Accueil Editorial Amnistie de Simone Gbagbo: mieux vaut tard que jamais!

Amnistie de Simone Gbagbo: mieux vaut tard que jamais!

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Simone Gbagbo bientôt libre (DR)

Amnistie pour Simone Gbagbo. La bonne nouvelle vient de Alassane Ouattara qui profite de la fête de l’indépendance ce mardi 7 août en Côte d’Ivoire pour accomplir sa bonne action de libérer près de 800 prisonniers politiques dont Simone Gbagbo et l’ancien ministre de la Défense Lida Kouassi. Cette BA à l’endroit de l’ex première dame ivoirienne, est un véritable coup de tonnerre dans le ciel ivoirien. Jugée et condamnée, il y a trois ans de cela, à 20 ans de prison, l’épouse de l’ancien président ivoirien, Laurent Gbagbo, devrait bientôt respirer l’air de la liberté dont son conjoint, toujours incarcéré dans les geôles de la Cour pénale internationale, lui en demeure privé. Si les autorités ivoiriennes s’étaient opposées à l’envoi de ce colis bien encombrant à La Haye, ce n’était certainement pas pour les beaux yeux, honni soit qui mal y pense, de Simone Ehivet Gbagbo, accusée d’atteinte à l’autorité et à la sûreté de l’État. C’était plutôt pour diviser la poire en deux et faire croire à l’opinion que la Côte d’Ivoire ne faisait pas dans l’acharnement sur le couple Gbagbo. Et surtout faire accepter à la communauté internationale que la justice ivoirienne était en mesure de juger les acteurs de la crise post-électorale, histoire d’en faire une machine sélective qui ne broie que du pro-Gbagbo. Portant bien son surnom de Dame de fer à l’époque de braise qu’a vécue la Côte d’Ivoire, Simone était une terreur, mais autant que nombre de personnes qui, elles, auront la chance de figurer dans le camp d’en face. Car c’est bien une justice des vainqueurs qui a conduit à un acharnement sans commune mesure contre les pros-Gbagbo, Souleymane Kamagaté Koné, étant comme un intrus qui s’est glissé dans cette liste d’amnistiés, composée des proches de Laurent Gbagbo.

S’il vaut mieux tard que jamais pour bien faire, on ne peut qu’applaudir ce geste de Alassane Ouattara même si loin d’être un acte de magnanimité, il constitue une manière de lâcher un peu de lest pour essayer de faire baisser la pression de la cocotte-minute ivoirienne, à deux ans de l’élection présidentielle. Lâché par ses «amis» de l’aile Henri Konan Bédié du Parti démocratique de Côte d’Ivoire-Rassemblement démocratique africain (PDCI-RDA), en bisbilles très profondes avec son président de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro, et surtout boudé par une partie importante de ceux qui ont favorisé sa prise de pouvoir à l’époque et voués désormais aux gémonies par les nouveaux maîtres d’Abidjan, Alassane Ouattara n’avait plus vraiment d’autre choix. Il lui fallait desserrer l’étau autour de lui pour espérer une fin de mandat moins turbulent. Même s’il a fait démenti ses contempteurs qui lui prêtaient à raison de vouloir tenter un troisième mandat, le ver est déjà dans le fruit, et bien malin qui trouvera le moyen de le déloger sans clash entre anciens et nouveaux amis politiques de la Côte d’Ivoire. Même la libération de Soul to Soul, un proche de Guillaume Soro, poursuivi et incarcéré dans une affaire de cache d’armes suite aux mutineries de 2017 pourrait bien sonner comme le pompier après l’incendie.

N’est-ce pas trop tard pour sauver le soldat Ouattara, même si en politique, il est conseillé de ne jamais dire jamais. Dans ce monde de tous les possibles, où les anciens ennemis deviennent des alliés et que les anciens alliés se transforment en redoutables adversaires, le chef de l’Etat ivoirien, pourrait bien se trouver une bouée de sauvetage. Toute chose qui lui éviterait de vendanger les acquis socio-économiques que la Côte d’Ivoire a engrangés sous son premier mandat et le deuxième finissant. En tout cas, Guillaume Soro qui fera sa rentrée à l’Assemblée nationale le jour de la sortie probable de son protégé de prison, est l’homme politique le plus acculé actuellement par son camp d’avant mais aussi le mieux en posture de se tirer de cet embrouillamini politique sans perdre trop de plumes. Pourvu que la Côte d’Ivoire ne retombe pas dans ce drame militaro-civilo-politique qui en avait fait un brasier dans la sous-région. A quand le règlement du cas Laurent Gbagbo si tant est que Abidjan cherche à renouer les fils de la réconciliation nationale et «vraie» pour emprunter le mot à Alassane Ouattara?

Par Wakat Séra