Accueil A la une Mali: 3 jours de tractations, 3 sauts de puce

Mali: 3 jours de tractations, 3 sauts de puce

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Le médiateur de la CEDEA, Goodluck Jonathant au micro (Ph. d'archives)

La visite de la mission de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) à Ibrahim Boubacar Keïta. La libération, en principe imminente de IBK. La discussion sur la «sécurisation» des autres personnes retenues par la junte et sur la mise en place d’une transition. Ce sont; les trois points essentiels, sur lesquels la junte militaire et la CEDEAO ont, pour l’instant planchés, avec plus ou moins de succès, avant la réunion au sommet prévue par la CEDEAO, en principe pour ce mercredi 26 août.

Un week-end de tractations intenses, couronnés de progrès, selon les acteurs. L’après Ibrahim Boubacar Keïta est en marche, le désormais ancien chef de l’Etat malien ayant lui-même démissionné de son poste. L’ancien président malien sera donc libéré, à en croire la junte et pourrait envisager des soins à l’extérieur, pour améliorer sa santé fragile. Finalement, tout semble aller pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles, sauf que les médiateurs de la CEDEAO et les nouveaux hommes forts de Bamako, ne s’entendent pas sur la durée de la transition, encore moins sur celui qui la dirigera et la composition de l’équipe qui la portera.

Si la junte affirme que rien n’a été décidé pour l’instant, la CEDEAO, elle, est formellement contre la durée de trois ou deux ans, proposée par les militaires de Kati, et marque sa préférence pour que cette période transitoire soit dirigée par un civil, ou tout au moins un militaire à la retraite. L’ouverture d’esprit des uns et des autres est remarquable et, du reste, salutaire pour ce tournant délicat, dans la nouvelle vie politique qui s’ouvre au Mali, et il faudra le négocier avec la plus grande attention pour éviter de bâtir le nouvel édifice, sur du sable mouvant.

Donc, au Mali, il faut aller vite et bien. Vite selon la CEDEAO qui milite pour un retour rapide du pouvoir aux civils, et bien, pour le peuple malien qui espère sortir enfin de ce cycle de prises de pouvoir par la force dont le pays est devenu coutumier. Cette transition sera déterminante, car, d’elle dépendra la suite d’un processus qui devrait redonner au Mali des couleurs démocratiques, mais surtout des dirigeants, guidés par le seul intérêt du peuple. Un peuple dont les attentes sont énormes. Tout est prioritaire au Mali, à commencer par la relance de l’économie. Ensuite la sécurité et la défense du territoire, qui appellent des stratégies de lutte plus affinées contre le terrorisme, stratégies qui passent par une armée mieux équipée, car actuellement dépassée aujourd’hui par la puissance de feu de l’ennemi. Le moral de la troupe doit être remontée et les questions vitales de salaires, primes et autres avantages, qui n’arrivaient pas à leurs destinataires, réglées.

La santé, l’éducation, et le respect des droits humains et des minorités, pour un retour de la cohésion sociale, sont également des secteurs névralgiques à prendre à bras-le-corps. Mais de la mise en branle de cette machine dépendra la réussite de cette transition sur laquelle achoppent les deux parties en discussion. De toute façon, au lieu de s’en alarmer, il faut plutôt comprendre qu’en matière de négociation, chaque partie essaie de conforter ses positions afin d’avoir quelque chose à concéder. Les fameux compromis!

Les Maliens sont donc suspendus à l’accord sur cette nouvelle transition malienne, après celle de 2012 assurée par le président, Dioncounda Traoré, l’homme à l’écharpe blanche, dont l’intérim n’a pas été un fleuve tranquille, avec l’épisode de l’attaque menée contre lui, jusque dans ses bureaux par une foule en colère et diverses pressions de la junte de l’époque, dirigée par le capitaine Amadou Haya Sanogo. Du reste, les transitions politiques en Afrique de l’ouest ont rarement été conduites sans accroc, souvent à cause des agendas cachés des politiciens. Mais il faut déjà qu’un modus vivendi soit trouvé au plus vite entre la CEDEAO et la junte qui, depuis son QG de Kati, le nouveau cœur du pouvoir malien, ne manque pas de demander, pour le bien du peuple, la suppression des sanctions prises par l’organisation sous-régionale. C’est clair, le jeu sera serré!

Par Wakat Séra