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Madagascar: la présidentielle forcée!

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Les Malgaches doivent choisir leur nouveau président

«J’espère que le futur président m’aidera à payer la scolarité de mes enfants» ou encore «j’espère que le prochain président va ramener la sécurité». A Madagascar où 11 millions d’électeurs sont appelés aux urnes, ce jeudi, pour désigner leur nouveau président de la république, tout se résume à l’espoir. L’éducation, la santé, l’agriculture, les infrastructures, l’environnement, etc., en somme tous les secteurs vitaux en sont réduits à se reposer sur des projets, qui ne sont, en réalité que de véritables éléphants blancs.

Ce qui a, d’ailleurs, conduit les détracteurs de Andry Rajoelina et ses opposants à faire porter à celui-ci la peu enviée casquette de «maître en poses de première pierre, en effet d’annonces et de promesses populistes impossibles à réaliser et surtout non prioritaires». Une kyrielle de reproches qui seraient sans objet, si le président sortant ne s’était aligné dans les starting-blocks pour la course à sa propre succession.

Ce jeudi, avec une capitale, Antananarivo sous couvre-feu, la Grande Ile vivra une journée d’élection bien singulière. En effet, le taux de participation de ce scrutin, sera…scruté avec la plus grande attention. La raison toute simple n’en n’est pas moins préoccupante. Las d’avoir demandé en vain la suspension de cette élection qu’ils qualifient de machination pour permettre à Andry Rajoelina de conserver les clés du palais présidentiel, 10, excusez du peu, des 13 candidats en compétition ont demandé à leurs concitoyens d’activer le mode boycott du vote.

Si cette politique de désistement est loin de l’abdication car évitant aux frondeurs d’être complices de la parodie d’une élection contestée avant même sa tenue, elle permettra, malheureusement, au président sortant d’emprunter, en roue libre le boulevard de la victoire. Mais s’il est dit que «les absents ont tort», et ça sera une leçon pour les opposants, il est également indéniable, et Andry Rajoelina le sais bien, qu’«à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire». Cette victoire dont il est déjà certain et la crie à toutes les tribunes, devrait avoir un goût bien amer pour Andry Rajoelina qui demeure sourd à tous les appels à suspendre ce processus électoral hautement conflictogène.

Même la voix très autorisée, mais ne faisant pas autorité, de la présidente de l’Assemblée nationale, qualifiée de «farfelue» par les courtisans du président malgache sortant, n’y fit rien. Comme la soixantaine d’organisations de la société civile et syndicats qui ont demandé l’annulation du premier tour pour prévenir «une crise encore plus dure et même violente», dame Christine Razanamahasoa, a relevé que «les conditions pour une élection apaisée, crédible et acceptée de tous ne sont pas réunies». Cela ne fait donc l’ombre du moindre doute, les résultats seront autant rejetés que l’élection l’est, par tous ces gros crocodiles de la mare politique malgache.

Et les démons de la violence rôdant toujours autour des urnes en Afrique, l’explosion de la marmite qui bouillonne depuis lors risque d’être inévitable. Du reste, les ingrédients de cette éruption volcanique sont réunis, sous la forme du mécontentement du peuple qui n’a vu aucune réalisation des promesses du premier mandat de Andry Rajoelina, la polémique autour de sa double nationalité franco-malgache, les blessés et les arrestations lors des manifestations de rue, la morgue du président candidat à l’endroit de ses interlocuteurs, etc.

Quelle issue pour cette élection au forceps, alors que le bilan de Andry Rajoelina venu au pouvoir à la suite d’une mutinerie en 2009, avant de s’offrir une virginité par les urnes en 2018, est fortement mis en cause par ses concitoyens?   Coupures d’eau et d’électricité entraînant des délestages monstres, impossible autosuffisance alimentaire et industrialisation du pays, persistance de la corruption, et bien d’autres maux, ont rendu encore plus dures, les conditions de vie des Malgaches dont la grande majorité vit toujours sous le seuil de la pauvreté. La fameuse communauté internationale qui est restée muette comme une carpe devant l’évolution inquiétante de la situation, a sans doute, déjà réactualisé ses condamnations sans action, pour demander le retour au calme et à l’entente entre les protagonistes de cette crise préélectorale qui muera probablement en crise postélectorale si rien n’est fait.

Il faut négocier avant qu’il ne soit trop tard!

Par Wakat Séra