Accueil Editorial Force du G5 Sahel: accouchement difficile!

Force du G5 Sahel: accouchement difficile!

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Le transport des corps des victimes des attentats perpétrés au café Aziz Istanbul de Ouaga (Ph. lopinion.fr)

La victoire sur le terrorisme dans le Sahel demeure encore une chimère. Les attentats se suivent et rivalisent dans la comptabilité macabre, que ce soit au Tchad, au Niger, au Mali ou au Burkina Faso. Les deux pays cités viennent d’ailleurs d’essuyer presque simultanément des attaques qui, une fois de plus ont endeuillé des familles de différentes nationalités et auront pour conséquences notoires de détruire davantage tous les espoirs de développement de pays pauvres fortement confrontés à diverses adversités naturelles. Démunis mais acculés par des terroristes qui leur en veulent à mort parce qu’ils abritent ou défendent des intérêts occidentaux sur leurs sols, ces pays n’ont d’autre solution que de s’unir pour vaincre l’hydre djihadiste. Malheureusement, le nerf de la guerre fait défaut de façon criarde. En gestation, la force du G5 Sahel…force un accouchement dans le dénuement presque total. Certes, l’Onu, après avoir voté une résolution saluant la décision du Burkina Faso, du Mali, de la Mauritanie, du Tchad et du Niger, de créer une force battant pavillon G5 Sahel, vient d’exprimer l’urgence de son déploiement dans les zones transfrontalières. Mais comment mettre en place, et a fortiori déployer une force aussi lourde, composée de 5 000 hommes sans les moyens nécessaires? Les encouragements des puissants de ce monde qui ont entre leurs mains le destin de tous ces pays pauvres qu’ils abandonnent après en avoir tiré profit lors des votes de telle ou telle résolution ou élection, sont visiblement du bout des lèvres.

Assaillis de toutes parts, et conscients maintenant que leur salut ne peut venir que de leur propre organisation, les pays membres du G5 Sahel n’ont, malheureusement pas les arguments financiers indispensables à leurs ambitions. Certes, l’Union européenne crachera 50 millions d’euros au bassinet. La France qui porte l’ambitieuse initiative de ces ex-colonies, promet une aide logistique de 8 millions d’euros, en plus de son appui par le biais de la force Barkhane. Et les pays concernés, entendent racler le fond de leurs tirelires respectifs pour en sortir 10 millions d’euros chacun pour faire de la force, une réalité. Mais on est loin, et bien loin du compte. Le budget colossal nécessaire est de 423 millions d’euros annuels pour mettre la machine anti-terroriste en branle. Pour l’instant, les calculettes ne s’affolent pas, même si tous s’accordent sur la nécessité et même l’urgence de la création de la force du G5 Sahel. Le bout du tunnel sera d’autant plus difficile à atteindre que même la contribution des 5 pays du G5 Sahel peut également demeurer à l’état de simples intentions, compte tenu de la conjoncture économique précaire à laquelle ils sont confrontés, dans un environnement mondial non moins difficile. Au mieux des cas, il faut attendre la fin du premier trimestre de 2018 pour voir la force entrer réellement en action, après des réunions sur réunions.

Et pendant que le G5 Sahel et son allié français peinent à trouver le complément des 108 millions en principe déjà disponibles, les terroristes eux sont très actifs. Ils frappent sans ménagement, rendant ainsi hypothétique, tout développement de pays pauvres très endettés, où des habitants sont incapables de s’offrir les trois repas quotidiens. Parfois, c’est déjà un exploit de se procurer de quoi se nourrir une fois par jour dans une grande ville comme Ouagadougou. A cela vient se greffer la peur viscérale et constante de se faire canarder à tout coin de rue. Comme ces 18 morts du dimanche 13 août dernier, au café Aziz Istanbul, situé à quelque 200 mètres du Capuccino, cet autre établissement convivial qui fut la cible d’une attaque terroriste le 15 janvier 2016. Sans risque de se tromper, il faut reconnaître que ces deux endroits, qui rassemblent du monde sur l’avenue Kwame Nkrumah, les «Champs Elysées» burkinabè, ont fait le frais de leur fréquentation assidue par une forte clientèle d’origine occidentale.

Alors jusqu’à quand les pays du Sahel paieront-ils ce lourd tribut au terrorisme à cause de leur attachement à l’Occident? Question à 315 millions d’euros, le gap à recouvrer pour boucler le financement de l’opérationnalisation de la force du G5 Sahel qui pourrait réussir là où la Minusma a visiblement montré ses limites pendant que la française Barkhane est à la peine.

Par Wakat Séra