’est beaucoup d’argent qui a été retrouvé chez certains anciens bonzes du régime.

L’opération «dignité» de lutte contre la corruption a fait bien des dégâts dans le microcosme des «intouchables» d’avant. L’ex-première dame Sylvia Bongo, son fils Nourredin Valentin Bongo et bien des personnes de leur entourage, sont dans la nasse qui n’a peut-être pas fini de se remplir. Mais, le général Brice Oligui Nguema ne joue pas qu’au «recouvreur» de service. Il a ouvert et concrétisé déjà bien des chantiers, si l’on en croit la source officielle, comme le déblocage de plus de 1 000 postes budgétaires pour des enseignants en attente de solde depuis des années, la gratuité des frais de scolarité dans les écoles publiques et confessionnelles, la gratuité des manuels scolaires, le rétablissement des bourses pour le secondaire. Ce sont autant de besoins vitaux de populations longtemps maintenues dans la misère malgré les richesses nationales, qui ont été comblées, par le gouvernement de transition, en attendant la révision des textes sur le foncier et sur l’acquisition de la nationalité, etc.

Si le retour aux affaires de bien d’anciens caciques fait polémique, on ne saurait occulter la mise au repos de la «dame de fer», Marie Madeleine Mborantsuo après le coup d’Etat. «M3» qui a été présidente de la cour constitutionnelle gabonaise pendant plus de trois décennies, après avoir servi le père, avec qui elle a eu deux enfants, et le fils, était pratiquement la figure tutélaire officielle du règne cinquantenaire, 56 ans plus précisément, des Bongo. En plus de nominations qui, à raison, ne font pas l’unanimité, les attentes du peuple gabonais sont aussi longues à égrener qu’un chapelet. Certes, elles ne peuvent être toutes satisfaites en un mois. Mais le général Oligui, est très attendu sur la charte de la transition, la durée de la transition, la conférence nationale en vue qui se penchera probablement sur l’éligibilité ou non du président et des autres acteurs de la transition pour des élections ouvertes qui devraient mettre fin à l’Etat d’exception.

Pour le moment, le général est encore «à vos ordres», face à son homologue congolais Denis Sassou-Nguesso, qu’il a rencontré récemment dans sa tournée sous régionale qui l’a conduit chez ses voisins équato-guinéen, congolais et centrafricain.

Par Wakat Séra