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Justice militaire burkinabè: des pièces « prouvant » la thèse de complot soulevée par Madi Ouédraogo

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Façade du bâtiment de la justice militaire à Ouagadougou

Les avocats de la défense des militaires de l’ex-garde de sécurité présidentielle burkinabè accusés de fomenter un plan d’attaque de la Maison d’arrêt et de correction des armées (Maca), ont fourni mardi 17 janvier 2017, au tribunal, « trois catégories de pièces prouvant » la thèse de complot soulevée par le caporal Madi Ouédraogo, un des prévenus, selon Me Christophe Birba.

Thèse de complot soulevée par Madi Ouédraogo « prouvée »

« Pour nous le tribunal doit être maintenant courageux, parce que nous savons que c’est un dossier qui est au cœur de l’Etat certes, mais chacun doit respecter son serment en acceptant de constater au moins la vérité. Nous avons suffisamment prouvé que le complot que Madi Ouédraogo évoquait au moment de sa déposition n’est pas surtout du théâtre comme certains l’ont prétendu. Nous avons prouvé que ce général (Zida) avait bel et bien des raisons pour leur en vouloir, en produisant trois catégories de pièces au dossier après que le tribunal ait refusé d’entendre les deux généraux (Pingrenoma Zagré et Gilbert Diendéré) dans le cadre de ce dossier ».

Des photos qui prouvent les dires du caporal Ouédraogo

« La première catégorie de pièces, c’est des prises de vue. Lorsque ceux que Madi Ouédraogo évoquait, avaient été pris et emprisonnés, les armes qui ont été retrouvées avec eux, les véhicules civils avec les numéros d’immatriculation très apparents, les stupéfiants, les munitions, tout avait été photographié. Les photos sont disponibles, nous les avons mises à la disposition du tribunal. Ça c’est une première catégorie de pièces pour lui (parquet) dire que nous ne sommes pas des menteurs ».

Des échanges de courriers comme preuves

« La deuxième catégorie de pièces c’est des échanges de courriers. Me Alidou Ouédraogo avait écrit au chef de corps (du RSP) qu’il avait été saisi par les parents de ceux qui sont détenus et qu’il souhaitait leur libération parce que pour lui, c’était une détention arbitraire. Le chef de corps a clairement répondu que ce n’est pas du tout une détention arbitraire. Il a précisé dans son courrier qu’ils étaient arrêtés dans le cadre de la « planification d’activité subversive ». C’est un langage militaire que je ne peux pas comprendre tout de suite et maintenant. L’activité subversive c’est quoi? »

Brouillon du chef de corps de l’ex-RSP

« Nous avons pu mettre la main sur un brouillon du chef de corps. Dans le brouillon, il a identifié deux personnes où il a mis en face que ces gens là n’ont pas été détenus dans le cadre du projet d’assassinat des officiers. Ce qui veut dire que les autres sont détenus dans le cadre d’un projet d’assassinat des officiers. Ce qui confirme que lorsque Madi Ouédraogo dit qu’on lui avait confié la mission d’éliminer les généraux (Diendéré et Bassolé) et que quand lui (Madi Ouédraogo) a refusé, d’autres sont allés conclure le marché avec celui qui l’avait envoyé, nous, ça nous convainc qu’il ne ment pas au regard de ces courriers ».

Une vidéo « parlante »

« La dernière catégorie de pièces est plus parlante. C’est un enregistrement vidéo de la rencontre qui s’est tenue le 7 juillet 2015 dans la salle polyvalente à Ouaga 2000. Cette rencontre a été présidée de la droite vers la gauche par le chef de corps du RSP, le général Gilbert Diendéré, le général Pingrenoma Zagré, le colonel Kaboré chef d’état-major de l’armée de terre et le colonel Kéré. Au cours de cette rencontre le projet a été complètement expliqué au chef d’état-major général des armées. Pour nous, quand Madi dit que la hiérarchie militaire était informée de cela et que nous avons pu mettre la main sur l’enregistrement vidéo qui nous dit qu’effectivement il y a eu compte rendu, que dans cet enregistrement le chef d’état-major dit qu’il en prend bonne note, il ne ment pas ».

Le tribunal militaire « n’a pas à requalifier » les faits « en complot »

« Nous avons demandé au tribunal d’avoir le courage d’explorer la piste du complot. Quand on combine cette piste de complot aux éléments fragiles qui sont contenus dans le dossier, parce que quand un tribunal tente une requalification maladroite, ça veut dire qu’il est mal à l’aise. Combiner tout ça à l’instruction du dossier où vous avez des armes qui apparaissent et d’autres qui disparaissent, vous avez des munitions qu’on ne retrouve pas, des déclarations contenues dans les procès verbaux que les accusés ne reconnaissent pas. Vraiment il y a quelque chose qui ne va pas et pour nous il n’y a même pas de doute. Quand on revient même en droit, vous comprendrez que le tribunal militaire n’a pas à requalifier (les faits d’association de malfaiteurs et de détention illégale d’armes) en complot militaire. Nous avons produit à son dossier la décision du tribunal spécial de Liban et la décision du tribunal militaire de Congo que le parquet avait évoqué dans ces réquisitions mais qu’il s’est abstenu de produire au dossier au tribunal. Nous l’avons retrouvé et produit au dossier. Il apparaît clairement dans ces décisions qu’il n’y a pas de complot en temps de paix. Le complot s’envisage toujours dans les relations avec l’ennemi. Pour le cas du Congo, ils étaient en rébellion. Mais au moment où on arrêtait les Madi Ouédraogo, le Burkina n’était pas en guerre, ni en rébellion. Il n’est pas possible même de requalifier en complot militaire, parce que le complot ne peut s’envisager en temps de paix. Même si le tribunal passait outre pour requalifier en complot militaire, le complot militaire n’existe pas. L’article 190 est très clair : il faut une résolution concertée et arrêtée d’agir. Dans le cadre de ce dossier la résolution a consisté à quoi ? S’il a existé une seule résolution, c’est la résolution de se disperser ».

Mohamed ZOUNGRANA