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NOUVEL AFRIQUE – NOUVELLE GENERATION/“Kung-fu dans les Hémicycles africains: 1er prix du FESPACO?“

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Madina Tall

C’est la palme d’or décernée à l’unanimité aux élus africains. Véritable long métrage réalisé au cœur du tatami des parlements, vous êtes conviés à un récit emblématique où se cristallisent règlements de comptes, divergences d’opinions à coups d’arts martiaux et luttes sénégalaises entre d’honorables acteurs, dignes disciples de  Mohammed Ali, Mike Tyson ou Daba Modibo Keita!

Loin de notre vision d’un parlement à l’ambiance calme ou souvent morose, aux élus avec un langage policé et une posture sereine, ces scènes surréalistes de violences sont une tache sur la démocratie africaine et souillent l’exemplarité dont doit jouir les élus de la nation.

En dépit des violences verbales, de l’agressivité politique et des tensions entre majorité et opposition, on en viendrait à croire que les parlements de la rue (types: agoras ou congrès patriotiques en Côte d’Ivoire, les Grins de Bamako, les Fadas de Niamey, les parlementaires debout de Kinshasa) sont les dépositaires de la souveraineté du peuple malgré leur légitimité moins reconnue au regard de leurs structures et modes de fonctionnement souvent fugaces ou pérennes.

Mais les tensions dans nos hémicycles ne sont-elles pas l’illustration parfaite de cette divergence entre ces élus dont certains, issus de l’arbitraire de l’exécutif pour la défense farouche de leurs intérêts respectifs?

Devons-nous remettre en cause, le parlementarisme si politique et si violent tendant à saper les intérêts des citoyens, à dénaturer la fonction de parlementaires et à conduire dangereusement à l’échec de la mission première des parlementaires quand on sait que la corruption et la politique du ventre sont une cruelle réalité?

En pratique oui, mais en théorie non, car, cela reviendrait à rejeter en partie la démocratie parlementaire et exclure le peuple de la vie de la nation alors même qu’aucun autre modèle ne peut représenter une alternative en cas de déchéance.

Il est indéniable que même dans le meilleur des mondes, on ne  saurait rendre disparate les oppositions et contradictions qui font d’ailleurs tout le charme et la diversité de nos sociétés.

Il faudrait peut-être revenir à une certaine neutralité et redonner toute sa quintessence à l’hémicycle comme lieu de débats, d’argumentations et surtout de compétences multiples et à appliquer effectivement le arsenal de sanctions prévues par le code de conduite parlementaire, de sorte à éviter l’excès de zèle chez certains.

Implicitement, cela pose la question de l’effectivité du contre-pouvoir face à l’exécutif comme l’aurait voulu Montesquieu dans sa théorie de la séparation des pouvoirs (Esprit des lois, 1748).

Cette attitude parlementaire se traduit par la crainte de l’épée de Damoclès, laquelle épée est au service semble-t-il de la stabilité politique du puissant exécutif.

En vérité, ces “engraissés de la République“ doivent se maintenir à la hauteur des attentes du peuple sur les questions essentielles. Ils sont élus et payés par le contribuable pour défendre intégralement les intérêts de celui-ci et non pour défendre leurs sièges. Leurs statuts déjà budgétivores pour la poche du citoyen, ne doivent pas être renchéris de frais pour invectives, coups et blessures volontaires, frappes chirurgicales, crochets dévastateurs et autres.

L’assurance citoyenne refuse pareille ordonnance!

Heureusement, certains sont biens entraînés, d’autres ont les jarrets solides pour disparaître quand le face à face devient inévitable.

Comme l’affirmait Tierno Monénembo, «l’Afrique n’intéresse que quand elle est scandaleuse» et ce n’est certainement pas du sous-développement qu’on parle, mais de “pseudos -représentants du peuple“ qui profitent de cette couverture parlementaire.

Fin du film, tonnerre d’applaudissements à Ouagadougou…

Doit-on en rire ou s’en inquiéter?

Moi, j’en pleure.

Tall Madina