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Procès du putsch manqué: expression de douleur et amertume à la barre

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A la suite de la présentation des pièces à conviction, place a été donnée au passage, devant la Chambre de jugement du tribunal militaire, des victimes du coup d’Etat manqué du 16 septembre 2015. Ce mardi 9 avril 2019, près d’une trentaine de blessés et de parents de personnes décédées, du fait du putsch dont les éléments de l’ex-Régiment de sécurité présidentielle (RSP) sont les présumés auteurs, ont relaté les circonstances dans lesquelles, ils ont subi la furie de ces éléments. Ce fut une expression de douleur et d’amertume qui a été donnée de constater au cours de l’audience de ce jour.

Dès l’ouverture de l’audience, l’un des conseils de la partie civile, Me Prosper Farama a souhaité la tenue d’«une conférence d’audience» en vue de mieux encadrer le passage des victimes constituées partie civile, qui sont près de 300. Cette «conférence d’audience» devra permettre également de voir dans quelle mesure le nombre des intervenants qui passeront à la barre pourrait être réduit. Une proposition qui n’a pas rencontré d’opposition.

Après la «conférence d’audience» qui a réuni uniquement les membres du tribunal, le parquet, les conseils de la partie civile ainsi que ceux de la défense, le tribunal a annoncé le passage d’une soixantaine de victimes et parents de victimes.

Des propos de la plupart des victimes, il ressort qu’il y a eu des tirs à bout portant et des balles perdues qui ont causé des blessés et des morts. Certaines personnes passées à la barre, ont été touchées le 17 septembre 2015, après la proclamation de la prise du pouvoir par l’ex-RSP.

Les victimes ont tous décrit des militaires en cagoule qui circulaient en ville, qui à bord de véhicules V8 de couleur noire, qui avec des motos. Ils étaient munis de kalachnikov et de pistolets automatiques, à en croire les dires des victimes.

Des manifestants tout comme des non-manifestants ont dit avoir été bastonnés, certains ont parlé de fusillades et d’engins brûlés par des éléments de l’ex-RSP. Une des victimes aurait retenu un nom qui aurait été prononcé quand il était manœuvré. Il s’agit du «chef Nébié». «Je ne vais jamais oublier ce nom. Quand j’ai entendu ce nom, je me suis dit, voilà quelqu’un qui est en train de tuer son parent sans le savoir», a confié cette victime.

Une victime, Adama Compaoré, employé de commerce, qui a affirmé ne pas faire partie des des manifestants, a raconté qu’il a été traîné comme un voleur, le 17 septembre 2015, vers le « marché de dix », par des éléments de l’ex-RSP. Après lui avoir intimé l’ordre de se coucher à plat ventre, ils ont tiré une balle dans sa cuisse gauche, a dit la victime. Abdoul Kader Nikiéma, lui aussi employé de commerce, a dit également ne pas faire partie des manifestants mais a reçu une balle au cou et a perdu beaucoup de sang. Il a affirmé qu’il était allé expédier des articles et c’est au retour, pendant qu’il circulait, qu’il a été victime d’un tir. Il serait resté dans le coma durant trois mois. « Actuellement, je ne peux pas dormir la nuit. Je ressens des douleurs. je suis traumatisé », a déclaré M. Nikiéma.

Boukary Yelnogo, dont le frère a été tué devant l’école de la douane, a fondu en larme à la barre. Une émotion que le parquet a dit comprendre.

Le coup d’Etat du 16 septembre 2015, a arraché aux familles Kologo et Sédogo, leurs uniques fils respectifs. Apollinaire Kologo, l’unique fils de son père et de sa mère aurait reçu quatre balles. Quelque temps après, est intervenu le décès de son père qui ne se serait pas remis du choc, à la suite de la perte de son enfant.

Une des victimes a lancé un appel à l’endroit des accusés, leur demandant d’éclairer les gens sur ce qui s’est passé. «Même s’ils vont écrire des mémoires, qu’ils le fassent pour ne pas mourir avec la vérité», a dit la victime qui aurait reçu une balle à l’épaule.

L’audience a été suspendue vers 17h et reprend demain mercredi 10 avril 2019.

Par Daouda ZONGO