Accueil A la une Burkina: les putschistes face à l’offensive russe

Burkina: les putschistes face à l’offensive russe

0
Le drapeau russe brandi lors d'une manifestation populaire de soutien aux nouveaux maîtres militaires de Ouagadougou

Les putschistes burkinabè prendront-ils en main la destinée de leur pays ou se laisseront-ils séduire par la sirène russe? Cette dernière semble devenir irrésistible dans un Sahel Afrique africain où les peuples, certains manipulés, d’autres suivistes et d’autres réellement déçus de la France, dont les forces militaires n’ont pas réussi à les débarrasser des terroristes qui les endeuillent au quotidien, ne jurent que par la Russie. Pour les fanatiques des «Popovs» le choix est clair, il faut aller vers ce partenaire pour espérer mettre fin à la menace djihadiste dont la France, depuis 2013, avec l’opération Serval au Mali, puis la Force Barkhane au Sahel, n’a pu venir à bout, malgré sa puissance de feu. Certes, la France qui porte comme un tatouage indélébile le péché originel d’ancien pays colonisateur, est accablée sans répit, par des nationalistes souvent excessifs qui lui reprochent, à tort ou à raison, de continuer à piller les richesses de l’Afrique avec la complicité de dirigeants acquis à sa cause.

C’est cette image gravée dans la mémoire collective des pays où elle est vouée aux gémonies, qui dessert la France, au profit d’une Russie, qui ne se prive aujourd’hui d’aucun moyen, pour rattraper le temps perdu lors de la colonisation à outrance de l’Afrique. Dans cette nouvelle volonté de conquête et d’hégémonie, la Russie entre par la brèche largement ouverte de la lutte contre le terrorisme, surfant outrancièrement sur le discours anti-Occident, notamment le sentiment anti-français qui enfle sans cesse. Les Russes offrent armes et hommes, soldats qu’ils qualifient d’instructeurs mais que les Occidentaux affirment être des «mercenaires», non pas pour les beaux yeux des Africains, mais bien évidemment moyennant de gros pactoles et richesses minières de la part de leurs partenaires.

Du reste, des hommes d’affaires prospères, proches de Vladimir Poutine, n’ont pas trainé les pas pour féliciter la junte au pouvoir au Burkina, et lui proposer leurs services, après leur prise de pouvoir par les armes. Les armées africaines, faibles pour la plupart et dégarnies par des officiers qui préfèrent les lambris dorés des palais présidentiels au front, se jettent, de plus en plus, sur ce cadeau qui, en réalité, n’en n’est pas un, car soustrayant ainsi, leurs pays d’un état de servitude pour les jeter dans les griffes d’autres maîtres.

Certes, les armées africaines ont besoin de soutien des forces étrangères et chaque pays est souverain dans ses choix en matière de coopération. Mais peut-on être mieux servi que par soi-même? Au nom de la fameuse indépendance dont se réclame chaque pays, les Africains doivent-ils continuer à sous-traiter l’entièreté de la défense et la sécurité de leurs territoires, avec des forces étrangères, qu’elles viennent de la Russie, de la France, de l’Allemagne ou des Etats-Unis? A moins que, pour le continent noir, entretenir des relations de coopération avec les puissances étrangères ne rime avec tendre la sébile, donc perte de dignité.

Où donc est passée cette fierté héritée des Soundiata Keïta et, plus proche de nous, Thomas Sankara, qui ont préféré «la pauvreté dans la dignité à l’esclavage dans l’opulence»? Pourtant, grâce à l’argent du contribuable, tous ces hauts gradés de l’armée qui ont opté aujourd’hui pour les fauteuils douillets de président, de ministre ou autres strapontins au dépens de l’engagement de défense de la nation contre l’ennemi commun qu’est le terrorisme, ont été formés dans de grandes écoles de guerre, avec l’argent du pauvre contribuable!

En tout cas, les nouveaux maîtres de Ouagadougou, qui ont affiché clairement leur volonté de ramener le Burkina sur les rails de la bonne gouvernance et de la démocratie, la vraie, n’ont pas le droit de faillir à cette mission de salubrité publique. Ils ont, du reste, enclenché des concertations tout azimut avec les forces vives de la nation sans ségrégation, dans le but de mener une transition inclusive, en tablant sur un délai raisonnable pour le retour d’un pouvoir constitutionnel aux affaire. Ce sera à leur honneur de s’atteler à cette tâche dans cet esprit de patriotisme pour la sauvegarde et la restauration. Et pour cela, il importe qu’ils soient intègres dans leurs choix et évitent surtout de se faire imposer des options hasardeuses par une rue, qui a toujours été versatile. C’est le même peuple qui a crié vive le président qui criera à bas le président.

Par Wakat Séra