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Sanctions de la CEDEAO contre le Mali: le colonel Goïta cherche de l’air

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Le colonel Assimi Goïta engage le Mali dans un bras-de-fer avec la Côte d'Ivoire

Le ton ne cesse de monter du côté de Bamako, contre la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) qui a pris diverses sanctions ayant pour but de ramener la junte militaire malienne à remettre le pouvoir aux civils. Pour ce faire, les dirigeants de la sous-région avaient recommandé au colonel Assimi Goïta et son gouvernement de revoir ce chronogramme ahurissant, qui évoque une transition de 5 ans, alors qu’un deadline avait été fixé au 27 février prochain, pour l’organisation d’élections ouvertes au Mali. Les militaires ayant changé les règles en plein jeu, ont, du coup, transformé la transition en un quinquennat, après déjà plus de 12 mois passés au pouvoir. Leur donner le blanc-seing dans une Afrique confrontée déjà aux coups d’Etat au Tchad, au Soudan, en Guinée et bien entendu au Mali, serait ouvrir le boulevard aux régimes d’exception en téléchargement au détriment des exemples de démocratie qui commencent à s’installer, malgré le chemin ô combien difficile pour un continent où la mal gouvernance et l’oppression des peuples par leurs dirigeants ont la peau dure.

En tout cas, au prix d’une manipulation dont ils ont le secret, les dirigeants de la transition malienne ont fait croire aux populations que les sanctions ont été instaurées pour asphyxier leur pays et que la CEDEAO n’est que la main visible de la France. Le sentiment anti-Occident ayant enflé, faisant monter plus que jamais la côte du colonel putschiste, le peuple versatile à souhait, semble avoir oublié que les putschs militaires sont une gangrène pour les droits humains. Malheureusement, du fait de la propagande de certaines puissances qui entendent bien mettre à profit cette situation délétère pour s’installer en tant que nouveaux maîtres du Mali, l’effet domino s’empare de la sous-région. Même au Burkina Faso où ils se sont farouchement opposés au putsch manqué de septembre 2015, certains ont pris fait et cause pour le colonel putschiste, poussant le ridicule très loin, en comparant Assimi Goïta au révolutionnaire Thomas Sankara, héros de toute une jeunesse africaine. C’est donc sur ce soutien, qui se nourrit allègrement de l’amalgame entretenu à dessein avec la lutte contre la présence française et le franc CFA, que le putschiste Assimi Goïta surfe pour s’éterniser au pouvoir qu’il a arraché au président démocratiquement élu et réélu, Ibrahim Boubacar Keïta alias IBK, dont le Mali pleure la mort depuis ce dimanche.

Pour aller jusqu’au bout de cette aventure singulière dans laquelle il a embarqué une bonne partie du peuple, le colonel malien qui pourrait compter, à l’occasion sur les services de son voisin et frère d’arme, Mamady Doumbouya, encore un colonel putschiste dont le pays est suspendu des entités de la CEDEAO, fait faire le tour des capitales voisines à ses émissaires, dans le but de desserrer l’étau autour de son régime de transition qui s’offre une longévité indécente. Mais, en dehors de ceux à qui profitent le crime, les dirigeants sollicités sauront sans doute distinguer le bon grain de l’ivraie, sachant qu’encourager le putschiste malien, c’est mettre, eux-mêmes en péril, leurs pouvoirs. De plus, si on est tous d’accord que les Africains doivent se libérer de la servitude, ce serait dangereux de cautionner ce saut dans l’inconnu que s’apprête à faire faire à l’ancien empire de Soundiata Keïta, le colonel Assimi Goïta qui dit vouloir sortir le Mali de la tutelle française, mais paradoxalement le jette dans les griffes d’un autre maître au palmarès bien fourni d’actes de prédation.

Il est temps que, la CEDEAO et le Mali revienne sous l’arbre à palabre, les guerres les plus longues finissant toujours autour de la table des négociations. Ainsi, au vu de nouvelles propositions raisonnables sur la durée d’une transition, la CEDEAO qui l’a d’ailleurs promis, devrait alléger sa main qui a été trop lourde, pour punir pour l’exemple. L’Algérie qui doit pouvoir constituer un bon médiateur dans cette crise propose, par exemple, «un dialogue serein et réaliste» digne pour les deux positions encore conciliables, contrairement aux déclarations belliqueuses de va-t-en guerre en manque de publicité. Le président algérien Abdelmadjid Tebboune avec des mots empreints d’une logique indéniable a, du reste, émis le vœu que cette année 2022 soit celle de l’instauration de l’ordre constitutionnel au Mali, avec une transition qui tienne entre 12 et 16 mois.

La voix de l’Algérien portera-t-elle jusque sur les bords du Djoliba voisin? Pour le moment, Assimi Goïta se plait bien dans sa logique belliciste, convaincu que c’est le seul moyen pour lui de garder ce pouvoir usurpé par les armes, alors que la constitution du Mali privilégie les urnes comme moyen de sa dévolution.

Par Wakat Séra