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Révision du Code du travail: elle sera l’une des « solutions idoines » contre le terrorisme (Bassolma Bazié)

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Le nouveau ministre burkinabè de la Fonction publique, Bassolma Bazié, (Ph. d'archives Wakat Séra)

Sur initiative de l’actuel bureau du Conseil burkinabè du patronat (CNPB), les employeurs et les responsables des structures syndicales se sont rencontrés ce mardi 22 octobre 2019 à Ouagadougou, en vue d’échanger sur comment travailler les jours à venir pour réviser le Code du travail datant de 2008. Pour le président du mois des centrales syndicales, Bassolma Bazié, qui salué cette démarche du patronat, cette initiative, si elle aboutit, sera l’une des « solutions idoines » que le Burkina aura trouvé contre le terrorisme auquel il fait face difficilement depuis 2016.

Wakat Séra: Est-ce la première fois que le patronat et les syndicats se retrouvent pour discuter du Code du travail ?

Bassolma Bazié: Ce n’est pas la première fois que le patronat et le mouvement syndical échangent sur cette préoccupation (précisément) en ce qui concerne la loi n°028 portant Code du travail qui a été votée le 13 mai 2008. Nous nous étions retrouvés à Tenkodogo en 2008 et sur la base de discussions nous avions trouvé un consensus même s’il y avait quelques blocages. Mais, au moins sur les points essentiels, il y avait beaucoup de choses qui étaient acceptables.

Qu’est-ce qui n’a pas marché dans ce processus alors ?

Là où nous avons été désagréablement surpris, c’est quand la loi est rentrée à l’Assemblée nationale et est ressortie telle que nous l’avons constatée. Les députés de façon unilatérale se sont substitués au patronat et au mouvement syndical et ont fait prévaloir peut-être d’autres intérêts inavoués et ils nous ont disposé d’une loi dont le contenu est esclavageant.

Ce n’est pas trop exagéré que dire que le Code du travail actuel est esclavageant ?

Cette loi est esclavageant parce que le travailleur pour être productif, a besoin d’un socle social sécurisant. Mais si vous lui dites que son contrat doit être renouvelable N fois, il y a problème. Avec le patronat nous nous étions entendus à ce que, dès lors que vous avez un contrat, s’il doit être renouvelé, c’est à Contrat à durée indéterminée (CDI). Le patronat avait proposé qu’au lieu que ce soit dès la première signature, le renouvellement allait se faire deux fois et après on passe à un CDI. Donc, c’est sur, entre autres, ces points que nous nous étions entendus mais quand la loi est rentrée à l’Assemblée nationale, elle est ressortie autre, donc vous voyez que ça ce n’est pas le patronat.

L’autre point non moins important, ce sont les placements au sein des entreprises que vous dénoncez ?

A ce niveau vous constaterez avec moi aujourd’hui, qu’il y a des entreprises fictives qui ont recruté des travailleurs, elles vont les placer et discutent de leurs salaires derrière leur dos. Ces structures vont peut-être percevoir un salaire d’un ou deux millions de F CFA au nom d’un travailleur, pourtant ce qui retombe dans son assiette, ça ne vaut même pas 200 000 de F CFA. Vous voyez bien que c’est de l’esclavagisme. Nous insistons sur ça parce que quand le travailleur a des difficultés, il veut indiquer à son patron où il travaille, ce dernier va lui dire qu’il ne l’a pas recruté. S’il se retourne vers la structure qui l’a placée, elle lui dit que ce n’est avec moi que tu travailles, et donc c’est comme s’il est dans un espace flotteur. Cela est inacceptable et ne peut plus continuer.

Vous avez fait cas de ce que la révision du Code du travail va participer à la lutte contre le terrorisme. Développer nous votre point de vue ?

Vous voyez que chacun dit sur le bout des lèvres que notre pays connait le terrorisme. Mais pour mieux combattre le terrorisme, il faut avoir le courage et la lucidité de mettre les doigts sur les vraies causes. Et les vraies causes-là, c’est l’environnement délétère qu’on crée aux travailleurs et aux populations. Si vous manipulez un travailleur de telle sorte qu’il se retrouve dans la rue, sa famille est disloquée et il se retrouve dans la rue sans le minimum pour assurer un repas par jour, toute personne dotée d’un mauvais esprit peut venir lui proposer de faire des actes ignobles et il va accepter. Donc si on veut lutter contre le terrorisme, il faut aller à la base. C’est pour cela que j’estime que cet acte de ce matin entre le mouvement syndical et le patronat, c’est la recherche d’une des solutions mères, idoines de la lutte contre le terrorisme, à savoir ne pas saccager la vie des travailleurs, ne pas clochardiser les travailleurs, ne pas créer des conditions pour qu’il y ait des brigands économiques.

 Propos recueillis par Bernard BOUGOUM