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Leader de l’opposition au Burkina : Zéphirin Diabré a « perdu toute légitimité » (Ablassé Ouédraogo)

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Dr Ablassé Ouédraogo, président de Le Faso Autrement (Photo Wakat Séra)

Ceci est une lettre ouverte du président de le Faso Autrement, Ablassé Ouédraogo, adressée au leader de l’opposition burkinabè, Zéphirin Diabré. Il soutient dans ce document que M. Diabré a « perdu toute légitimité à prétendre jouer le rôle de porte-parole de l’Opposition politique au Burkina Faso ».

« Monsieur le Chef de File de l’Opposition Politique,

Nous vous rappelons que par déclaration publique faite le 21 juillet 2016, le parti Le Faso Autrement a choisi librement d’appartenir et de militer au sein de l’Opposition politique burkinabè conformément aux dispositions de la loi N° 046 -2013/AN du 17 décembre 2013. Le Bureau Politique National de Le Faso Autrement était naturellement en droit d’attendre d’être invité par le CFOP à participer à ses réunions et activités afin de contribuer à l’animation collective et harmonieuse de l’Opposition.

Notre attente fut vaine, mais de guerre lasse, nous nous sommes résolus à vous contacter expressément à travers notre courrier en date du 06 septembre 2018 et réceptionnée le même jour par votre Directeur de Cabinet. A travers notre lettre nous vous demandons instamment de nous communiquer le programme des activités et concertations de l’opposition politique au Burkina Faso.

A notre grande surprise, cette demande est restée jusqu’à ce jour sans suite. Et nous vous avons encore relancé par lettre datée du 14 octobre 2019 ne voulant pas croire à un silence volontaire, mais hélas.

Notre étonnement est d’autant plus grand qu’il est établi et reconnu par tous et partout qu’aucune Opposition politique n’a jamais réussi à atteindre son objectif légitime et légal qu’est la conquête et l’exercice du pouvoir d’Etat par les urnes, si elle reste divisée et éparpillée.

Monsieur le Chef de File de l’Opposition Politique,

Votre silence face à nos demandes répétées, au-delà de son caractère inamical et discourtois, n’est rien d’autre qu’une obstruction à notre droit constitutionnellement garanti qu’est la liberté d’association et en l’occurrence la liberté d’appartenance à l’Opposition politique, ce qui est constitutif de l’abus de pouvoir. De plus, en créant de toute pièce votre prétendu cadre de concertation du CFOP (structure sans aucune existence légale donc non reconnue) dans le seul but d’empêcher certains partis pouvant vous apporter la contradiction d’avoir un accès libre à l’Institution de la République qu’est le CFOP, vous vous rendez coupable de détournement de pouvoir.

En outre l’utilisation du financement d’état pour les activités du prétendu cadre de concertation constituerait purement et simplement un détournement de fonds publics.

En effet, l’instauration de ce « prétendu » cadre de concertation du Chef de File de l’Opposition, vous a permis de le substituer à une Institution constitutionnelle et républicaine qu’est le Chef de File de l’Opposition Politique au Burkina Faso. La loi ne vous fait pas porte-parole d’un cadre de concertation mais plutôt de toute l’Opposition politique républicaine. Il va sans dire qu’on ne peut porter la parole d’un groupe de personnes morales sans un minimum d’organisation ou de concertation de tout ce groupe et donc de tous ses membres déclarés. Le silence du législateur à cet égard ne devrait donc pas être interprété comme une invitation à la ségrégation et au sectarisme.

Plus récemment, dans le cadre de la mise en place des démembrements de la CENI, nous avons constaté qu’on a fait circuler une rumeur honteuse et calomnieuse selon laquelle Le Faso Autrement ne serait pas de l’opposition. Mieux, notre parti a même été interdit avec violence de participer aux concertations entre partis de l’opposition dans certaines localités et ce, sur la base de la liste des partis membres du cadre de concertation. Il s’agit ni plus ni moins d’une manipulation grotesque et indigne de personnes responsables.

Par ailleurs, il nous est revenu que vous justifiez votre refus de nous répondre par l’appartenance du député de notre parti à un groupe parlementaire se réclamant de la mouvance présidentielle. Souffrez que nous vous rappelions l’adage populaire qui veut qu’on balaie sa propre chambre avant de trouver que la cour du voisin est sale.

Auriez-vous oublié la situation incongrue dans laquelle se trouve l’ensemble de vos députés à l’Assemblée nationale et qui vous permet de garder in extremis la tête de l’Opposition politique tout en apportant un soutien de plus d’une dizaine de voix à la majorité parlementaire ? Qui voulez-vous duper ? Pourquoi n’avez-vous pas exclu purement et simplement ce groupe de députés de votre parti, l’UPC, à défaut de les contraindre à réintégrer entièrement et tout simplement le parti et ainsi rejoindre les rangs de l’Opposition ? En entretenant savamment ce double jeu qui ne sert que vos intérêts personnels et égoïstes, vous avez perdu toute légitimité à prétendre jouer le rôle de porte-parole de l’Opposition politique au Burkina Faso.

Aussi, nous nous interrogeons sur les motivations profondes de votre attitude tendant à maintenir le parti Le Faso Autrement et d’autres partis hors de l’Opposition politique au Burkina Faso, alors qu’ils en sont membres de droit et de par leurs choix respectifs. Certains faits évidents et visibles aux yeux de tout le monde donnent cependant des explications simples. Il s’agit notamment de l’inaction totale dans laquelle vous avez plongé l’Opposition politique burkinabè depuis le début de la nouvelle législature, de la scission sournoise de votre groupe parlementaire permettant ainsi à l’UPC d’avoir un pied dans la mouvance présidentielle et l’autre dans l’Opposition, de votre grande préférence pour les négociations de salon au détriment du travail concret de terrain et enfin du fait que sous votre actuel mandat l’Opposition politique n’a pu faire de propositions concrètes et pertinentes au peuple pour sortir de la situation calamiteuse dans laquelle le régime MPP l’a plongé.

En effet, de mémoire de Burkinabè, depuis sa création en tant qu’Institution de la République, jamais le CFOP n’a autant brillé par son incapacité à mobiliser le peuple et l’aider à prendre en main son destin face à l’arbitraire. En quatre années, seulement un meeting à la maison du peuple le 29 avril 2017 et une marche meeting du 29 septembre 2018, ont été organisés, alors que tous les jours, nos concitoyens sont assassinés du fait de l’incapacité et de l’incompétence de nos gouvernants à garantir notre sécurité.

Quelles sont les propositions de l’Opposition pour sortir de cette situation ? Quelle action a été menée par l’Opposition pour amener le peuple à réclamer de ses gouvernants plus de résultats ? Il n’y en a pas eu. Mais en lieu et place de la mobilisation sur le terrain, en lieu et place du travail d’information et de sensibilisation, vous montrez votre préférence aux conciliabules avec le régime MPP et aux simulacres de dialogue politique.

Au cours de la présente mandature, deux activités publiques ont été organisées pourtant chaque année, vous percevez des millions de francs d’argent public. Est-ce pour votre silence et votre inaction que l’argent du contribuable Burkinabè vous est versé ? L’obligation de reddition des comptes vaut pour toutes les Institutions de l’Etat. A cet effet, vous devriez rendre publics les bilans financiers et comptables de votre gestion pour des besoins de transparence et de redevabilité.

Tout ce qui précède porte à croire et renforce même l’idée selon laquelle vous seriez un agent du pouvoir MPP infiltré au sein de l’Opposition politique burkinabè avec pour mission essentielle de contenir l’Opposition et d’aider le Président Roch Marc Christian Kabore à asseoir son pouvoir et ainsi de lui tracer un boulevard pour sa réélection en 2020. Sans être dupe, nous osons croire ou espérer que cette assertion se révèle fausse. En tout état de cause, et dores et déjà, votre responsabilité dans les difficultés et les malheurs du peuple burkinabè est entière.

La complicité de non-assistance à peuple en danger sera immanquablement requise contre vous devant le tribunal de l’histoire dont la sentence est toujours juste et sans appel. Pour l’heure, vous pourriez tenter de vous racheter et faire acte de pénitence en démissionnant de votre poste de Chef de File de l’Opposition burkinabè afin de lui permettre de se réorganiser pour offrir au peuple une alternative crédible au régime MPP dont la carence et l’échec lamentable ne sont plus à démontrer mais qui malheureusement grâce à vous, risque de faire un pied de nez à toute une nation en souffrance. Le peuple burkinabè ne mérite pas cela.

Veuillez agréer, Monsieur le Chef de File de l’Opposition Politique, l’expression de notre considération distinguée. »

Dr. Ablassé OUEDRAOGO

Commandeur de l’ordre National