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L’Afrique a mal à son Mali, le Mali a mal à sa junte!

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Le Premier ministre par intérim du Mali, le colonel Abdoulaye Maïga

Il a osé! Oui le Premier ministre par intérim du Mali a réalisé la prouesse de profiter de la tribune des Nations Unies pour désunir davantage son pays de ses voisins, foulant aux pieds les fondamentaux du langage diplomatique et les principes non écrits, mais sacrés de ce droit d’aînesse si respecté en Afrique. Mais pouvait-on attendre mieux de militaires qui ont déserté le front où se trouve leur place réelle pour envahir la scène politique canons en l’air? La réponse est non! A la limite, on leur en voudra juste d’oublier qu’ils sont des putschistes, pardon double-putschistes! Et de ce fait, les maîtres en kaki de Bamako, ne sauraient agir comme s’ils détenaient un quelconque mandat d’un peuple malien dont le sens du bon voisinage et de la fraternité a toujours séduit, notamment par le biais du légendaire «diatiguiya», ce concept qui rend les relations si cordiales et conviviales entre les différents peuples qui ont toujours commercé en bonne intelligence avec leurs «frères» maliens.

En cela, le show inédit mené, deux jours avant la clôture de la 77è Assemblée générale de l’Onu, par le colonel Abdoulaye Maïga qui assure l’intérim d’un autre Maïga, Choguel pour ne pas le nommer, est vraiment historique et surtout honteux pour un continent africain qui regorge de militaires au discours plus subtile. Un certain Thomas Sankara en était maître, lui qui savait décocher des flèches sans verser dans les insultes triviales, évitant habilement, le piège de l’émotion et de la surenchère, qui, malheureusement, constituent la marque déposée d’une junte militaire malienne aux abois. Toutes les occasions sont bonnes pour les putschistes au pouvoir à Bamako, comme la prise en otage de 49 militaires ivoiriens, dont 46 sont encore entre leurs mains, de faire croire à l’opinion que ce sont eux qui dictent leur volonté. Pourtant, il n’en n’est rien! Car dénoncer un maître pour devenir l’esclave d’un autre, suivez mon regard, n’est point l’idéal derrière lequel court le peuple malien muselé et noyé par une propagande sans limite des autorités de la transition qui font monter les Forces armées maliennes en puissance, pendant que les terroristes font la loi sur le terrain.

Du Nigérien Mohamed Bazoum, vu comme un «étranger qui se réclame du Niger», au Bissau-Guinéen Umaro Sissoco Embalo, traité sans ménagement, en passant par l’ivoirien Alassane Ouattara, à qui a été rappelé la parenthèse toujours ouverte du 3è mandat, il y sont tous passés. Cette intolérance notoire dont font preuve les putschistes n’est-elle pas le véritable obstacle à cette paix que les Maliens recherchent en vain? La volonté manifeste d’ostraciser les Touaregs et les Arabes, chose que le Niger a visiblement réussi à éviter, ne peut favoriser l’installation de cette cohésion nationale appelée de tous leurs vœux par les populations qui souffrent le plus des attaques terroristes et des conflits intercommunautaires dont se nourrissent les groupes djihadistes et autres hommes armés non identifiés. Il urge que la junte revienne à de meilleurs sentiments, elle qui montre de plus en plus ses intentions de se maintenir au pouvoir en usant et abusant de subterfuges et surfant sur une souveraineté de mauvais aloi. Du reste, les putschistes de Kati qui ont ouvert plusieurs fronts contre eux-mêmes sont de plus en plus pris à partie par leurs propres concitoyens, eux qui ne demandent qu’à vivre et faire prospérer leurs affaires en toute quiétude.

Pourquoi donc, sous le prétexte fallacieux de contraintes calendaires, la junte s’oppose au séjour de la mission de haut niveau composée du Ghanéen, Nana Akufo-Addo, du Sénégalais Macky Sall et du Togolais Faure Gnassingbé, le médiateur qu’elle s’est elle-même choisi et qui doit bien se demander dans quelle galère il est allé se mettre? Les ravisseurs des soldats ivoiriens agissent-ils toujours au nom de cette souveraineté éculée? Le colonel Assimi Goïta et ses hommes se sont-ils rendu compte que la rançon qu’ils ont demandée, notamment les têtes de dignitaires de l’ancien régime, en l’occurrence Boubou Cissé, Karim Keïta et Hubert Tiéman Coulibaly, pour libérer, en contrepartie, leurs otages n’a pas de chance d’être payée? Où alors, les putschistes, sachant que tôt ou tard et d’une manière ou de l’autre, ils seront obligés de rendre leurs otages à la Côte d’Ivoire, veulent-ils faire croire qu’ils sont encore maîtres du jeu?

En tout cas, la junte militaire malienne qui s’enferme dans une logique constante de guerre déclarée à ses voisins, pourrait bien verrouiller autour d’elle toutes portes et fenêtres, même les issues de secours.

Par Wakat Séra