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Niger: dialogue de sourds et surenchère sur les bords du fleuve!

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Image d'archive sur les manifestations au Niger en vue de soutenir les putschistes

Qui veut le dialogue prépare la guerre! Ainsi se résume la situation au Niger, où les invités à s’asseoir sous le légendaire arbre à palabres africain sont débités à toutes les tribunes, même à celle de la junte! Le dernier appel d’envergure en date est bien celui du souverain pontife, le Pape François qui a exhorté, ce dimanche, les différentes parties à œuvrer dans le sens d’une résolution pacifique de la crise issue du coup d’état du 26 juillet au Niger.

Mais de quel dialogue parle-t-on? Certainement pas de celui qui est prôné par des personnes et des personnalités de bonne foi, mais, sans aucun doute, de celui de sourds, artistiquement entretenu par la junte militaire qui est déterminée à pousser des racines au palais présidentiel, en commençant par la convocation, dans un délai de 30 jours, d’un «dialogue national inclusif» et une transition «qui ne saurait aller au-delà de trois ans». Plus qu’une simple annonce, comme celles auxquelles l’infatigable porte-parole des putschistes a habitué les téléspectateurs nigériens et les habitués des réseaux sociaux, cette décision du chef de la junte militaire a dû être une véritable douche froide pour les pacifistes et autres médiateurs de tous bords qui affluent ou s’annoncent sur les bords du fleuve Niger.

D’habitude, c’est la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) qui exige une transition rapide et fixe le calendrier du retour à l’ordre constitutionnel. Mais cette fois-ci, ce sont les putschistes de Niamey qui prennent les devants, alors que le Nigérian Bola Ahmed Tinubu, par ailleurs président en exercice de la CEDEAO, croit encore aux vertus de la négociation, mais mobilise parallèlement ses troupes, dans l’optique de la libération de Mohamed Bazoum et sa réinstallation manu militari, dans ses fonctions de président démocratiquement élu du Niger. Les chefs d’état-major de l’institution sous-régionale, qui venaient à peine de se dire au revoir dans la capitale ghanéenne où ils ont affiné les réflexions sur une «mission de soutien à la stabilisation» au Niger, doivent se demander s’ils n’ont pas raté une séquence du film qui se joue à Niamey.

Question: les têtes couronnées de la CEDEAO vont-ils donner l’ordre d’utiliser la force pour déloger les putschistes nigériens, rendre sa liberté à Mohamed Bazoum, qui refuse fermement de signer sa démission, et le remettre dans le fauteuil dans lequel l’a installé son peuple? En tout cas, les chefs d’état-major du Nigeria, du Ghana, de la Côte-d’Ivoire, de la Guinée-Bissau, du Bénin, du Sénégal, pour ne citer que ceux-ci, ont affirmé qu’il n’y aura pas une troisième réunion, en ce qui les concerne, après Abuja et Accra! Passeront-ils à l’acte et engager cette guerre que personne ne souhaite pour le Niger et la sous-région?

Pendant ce temps, la junte militaire nigérienne, contre qui ont été prises des sanctions dont les populations sont, depuis un certain temps, des victimes collatérales, reste dans sa posture de défiance à l’endroit de la CEDEAO et de pays comme la France et les Etats-Unis, qui ont été des cibles privilégiées des manifestations de ce week-end, à Niamey et à Agadez. Il n’est plus un secret pour personne, que l’ambition caressée par les putschistes de Niamey, est de tourner, voir fermer la page Bazoum, tirant ainsi un trait sur l’ère démocratique et la bonne gouvernance que le peuple nigérien avait commencé à apprécier à leur juste valeur depuis l’avènement du président que ses partisans affirment être l’«otage» du général Abderahamane Tiani et de ses hommes. La CEDEAO qui a déjà fixé «un jour» pour une intervention militaire est, par contre, déterminée à ne pas laisser la page Bazoum être fermée par ce coup de force et entend assurer l’opportunité pour les peuples de continuer à «choisir leurs leaders par les urnes».

Et si les Brics qui se réunissent ce mardi en Afrique du sud, ajoutaient à leur menu aux fortes senteurs économiques et d’étude de nouvelles adhésions, la condamnation ferme du putsch et la réinstauration sans condition de l’ordre constitutionnel au Niger? Alors les peuples libres du monde entier leur en seront reconnaissants, eux qui se sont battus contre le régime inique et barbare de l’apartheid en Afrique du sud, soutenu le président du Brésil Lula Da Silva alors que celui-ci subissait un «coup d’état» sous une autre forme de la part de son prédécesseur Jair Bolsonaro, encouragé la Chine dans sa politique d’expansion en lui ouvrant les mines et les puits de pétrole comme au Niger de Bazoum, etc.

Par Wakat Séra