Accueil L'ENTRETIEN Création du PUR: les révélations et vérités de Justin Somé

Création du PUR: les révélations et vérités de Justin Somé

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Le 28 avril 2018, des ex-membres du parti de l’Union pour la Renaissance/ Parti Sankariste, ont tenu une assemblée générale pour présenter leur nouveau parti, Progressistes Unis pour le Renouveau (PUR). Avec la création de cette formation politique, ces dissidents du principal parti sankariste marquent définitivement leur rupture avec le parti de Me Bénéwendé Sankara. Qu’est-ce qui n’a pas marché entre ces sankaristes? Pourquoi un nouveau parti de gauche? Le sociologue Justin Somé, président du PUR enchaîne les révélations et ses vérités dans cette interview accordée à Wakat Séra. Il aborde également des questions sur l’insécurité, le patriotisme et l’injustice.

Wakat Séra: Qu’est-ce qui vous a motivé à quitter l’UNIR/PS?

Justin Somé: Il faut tout de suite dire que c’est un processus de réflexion qu’on a enclenché après notre dernier congrès où nous avions, ensemble avec les camarades, posé un certain nombre de préoccupations sur la table pour en discuter au niveau du Secrétariat exécutif national (SEN). Et comme d’habitude nous avions supposé que c’était un secrétariat exécutif qui était ouvert aux préoccupations des militants. Ces préoccupations, ce n’est pas nous qui les avons inventées. Elles existent depuis notre dernier Bureau politique national où certain nombre de préoccupations ont été posées, notamment, la nature de la relation qu’on a avec la majorité. Il y a aussi la problématique de l’alternance au sein du parti et le problème d’introspection qu’on avait posé suite aux résultats obtenus aux dernières élections (en 2015), présidentielle surtout.

Celles-ci étant posées sur la table, le Bureau politique national avait demandé que nous puissions en discuter avant ou après le congrès. Nous, en tant que membres du Secrétariat exécutif national, nous avions cru que c’était mieux que le SEN discute de manière très profonde les préoccupations du Bureau politique national avant le congrès. Bien sûr pour que ça ne soit pas au congrès que les choses doivent être discutées. Voilà un peu des problèmes qui sont restés en suspens.

Ce qui veut dire que vous n’avez pas pu discuter de ces préoccupations?

Oui. On n’a pas pu en discuter parce qu’il y a eu des appréhensions par rapport à un certain nombre de choses, notamment, l’alternance. Et pour nous, parti sankariste et des sankaristes convaincus, si vraiment on épouse l’idéal sankariste où on ne bâillonne personne, il fallait que cette question soit discutée. Aucune question n’est tabou. Mais malheureusement, pour nos camarades, ces questions ont été difficiles à aborder et d’autres interprétations s’en sont mêlées, ébranlant du même coup notre conviction par rapport aux idéaux et à la gestion même du parti. Si quelque part nos convictions sankaristes sont restées intactes, c’est parce que nous en avions réellement.

Pour ce qui est du management et tout ce qui est de la gestion du parti, dont on voulait qu’on discute entre camarades pour trouver des solutions, on ne nous a pas donné cette opportunité. Ce qui, pour nous, est inacceptable. Comme l’a dit Thomas Sankara, «Malheur à ceux qui bâillonnent leurs peuples». Et nous, on refuse d’être bâillonnés  C’est suite à ça qu’on est parti au congrès sans discuter des problèmes et même en congrès les préoccupations non pas été discutées. Et pour éviter toute implosion du parti, quoi qu’on dise ce fut notre maison commune durant des années, c’était une école pour nous en matière de sankarisme, nous avions préféré purement et simplement nous retirer de ses instances depuis le dernier congrès.

Vous êtes combien à quitter l’UNIR-PS?

En ce qui nous concerne au niveau du Secrétariat exécutif national,  nous étions en plein congrès quand nous avions quitté. Moi particulièrement j’ai quitté les instances, il y a le député Traoré, Paul Corneille Zerbo, Lassina Sawadogo. Il y a aussi des camarades dont je n’oserai pas citer les noms ici. En ces moments on avait quitté les instances, on n’avait pas quitté le parti. On s’est dit qu’on se donnait un temps de réflexion en restant à la base. Donc nous avons rejoint la base et ils ont renouvelé les instances sans que nous nous mêlions de quoi que ce soit parce qu’il est inadmissible, pour nous, de rester dans les instances et être comptables dans le futur, de ce qui se passe et qu’on n’a pas apprécié.

Que pensez-vous de Me Bénéwendé Sankara?

Le problème n’est pas un problème de personne. Quand vous en arrivez à la personne moi je me sens mal à l’aise parce que quoi qu’on dise il a été mon président durant pratiquement une décennie. Ce n’est quand même pas rien. On a cru en lui pour qu’il soit notre guide, notre président, donc il ne s’agit pas pour moi de jeter l’anathème sur qui que ce soit. Ce qu’on reproche c’est le management. Ce n’est pas en tant que tel Me Sankara qui est notre problème. Mais la manière dont le parti est géré était notre problème. Et peut-être que Me Sankara n’est pas le seul, d’autres camarades aussi avaient des comportements que nous n’avions pas appréciés. C’est à ce niveau que le problème se pose. D’ailleurs pour dire que ce n’est pas une histoire de personne, nous avions dit qu’il fallait qu’on analyse nos résultats.

Comment pouvez-vous imaginer qu’au moment où le pouvoir autocratique de Blaise Compaoré (ex-chef de l’Etat burkinabè) était là nous avions pu avoir des résultats meilleurs? Même si ce n’était pas bon entre griffes. Nous avions pu nous battre jusqu’à devenir chef de file de l’opposition.  Et après l’insurrection qui nous est carrément favorable, nous n’avons pas eu un bon résultat. Nous le clamons haut et fort, l’insurrection populaire a été sankariste et nul ne peut remettre cela en cause  parce que vous avez vu les slogans de Sankara au moment de la révolution qui ont été scandés. Des jeunes qui n’ont même pas connu Sankara qui ont scandé ses slogans pour aller en insurrection. Donc pour nous cette insurrection avait une coloration sankariste et naturellement nous nous sommes dit que notre soleil était en train de se lever enfin. C’était la période où les sankaristes devaient avoir des atouts pour aller à une élection qu’ils pouvaient remporter haut les mains. C’est ce que nous avions cru, mais mal nous en prit, parce que vous avez vu les résultats, je ne vous commente rien. Il y a même des partis qui sont venus après nous mais qui ont fait mieux que nous. Malheureusement encore je le dis, à l’élection présidentielle, les électeurs ont plus un regard sur le candidat que sur le parti. Ça fait que le candidat qui est là, quoi qu’on dise, devient comptable des résultats auxquels nous en sommes arrivés parce que c’est son image que nous avons défendue en tant que camarade de l’UNIR/PS. Donc nous avions dit qu’il fallait que l’on revoit les choses et que nous voyons comment nous en sortir.

Alors vous avez quitté l’UNIR/PS, qu’est-ce qui fait que vous n’êtes pas allés dans un autre parti qui existe déjà au lieu de créer votre propre formation politique?

Cette question revient. C’est vrai qu’il y a un foisonnement de partis politiques au Burkina. Mais quand vous faites votre analyse vous aller vous rendre compte que sur les centaines de partis que nous clamons haut et fort, il n’y a pas plus d’une dizaine qui sont actifs réellement sur le terrain. Et d’ailleurs un parti c’est au minimum des conseillers, des députés, si on peut le dire ainsi, avant d’avoir des ministres. Mais si vous faites le point vous allez voir que dans les centaines de partis, il y a des partis et il y a des partis.

Il se trouve que la scène politique a d’innombrables partis mais il n’y a pas beaucoup de partis en tant que tel qui ont des activités concrètes sur le terrain. Ça c’est le premier point. Le deuxième point, en ce qui nous concerne nous avons dit que la rupture que nous attendions, après l’insurrection populaire, nous nous sommes rendu compte avec tout le peuple burkinabè qu’elle n’a pas eu lieu. Cette rupture n’a pas eu lieu et ça nous fait un pincement au cœur. Cette rupture n’a pas eu lieu du moment où nous avons fait du neuf avec de l’ancien. Non content de ça, les maux qui minaient notre société que nous avions cru qu’ils allaient être combattus de manière très concrète, après l’insurrection sont restés les mêmes, je cite la corruption, l’injustice, la gabegie et tout ce qui s’en suis. Le peuple se retrouve toujours dans la misère, dans les mêmes injustices.

Les victimes de l’insurrection populaire n’ont pas eu justice jusqu’à présent. C’est vrai que la justice a son calendrier qu’il faut respecter, mais jusqu’ici quand je vois d’autres personnalités nous parlé de la réconciliation, je crois qu’il faut que les cœurs soient apaisés avant de parler de la cela. Si les cœurs ne sont pas apaisés nous ne pouvons pas parler de réconciliation. Pour nous tous ces éléments nous ont motivés à dire que la rupture n’ayant pas lieu, il faut que nous prenons nos responsabilités. C’est une grande ambition, on le sait. Mais nous comptons sur tout le peuple burkinabè pour y arriver. L’ambition est grande mais c’est une ambition noble et nous croyons avoir l’adhésion du peuple burkinabè pour qu’ensemble nous puissions arriver à cette rupture et que le Burkina Faso reprenne ses lettres de noblesse d’antan. Ce qui est sûr pour nous, on y croit et on croit que le peuple va souscrire à notre ambition et qu’ensemble nous pourrons avoir des résultats.

En un mot vous n’êtes attirés par aucun des partis qui existent déjà avant le vôtre ?

Les partis qui existent ! (rire) On a cru comprendre qu’il y a des partis où on parle de président fondateur, de président charismatique, ou tout ce que vous voulez. Nous nous battons en brèche tout cela. Un parti c’est pour le peuple et c’est pour servir le peuple. Quand ça devient une affaire d’individu, pour nous ce n’est pas normal. Un président d’un parti n’est là que pour diriger le parti. Un parti n’est pas le champ d’un individu. La preuve en est qu’on a besoin de militants. Si seul vous pouvez vous satisfaire, pourquoi créer un parti ? On crée un parti pour avoir l’adhésion et le concours  du peuple, pour se battre avec lui et pour répondre à ses aspirations. Si c’est pour répondre à ses basses aspirations, individuels, égoïstes et tout ce qui s’en suit, nous nous n’y sommes pas du tout.

Aujourd’hui quand tu quittes un parti on dit qu’il faut que tu aille là ou là, non ! ce n’est pas un décret ! Les partis se créent librement  au Burkina. Nous avons fait notre expérience dans un certain nombre de partis, aujourd’hui nous croyons qu’il est temps que nous prenons nos responsabilités. Vous n’êtes pas sans savoir que cette classe politique est en train d’être vieillissante. C’est une évolution naturelle, nous-mêmes nous évoluons et nous seront vieux un jour. Cette classe politique qui est vieillissante, nous ne voyons pas venir à l’horizon la préparation de la relève. Je crois que la liberté, on se bat pour l’avoir, ça ne se donne pas, ça s’acquiert et ça s’arrache de haute lutte et nous on s’est dit : nous prenons nos responsabilités, nous allons nous battre mais pas nous battre contre nos prédécesseurs. Souvent c’est l’erreur qu’on fait. Mais nous battre pour qu’au moment de histoire nous ne soyons pas lésés et nous ne soyons pas là à accuser nos prédécesseurs. C’est plutôt nos responsabilités que nous voulons prendre c’est cette bataille et pour faire cette bataille,  nous n’avions pas vu de parti qui nous permettra de faire cette bataille parce que les partis prônent plutôt la continuité et nous, nous prônons la rupture.

Le parti a été créé, maintenant comment comptez-vous faire son implantation dans les différentes localités du Burkina ?

Dès qu’on a quitté les instances de l’UNIR/PS nous avions amorcé une longue réflexion. Ça fait plus d’une année que nous y travaillons. Beaucoup de choses ont été planifiées. Beaucoup de concertations ont été effectuées. Avant que ce parti n’existe, beaucoup de travail a été fait. On a concerté. On a pris des conseils pas auprès de moindres personnalités. Tout ça l’un dans l’autre nous a permis d’être réconfortés dans notre décision, avant que l’Assemblée général constitutive ne se tienne.

Pour ce qui est de la structuration du parti, il y a déjà un certain nombre de bases qui sont jetées. Il s’agira pour nous de faire essentiellement le boulot de structuration du parti en comptant déjà sur les bonnes volontés et sur les personnes qui nous ont crues et qui nous ont dit qu’ils sont très favorables et très ouverts pour nous accompagner. La mission première de notre parti c’est d’abord se faire connaitre à travers, bien sûr, la structuration. Et nous parlerons du parti jusque dans les plus petites localités du pays parce que c’est un droit. Tout le monde doit avoir l’information et tout le monde sera informé, tout le monde saura que ce parti existe.

Avez-vous les moyens de votre politique ?

Les ressources humaines existent. Mais pour les ressources financières, nous croyons aux choses et nous nous sommes dit qu’en nous battant on va y arriver. Il faut des ressources. Ensemble, ceux qui croient en nous et ceux sur qui aussi on compte, pourront mettre le peu de moyen que nous avons besoin au moins pour qu’on puisse structurer le parti. Sinon nous n’avons pas de financements occultes, nous n’en avons pas du tout mais avec le peu de moyen que nous avons, nous sommes prêts à nous sacrifier pour la structuration de notre parti.

Vous avez annoncé la participation de votre parti à l’élection présidentielle de 2020. Dites-nous quel sera le prototype de la personne que vous souhaiterez comme candidat ?

Il est très précoce. La question précédente que vous avez posez est très basique pour nous. Si notre parti n’est pas bien structuré, nous ne pouvons pas nous aventurer sur ce terrain. C’est pourquoi nous avons dit : ce qui est fondamental pour nous,  c’est la structuration du parti. Et cette structuration sera la chose qui va nous réconforter et nous donner raison si on doit présenter un candidat ou non. Ce qui est sûr notre volonté c’est de présenter un candidat mais cela dépend du peuple. Si le peuple nous soutient. Si le peuple souscrit à nos idéaux et nous accompagne, nous sommes prêts à leur faire honneur. Donc c’est à ce niveau qu’on verra quel prototype de candidat ce peuple veut. Nous avons des valeurs que nous défendons. Il ne s’agira pas pour nous comme on l’a dit de faire du neuf avec de l’ancien. Il ne s’agira pas de prendre quelqu’un qui est cousu d’or. Si le peuple a besoin de quelqu’un qui a des valeurs, notamment, l’intégrité, l’honnêteté et la probité, ce peuple doit accepter faire le sacrifice même si nous n’avons pas les moyens.

Vous sollicitez la confiance et l’accompagnement du peuple, quel sera votre combat pour mériter cela ?

Il ne s’agit pas pour nous de théoriser. Les théories, citer les grands auteurs, l’idéologie, non ! C’est des choses qui existent déjà. Quelqu’un nous a dit : « Quel est votre programme ? ». Je dis ce n’est pas les programmes qui manquent dans ce pays. Il faut que nous respections aussi ce que nos devanciers ont fait. Les gens ont travaillé. Il y a eu des programmes, mais le gros problème du Burkina, on ne les applique pas. On n’exécute pas les programmes comme il faut. Quand on arrive au pouvoir, j’ai l’impression qu’on a deux programmes. Il y a un autre programme qui sort. Le contrat qu’on veut signer avec le peuple c’est d’exécuter le programme sur la base duquel ce peuple va nous élire. C’est pourquoi il peut en être sûr, ce programme sera en même temps l’instrument d’évaluation de ce que nous allons faire. Nous nous préférons passer aux actes concrets. Il y a des politiciens qui ont fait des promesses et aujourd’hui on qualifie ces promesses de politiques. La politique a perdu ses lettres de noblesse. Toute suite quand vous vous présentez comme un politique, on ne vous croit pas parce qu’on se dit que vous allez faire des promesses vides, vous n’allez pas respecter vos engagements. C’est tout ça qu’on veut laver, ramener l’homme burkinabè intègre qui respecte ses engagements. Nous sommes d’accord avec le peuple, le peuple a raison, il a été longtemps fourbé, trahi.

Et pour vous il est temps d’arrêter cela ?

Je crois qu’il est temps de faire une halte et qu’on fait face au peuple, lui dire toute la vérité qu’il faut. C’est pourquoi je dis que notre programme sera réaliste. Nous n’allons pas faire des promesses de gabegie. C’est ça surtout notre programme, la vertu humaine. Le Burkina a perdu sa vertu. Quand on parle d’homme intègre, aujourd’hui nous sommes tentés de remettre en cause les choses. L’incivisme a pris un pas terrible. Mais elle a ses raisons, nous sommes d’accord car ont dit que le poisson pourrit par sa tête.

Nous nous demandons un sursaut patriotique. Les Burkinabè doivent être patriotes. Un sursaut patriotique permettrait aux Burkinabè de savoir que ce pays nous appartient tous et que faire tout acte qui part à l’encontre du bonheur de ce pays, ou de la préservation de l’intégrité de ce pays est négatif. Quoi qu’on dise la jeunesse aujourd’hui doit savoir qu’ils sont les dirigeants de demain. Donc si elle détruit le pays aujourd’hui, elle aura un pays délabré devant elle demain qu’elle ne pourra pas gérer. Nous en appelons à la conscience de cette jeunesse. Battez-vous contre les responsables qui ne respectent pas leurs promesses, corrompus et tout et non en détruisant notre patrie commune. Si nous détruisons ce que nous avons de commun finalement qu’est-ce que nous allons faire ? C’est pourquoi nous en appelons au patriotisme de tout un chacun pour que nous puissions bâtir le Burkina Faso, notre patrie. Il ne s’agit pas de faire la guerre contre tout le monde, mais de savoir ce qui est mauvais et de l’extirper et qu’ensemble les Burkinabè main dans la main puissent construire ce pays-là.

Beaucoup de gens continuent de se poser la question, à savoir si vous êtes de la majorité ou de l’opposition …

On vient de naitre. C’est vrai que le papa ou la maman ou la famille proche connait déjà le nom de l’enfant quand l’enfant naît. Mais j’avais dit de nous laisser cette solennité qu’on appelle le baptême qui est le jour où on dira de manière haut et fort à quelle position on sera. Mais en ce qui nous concerne au niveau du PUR, on aurait souhaité n’être ni de la majorité ni de l’autre côté si on veut être logique avec nous-mêmes.  Bien avant vous m’avez demandez pourquoi on n’est pas allé ailleurs et j’avais donné les raisons. Mais nous ne sommes pas des anarchistes, illégaliste non plus. Nous respectons les droits et les lois de notre pays. Si la loi de notre pays dit qu’il faut choisir un camp, c’est avec amertume que nous allons choisir. On aurait préféré rester droit dans nos bottes, pur comme le PUR, pur comme le pur-sang.

L’insécurité est de plus en plus grandissante dans notre pays et d’aucuns disent que le président Roch Kaboré a failli et doit même rendre sa démission car il n’a pas pu préserver l’intégrité du territoire. Quel est votre avis sur le sujet ?

Ce qui est vrai à dire c’est que l’insécurité est grandissante comme vous l’avez dit et j’en conviens avec vous que ça prend des proportions qui inquiètent tout le monde. Effectivement le Burkina est resté longtemps un havre de paix, un pays vraiment paisible où tout le monde nous enviait et Dieu faisant, on peut le dire, nous sommes tombés dans une situation vraiment qui n’est pas enviable, que l’on déplore. C’est le lieu encore de m’incliner devant ceux qui sont tombés et dire tous mes respects aux soldats qui en voulant nous protégés sont tombés. Je m’incline devant leur sacrifice. Ceux qui sont blessés aussi nous leur disons toutes nos compassions. Cependant le Burkina doit rester débout. Si nous nous appétitions sur notre sort, nous risquons d’être surpris parce que c’est ce que ces ennemies veulent. Il faut que les Burkinabè restent débout.

Quelque part il y a eu des insuffisances parce que, dites-vous que tout le monde a été surpris  qu’à peine ce pouvoir installé qu’il y ait tout ce que vous savez. Ils n’ont pas eu le temps de s’assoir que les choses ont commencé. Certes mais à la date d’aujourd’hui, ce que nous disons, nous devions avoir des mesures plus rigoureuses. Il y a des mesures qui ont été prises que nous saluons mais nous trouvons que c’est insuffisant étant donné que le fléau continue. J’apprenais à travers les réseaux et vos écrits qu’à Kaya il y a eu attaque. Le Nord c’est le c’est le Burkina Faso. Que ce soit au Nord, à Ouagadougou, ou ailleurs c’est le Burkina Faso. Le Burkina est un et indivisible, il nous appartient. Je crois que les Burkinabè doivent rester débout comme un seul homme pour se battre contre ce fléau.

Ce que nous voyons après nos analyses, le problème n’est pas seulement un problème d’arme. C’est un problème qui est plus profond. Je vous le disais tantôt, le patriotisme du Burkinabè est en train de partir, ce qui fait qu’il est possible aujourd’hui que des Burkinabè tuent d’autres Burkinabè et se réfugient chez d’autres Burkinabè pour qu’on ne les retrouve pas. Des Burkinabè tuent des Burkinabè et d’autres Burkinabè les protègent. Vous ne voyez pas qu’il y a un problème quelque part ? Si ça ce n’est pas réglé, les militaires ont beau être volontaristes, courageux, efficace, ils ne pourront pas car ça serait difficile. Le mal se trouve dans le fruit. Il faut qu’on l’extirpe. Il faut que le Burkinabè ait un sursaut et qu’il se dise que c’est contre mon peuple et contre ma patrie que cela se passe. Si ce sursaut vient ça sera une arme plus redoutable, ça dépasse des roquettes. C’est-à-dire qu’on ne se laissera pas faire. Et moi je crois au Burkina Faso. Comme un seul homme on a bouté hors de notre pays ce qui faisait handicap à notre développement. Et je crois aussi que comme un seul homme on peut affronter ces personnes.

Il faut du patriotisme ?

Que les gens soient patriotes. Entre temps ceux qui pouvaient dénoncer ont eu des problèmes. Ceux qui véhiculent des informations sur ceux qui donnent des informations aux forces de sécurité, ce n’est pas patriotique ! Que vous soyez Force de Défense et de Sécurité ou qui que ce soit, comment vous pouvez dire : c’est Somé qui nous a donné l’information pour venir vous mater ? Est-ce que vous croyez qu’un patriote peut le dire ? Il y a quelque chose qui ne va pas. C’est pourquoi nous appelons à un sursaut. Tant qu’il y aura pas ce sursaut la bataille sera vaine. C’est à travers ce sursaut que le Burkinabè partout sera un militaire. Je vous fais souvenir d’une certaine période révolutionnaire où la plus petite parcelle du Burkina était défendue pas seulement par des militaires mais par tout homme qui se réclamait être Burkinabè parce qu’en ce moment on était des patriotes convaincu dans le sang. Et vous avez vu ce que ça donné. Moi je vous dis que si c’était à cette période ces ennemies du Burkina n’allaient pas pouvoir avoir le règne qu’ils ont eu jusqu’aujourd’hui. En une seul fois ils auraient essayé en une seul fois on aurait anéanti ce mal. Mais aujourd’hui c’est dans l’amertume qu’on  se rend compte que le Burkinabè n’est plus patriote. Figurez-vous qu’il y a des gens qui osent dire que quand on nous frappe c’est bien, c’est les responsables de ce pays-là. Non ! Mais il y a des gens qui ne sont pas des responsables mais qui sont en train d’être des victimes. Il faut qu’on y pense. Nous croyons qu’il faut le sursaut patriotique. Même si notre armée a de l’équipement qu’il faut, les forces de l’ordre formées de manière efficace, s’il n’y a pas cet accompagnement de tout le peuple, nous allons toujours nous battre contre sans succès. Ça sera difficile. Vous n’êtes pas sans savoir que des terroristes on en retrouve au Burkina. Chaque fois on nous dit le Mali, mais ça se trouve aussi au Burkina ! Ceux qui ont frappé à Ouaga ils étaient à Ouaga, ceux qui ont frappé au Nord sont au Nord. Même si après ils fuient vers le Mali mais ils sont là et vivent avec des Burkinabè. Est-ce que vous croyez que tant que ça continuera comme ça on pourra lutter contre ces ennemies du peuple. C’est pourquoi moi j’en appelle au patriotisme, à un sursaut d’orgueil de tous les Burkinabè pour que nous puissions faire face à ce fléau. J’y crois. Je crois profondément qu’on peut le bouter hors de notre pays.

Le 29 février dernier il y a eu l’ouverture du procès du coup d’Etat manqué de 2015, quelle est votre lecture du déroulement de ce procès ?

C’est vrai que la justice vous dira qu’elle a son calendrier et qu’elle ne veut pas d’ingérence. Mais pour nous Burkinabè, il est nécessaire que tous ceux qui  tentent à déstabiliser notre pays, qu’ils soient jugés en bonne et due forme. Il le faut. Aujourd’hui, si ce n’est le calendrier judiciaire, aujourd’hui on devait laisser ça derrière nous. J’ai toujours dis que un mandat ce n’est que cinq ans. Si la justice doit prendre 20 ans, 30 ans, à quoi ça rime. Je crois que toute cette durée que la justice prend, ça joue sur le développement de notre pays. Pourquoi je dis cela ? On est obligé de s’y attarder, de mettre des efforts et de l’argent. Si c’était fini et les verdicts étaient prononcés, on allait passer à autre chose. Tirer ça longtemps ça arrange qui ? Je ne sais pas si des gens ont des agendas cachés mais ça ne va pas du tout. La justice doit être faite. Pour nous on ne condamne personne. Si quelqu’un n’est pas passé par la justice on ne peut pas condamner la personne. Nous on attend que la justice fasse son travail pour que les victimes puissent savoir quelle est la vérité et que par exemple les gens ne sont pas tombés pour rien. Les familles des victimes sont là, elles attendent. Est-ce que ça va continuer comme ça ? Tout ça ça peut être des amertumes que les gens ont forgées et qui peuvent amener les gens à penser à autres chose. Vous voyez ! L’injustice est la base de tout. Aujourd’hui quand les gens sortent et disent que ça ne va plus dans le pays, il y a ceci cela, c’est vrai.

Le procès est ouvert, on en est où ? Jusqu’à présent on en est où ? Je crois que si ça continue sur la même lancée, vous et moi ce n’est pas sûr qu’on ait même les résultats du procès d’ici là, et c’est ce qui n’est pas du tout bon pour le Burkina Faso. Moi je croix que dès qu’il y a eu l’insurrection et dès qu’il y a eu un gouvernement élu il devait s’attarder rapidement sur tous ces points. Ce n’est pas liquider mais que la justice fasse son travail et qu’elle puisse faire la justice pour que les parents des victimes connaissent la vérité et qu’on puisse maintenant parler de réconciliation. D’ailleurs, quand on nous parle de réconciliation, est-ce que vous croyez que c’est possible ? J’ai le cœur meurtri, je ne sais pas ce qui s’est passé et vous me dites de venir m’assoir, pour pardonner ? Pardonner à qui ? Et pourquoi ? Au moins qu’on ait une idée de ce qui s’est passé. Le pardon viendra de manière naturelle. Moi je sais que le peuple burkinabè est un peuple de pardon. Le jugement fait, je suis sûr que le peuple va se pardonner. Nous sommes un et indivisible. Le pardon existe au Burkina et j’y crois. Mais sans jugement je ne sais pas à quoi ça rime, et tout ça ça nous préoccupe. Pour nous on souhaite que le jugement se fasse. Que ceux qui sont coupables puissent payer de leurs actes et que les parents des victimes puissent aussi entrer dans leur droit. Ça c’est très fondamental.

Par Daouda ZONGO