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Putsch manqué de 2015: «Zida me connait très bien, je n’accepte pas la saleté» (Boureima Zouré)

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Des accusés dans le dossier du putsch de 2015

Le procès du putsch manqué de septembre 2015 s’est poursuivi ce vendredi 13 juillet 2018 avec l’interrogatoire de Boureima Zouré, accusé de quatre chefs d’inculpation dont le «meurtre». L’ex-Premier ministre Yacouba Isaac Zida qui aurait tenté d’éliminer le général Gilbert Diendéré sous la transition «me connait très bien» car «je n’accepte pas la saleté», a déclaré à la barre du tribunal militaire, le soldat de première classe.

Le soldat de première classe, Boureima Zouré, poursuivi pour «attentat à la sûreté de l’Etat, meurtre, coups et blessures volontaires et dégradation aggravée de biens», a nié la quasi-totalité de ses déclarations contenues dans un procès-verbal qu’on lui attribue. Il dit ne pas se «reconnaître» dans les faits qui lui sont reprochés. Il a accusé sur ce point les investigateurs qui, «au lieu d’aller dans le fond» du dossier se sont contentés «de un tel a dit» pour le clore.

Le soldat Zouré accusé d’avoir effectué des patrouilles lors des évènements du 16 septembre

Accusé d’avoir effectué des patrouilles à Ouagadougou et à Zorgho, le sieur Zouré a affirmé n’avoir «pris part» à une quelconque patrouille parce qu’il «n’est pas sorti» le jour du 16 septembre. «J’ai demandé la permission à mon supérieur pour aller assister mon enfant qui ne se sentait pas», a-t-il dit.

Pour la mission en vue du saccage de la radio de Zorgho, selon le parquet, Boureima Zouré dit avoir obéit à «un ordre militaire» que lui aurait donné son chef d’équipe, le sergent-chef Ali Sanou, lui aussi accusé dans ce dossier. Sur cette accusation, il «reconnait» être allé à Zorgho, mais se défend-t-il, «je ne suis pas descendu du véhicule (V8), donc je n’ai pas  eu à faire»  à des civils.

«Et à votre retour, vous êtes passés par quelle voie», a demandé le parquet. Réponse de l’accusé Zouré: «Les tortures que j’ai subies ne me permettent pas de me rappeler notre itinéraire de retour». Il a ajouté avoir été menotté pendant 45 jours. «Je dors avec les menottes et je me réveille avec», a-t-il poursuivi. Pour cet accusé qui dit être doté de «pouvoir surnaturel» pour faire face à l’adversité même la plus «inimaginable», si ce n’est pas parce qu’il est «fort, (il) n’allais pas être devant» le tribunal aujourd’hui.

Ce que le commando Boureima Zouré a compris de la rencontre avec le président sénégalais Macky Sall lors des évènements

«Mon niveau de français ne me permet pas de vous dire exactement ce qui a été dit à cette rencontre mais ce que Macky Sall a dit, c’était pour ramener la quiétude au Burkina», a laissé entendre le soldat Zouré. Il a souligné que c’est du camp Naaba Koom II que l’ordre leur a été donné d’aller à cette rencontre.

Zouré et l’élimination de l’adjudant-chef major Eloi Badiel….

Selon un procès-verbal d’où il ressort que Boureima Zouré voulait «éliminer» l’adjudant-chef major Eloi Badiel, accusé d’avoir «ordonné l’arrestation des autorités de la transition» le 16 septembre 2015 pendant qu’elles étaient en Conseil des ministres, le soldat de première classe a répondu par un «négatif», car, dit-il, il «a beaucoup de respect pour ses supérieurs (notamment) l’adjudant-chef major Eloi Badiel» qui l’a «formé en sécurité rapprochée». «Je ne peux pas lui faire du mal», a-t-il réaffirmé à ce sujet.

« Le commando plein » Boureima Zouré connaissait-il l’existence des clans au RSP?

Lors de ses déclarations le sergent-chef Roger Koussoubé dit le «Touareg», a signifié qu’il y avait trois clans au sein de l’ex-Régiment de sécurité présidentielle (RSP). Pour ces clans, le commando Zouré «savait». Il dit même savoir ce que le clan de l’ex-Premier ministre Isaac Zida «faisait». Il a déclaré avoir «désarmé» des éléments qu’ils considèrent proches de l’ex-chef du gouvernement sous la transition (fin octobre 2014 à fin décembre 2016) qui auraient voulu «éliminer le général Gilbert Diendéré», considéré comme le patron du RSP en son temps. «J’ai gobé les jeunes soldats qui étaient armés et envoyé au camp», confie-t-il.

«Zida a envoyé des gens aller tirer chez le colonel Céleste Coulibaly (chef d’état-major particulier de la présidence sous la transition). Quand je suis arrivé, il y avait sur place son chauffeur», poursuit-il. De même, à la poudrière de Yimdi basée à la sortie Ouest de Ouagadougou, «des éléments de Zida sont allés tuer un jeune soldat (fidèle au corps) et j’ai dit au commandement que tôt ou tard je le chercherai et il va payer», toujours selon Boureima Zouré.

Un soldat « ne cherche pas à connaître les motivations d’un ordre », il l’ »exécute sans hésitation ni murmure »

A la question du parquet de savoir quand est-ce que le commando Boureima Zouré a appris que les autorités de la transition ont été arrêtées et pour quelle raison, il a laissé entendre qu’un soldat «ne cherche pas à savoir pourquoi les autorités ont été arrêtées (car) ça dépasse (son) niveau». Par contre, «ce n’est qu’à l’arrivée de Macky Sall» que le sieur Zouré, à l’en croire, «a su» que les dirigeants de la transition ont été arrêtés.

Selon le parquet, au regard des réponses du soldat de première classe Boureima Zouré, «il est véritablement en train de tout nier». Pour lui, le commando Zouré «ne s’assume pas».

Face à l’insistance du procureur militaire, son avocat Me Régis Bonkoungou, a signifié que Boureima Zouré «relate les faits tels qu’il les a vécus. Seulement il ne cherche pas à rentrer dans les motivations».

A la fin de l’interrogatoire, Boureima Zouré, « le commando plein » comme l’appelait souvent le parquet, a demandé la «clémence» du tribunal militaire qui dit l’avoir «bien noté».

Par Bernard BOUGOUM