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La Libye, l’esclave Noir et le siècle présent

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L’esclavage en Libye a l’air de déjà-vu. C’est un fait historique qui remonte à la nuit des temps. Il a émergé avec la Révolution agricole quand l’homme commença à lier exploitation de la terre et richesse. Il a traversé les siècles, jusqu’à nos jours. La Lybie aujourd’hui n’est que la partie visible de l’iceberg. C’est l’histoire éternelle du faible face au puissant. Elle a plusieurs facettes.

Françoise Giroud, personnalité majeure de la presse française, disait que « le monde est socialement divisé en deux parties ; d’un côté, les puissants, de l’autre les pauvres, les faibles ». Cette réflexion, qui a force d’aphorisme, reflète non seulement la situation qui prévaut, en surface, en Libye, mais également celle qui persiste, en sourdine, partout au monde.

En Libye, l’esclave, c’est ce pauvre sub-saharien, Noir, famélique, qui cherche la route pour gagner la « portion congrue » en Occident. Le puissant, c’est ce Lybien, Arabe, qui l’exploite jusqu’à le chosifier et le vendre comme marchandise. Emerge, déjà, la notion de racisme.

Telle est l’une des réalités socio-économiques principales, qui a connu son apogée pendant quatre siècles de plomb pour le continent noir, du XVIe au XIVe siècle. Celle-ci ne continue pas moins de structurer nos sociétés actuelles. Si le mode d’emploi a changé de visage sur la route de « l’esclavage de masse », les éléments constitutifs du phénomène restent quasiment les mêmes : le puissant, le faible, le mercantilisme et l’intermédiaire.

Jadis, des convois maritimes entiers sillonnaient les mers, à la recherche de l’esclave Noir, pour la culture de la canne à sucre, du tabac ou du coton dans le Nouveau Monde. Aujourd’hui, la donne a changé : c’est ce dernier qui, de son propre gré, cherche la route de l’Occident pour une destinée pas du tout brillante. De fait, le capitaliste inassouvi de l’époque de la Révolution agricole et celui qui brasse les affaires, aujourd’hui, sont les deux faces d’une même pièce.

Reste l’intermédiaire. Il y avait, en ces temps d’esclavagisme, le chef coutumier et l’Arabe. Comme le capitaliste, le chef coutumier est resté en place. C’est, aujourd’hui, le chef d’Etat africain, obnubilé par l’intérêt personnel. Hier, il livrait ses sujets contre une obole (des vêtements) ; aujourd’hui, il les noie dans la misère et les pousse vers le puissant. Quant au second, l’Arabe, en Lybie, il ne joue plus le rôle d’intermédiaire ; c’est un larron, qui a pris opportunément la place du puissant.

Voilà la genèse de la résurgence sur l’esclavage pur et dur en Lybie. On y trouve, comme toujours, les deux mamelles qui le nourrissent : l’intérêt et le racisme.

Qu’en conclure ?  Deux aspects à retenir.

Dans l’absolu, les temps n’ont pas modifié grand-chose dans les rapports entre le puissant et le faible. L’esclavage, sous d’autres formes, « modernes », demeure vivace partout au monde. Sa fin est difficile à prévoir, puisqu’il est assis sur des stéréotypes. Qui sont « autant difficiles à briser qu’un atome », d’après la célèbre formule d’Albert Einstein.

Enfin, l’Afrique n’attend pas de Macron cette panacée, mais plutôt un juste équilibre des rapports entre la France et le continent. Il permettra à l’Africain de recevoir plus que la « portion congrue » chez lui. Ainsi donc, il n’y aura plus ni de Lybie esclavagiste, ni d’immigration débridée, ni de querelles de chapelle entre les uns et les autres.

Par Jean-Jules Lema Landu, journaliste congolais, réfugié en France.