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Niger: transition ou pas transition?

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Le Premier ministre de la junte militaire nigérienne, Ali Lamine Zeine

La communauté internationale continue de condamner une tentative de coup d’Etat et d’exiger la libération de Mohamed Bazoum et son rétablissement dans ses fonctions de président démocratiquement élu. Des voix s’élèvent pour demander la levée des sanctions de fermeture des frontières, de la suspension des transactions commerciales et du gel des avoirs à la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest (BCEAO), mesures inédites prises contre les putschistes mais qui asphyxient les populations qui en sont, de fait, les victimes collatérales.

Campant sur sa position, tout comme la junte militaire sur la sienne, la CEDEAO continue de mettre l’accent sur le dialogue pour démêler l’écheveau nigérien, mais n’abandonne pas l’intervention manu militari pour déloger les auteurs du coup de force du 26 juillet du palais présidentiel où ils détiennent Mohamed Bazoum, sa femme et leur enfant. Les chefs d’état-major de l’institution sous-régionale envisagent de se réunir les 17 et 18 août à Accra, certainement dans la dynamique de l’activation de la force en attente de la CEDEAO. Les manifestations pro-junte autorisées et celles contre-putsch interdites, tiennent la rue en haleine et entraînent des arrestations de toute voix discordante à celle des maîtres du jour.

La guerre des invectives et des propos fielleux et haineux fait rage sur la toile, mettant à contribution tous les réseaux sociaux. Chaque camp compte ses alliés. Invités prévus de cette situation qui mobilise les militaires à Niamey, les terroristes multiplient les raids meurtriers à l’intérieur du pays. Et tutti quanti. Ainsi va le quotidien au Niger où sont également en jeu de gros intérêts économico-militaro et géostratégiques entre des puissances étrangères, dont la France, les Etats-Unis et bien entendu la Russie.

En tout cas, la junte, elle, a amorcé son processus de transition, à en croire son Premier ministre, Ali Mahamane Lamine Zeine. Les autorités militaires qui ont annoncé avoir renversé le pouvoir de Mohamed Bazoum, et ont mis en place le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP), se disent ouvertes, prêtes à «échanger» avec toutes les parties et «discuter» avec tous les partenaires, à condition que ceux-ci «comprennent» que le Niger est un pays «souverain». Foi de M. Zeine qui affiche la détermination de la junte d’«avancer avec l’aide de Dieu».

Cet appui de Dieu, la junte militaire en aura bien besoin, l’environnement socio-politique national et hors des frontières n’étant point acquis à sa cause. Selon un proche collaborateur d’un chef de l’Etat de la sous-région, il ne sera pas question pour la CEDEAO, d’offrir, selon le package habituel concédé aux putschistes, une quelconque transition aux militaires nigériens. De même, pour le ministre des Affaires étrangères de Mohamed Bazoum qui, il faut le rappeler n’a pas démissionné, il n’est «pas question de parler de transition».

Le Niger est-il ou pas en transition? Ce qui est certain, les planètes sont loin d’être alignées pour le Niger dont les militaires ont attiré les lourdes sanctions de la CEDEAO, a un président toujours séquestré mais reconnu par la communauté internationale et est sous la coupe d’une junte militaire qui évoque, à longueur de communiqués, des tentatives de déstabilisation permanente orchestrée de l’intérieur et de l’extérieur contre elle. Le casse-tête chinois reste entier sur les bords du fleuve Niger où, malgré tout, la vie continue, en attendant les prochains rebondissements qui ne manqueront sans doute pas!

Par Wakat Séra