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Marissa Scott: «La lutte contre le terrorisme n’est pas que l’affaire des Etats-Unis»

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La Directrice du Hub Régional pour l’Afrique du Département d’Etat, Marissa Scott

Forte de 82 membres, soit 77 nations et cinq organisations internationales, la Coalition mondiale contre Daech, créée en 2014, poursuit inlassablement sa lutte contre la nébuleuse terroriste. Et pendant qu’elle continue ses actions dans le reste du monde, la Coalition renforce également ses positions en Afrique où elle mène une guerre sans merci contre l’Etat islamique, l’autre appellation de Daech. Dans cet entretien qu’elle a bien voulu nous accorder par téléphone depuis les Etats-Unis, le jeudi 18 juin 2020, Marissa Scott, la Directrice du Hub Régional pour l’Afrique du Département d’Etat, évoque les acquis de la Coalition, dont l’élimination de Abu Bakr alBaghdadi, l’ancien chef du groupe de l’État islamique (EI), le 27 octobre 2019 et d’autres chefs terroristes et son apport conséquent dans la lutte contre la Covid-19. En tout cas, pour l’Américaine, loin d’être l’apanage des seuls Etats-Unis, la lutte contre le terrorisme est l’affaire de tout le monde, car «la menace mondiale appelle une réponse mondiale».  

Wakat Séra: Que représente aujourd’hui la coalition mondiale contre Daech?

Marissa Scott (Directrice du Hub Régional pour l’Afrique du Département d’Etat): Depuis sa création en 2014, la Coalition mondiale contre Daech reste unie dans sa détermination pour la destruction de Daech.  Grâce à nos actions diplomatiques, la Coalition a continué son développement et compte aujourd’hui 82 membres, soit 77 nations et cinq organisations internationales.

De quel bilan peut s’enorgueillir la Coalition?

La Coalition a beaucoup d’acquis importants. Je peux évoquer l’élimination de Abu Bakr al-Baghdadi, l’ancien chef du groupe de l’État islamique (EI) en octobre 2019 et de nombreux dirigeants de Daech sur le champ de bataille. Il y a aussi la destruction à 100% de khalifats frauduleux de Daech, la fourniture d’une aide de plus de 20 millions de dollars US, pour la stabilisation et l’élimination des restes d’explosifs de guerre, sans oublier le soutien économique et des besoins humanitaires, y compris l’aide contre la Covid-19 en Irak et en Syrie, tout ceci, pour se prémunir contre la résurgence de Daech. Il y a également la libération de plus de 100 mille km2 et de près de 8 millions de personnes qui étaient sous le joug de Daech. Il faut dire que depuis 2017, la Coalition s’est élargie à 92 membres avec l’arrivée de 13 nouveaux membres.

Quelle est la quintessence de la dernière réunion de la Coalition?

Les ministres des Affaires étrangères de la Coalition se sont réunis virtuellement le 15 juin dernier pour examiner les activités récentes de Daech et les prochaines étapes de notre action pour continuer dans le sens de vaincre pour de bon Daech. Les ministres ont discuté sur les moyens à mettre en œuvre pour maintenir la pression sur les vestiges de Daech en Irak et en Syrie et pour renforcer l’approche de la Coalition pour freiner les ambitions mondiales de Daech.

Pensez-vous que la Coalition a débarrassé totalement la Syrie et l’Irak de Daech?

Non! Non! Pas du tout! Mais il faut reconnaître l’importance de l’existence de la Coalition et du travail d’envergure qu’elle mène sur le terrain. Car, face à une menace de portée mondiale, il faut une réponse mondiale. C’est la raison d’être de la Coalition qui lutte pour détruire Daech et tout ce qui en reste.

Comment fonctionne la Coalition, pour être efficace et éviter des velléités de leadership de certains Etats?

La Coalition fonctionne avec des groupes qui travaillent dans les zones d’élimination de Daech. Nous avons ainsi cinq groupes qui sont celui chargé des combattants terroristes étrangers, celui de financement de la lutte contre le terrorisme, celui de la stabilisation, de l’échange de renseignements et celui en charge des aspects politiques et militaires de la campagne. Il y a des comités qui se réunissent au cours de l’année pour discuter de tous les volets susmentionnés et sur l’état de la lutte contre Daech.

Existe-t-il des passerelles de collaboration entre la Coalition et d’autres organisations de lutte contre Daech?

Chacun des 82 membres a des relations avec des organisations de développement et qui luttent contre la Covid-19. Dans chaque pays, il y a également une coalition qui œuvre pour le développement, mais également pour combattre Daech. La Coalition reste concentrée sur la lutte pour vaincre définitivement Daech. Ce qui est essentiel au regard de la sécurité nationale des Etats-Unis et de celle de nos partenaires et de nos alliés.

En Afrique, que fait concrètement la Coalition pour combattre Daech qui essaime de plus en plus sur le continent noir, notamment dans sa partie subsaharienne?

Lors de la réunion du 4 juin, les ministres des Affaires étrangères se sont penchés davantage sur la question, en évoquant la propagation des messages de Daech partout dans le monde et bien évidemment en Afrique. La Coalition travaille en étroite intelligence avec les Etats et les organisations sous-régionales comme la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) et régionales comme l’Union africaine.

La bataille est rude entre Daech et Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) pour le contrôle de l’Afrique. Quelle est la conséquence de cette guerre entre «frères terroristes» sur la lutte engagée par la Coalition contre Daech?

Ça complique les choses. La Coalition a déjà mobilisé plus de 20 milliards de dollars US pour la stabilisation, l’élimination des restes explosifs de guerre, le soutien économique et les besoins humanitaires. Pour le continent africain, nous devons travailler beaucoup plus avec les Etats. Ce qui n’est pas du tout facile actuellement avec la survenue de la Covid-19 qui empêche la tenue des réunions et les voyages. L’idée, c’est d’examiner les activités récentes et préparer les prochaines étapes. Les ministres des Affaires étrangères des pays de la Coalition mondiale contre Daech se sont réunis virtuellement le 4 juin pour examiner les activités récentes de Daech et les prochaines étapes de notre campagne pour parvenir à vaincre durablement Daech. Les ministres ont discuté des moyens de maintenir la pression sur les vestiges de Daech en Iraq et en Syrie, et de renforcer notre approche collective pour défaire les ambitions mondiales de Daech.  La Coalition mondiale a construit un réseau pour vaincre Daech. Nous continuons d’adapter et de renforcer nos actions pour réfréner les ambitions mondiales de Daech, et notamment sa capacité à mener des attaques terroristes, à diffuser sa propagande toxique, à financer ses opérations, à recruter des partisans et à développer de nouveaux refuges.

La lutte sera certainement plus difficile en Afrique avec la porosité des frontières, non?

En plus de cette porosité, avec la Covid-19, la lutte sera encore plus difficile. Une chose est certaine, la Coalition travaillera de concert avec toutes les autres organisations de lutte contre le terrorisme. La Coalition essaie de lutter en même temps contre Daech et de mettre en place un soutien humanitaire et des actions de développement. En tout cas, et surtout en Afrique, il y a beaucoup de travail à faire.

Au vu de l’ampleur de la tâche, il faut donc une union des forces pour arriver à bout du terrorisme!

Oui, la lutte contre Daech, ce n’est pas seulement l’affaire des Etats-Unis. La menace mondiale appelle une réponse mondiale. C’est toute la communauté internationale qui doit réagir contre la menace de Daech. C’est le constat que vous ferez bientôt sur le terrain. Nous organisons ensemble une réponse collective consistante contre Daech.

Il faudra certainement associer des actions de développement à la réponse militaire!

Oui bien sûr ! Et nous mettons également un accent important sur la diplomatie.

Propos recueillis par Morin YAMONGBE (Avec l’assistance technique de l’Ambassade des Etats-Unis au Burkina)