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Attaques au Burkina: pourquoi?

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photo d'illustration

Pourquoi encore le Burkina? C’est la grosse interrogation qui taraude actuellement les Burkinabè, autorités comme citoyens lambda dont le pays est entré depuis 2014, dans un cycle d’attentats terroristes aussi meurtriers les uns que les autres. Qu’ils aient pour théâtres le Sahel ou la capitale burkinabè, les attaques rivalisent par le nombre des morts et des blessés. Mais plus que la comptabilité macabre qui les caractérisent, c’est l’acharnement soudain des assaillants à prendre pour cible le Burkina Faso, qui, jusque-là jouissait d’un statut de privilégié d’intouchable, dans un sahel africain et une sous-région ouest-africaine qu’écument à souhait, des groupes terroristes proches d’Al Qaida au Maghreb islamique, ou de Daesh. Qu’ils s’appellent Ansar Eddine, Al-Mourabitoune, Ansar al-Charia, Boko Haram ou Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) qui vient de revendiquer le double attentat de Ouagadougou qui a pris pour cible, le vendredi 2 mars, l’ambassade de la France et l’Etat-major général des armées, ces mouvements aux desseins sombres ne se ressemblent que par la barbarie avec laquelle ils opèrent. Les Burkinabè en ont une fois de plus eu la preuve, par la violence des assauts qui ont transformé le quartier général de l’armée burkinabè en un vaste champ apocalyptique.  Le Burkina victime collatérale d’une vengeance du GSIM qui affirme avoir agi en représailles d’une action menée en février dans le nord du Mali par l’armée française et dans laquelle plusieurs lieutenants du mouvement de Iyad Ag Ghali avaient trouvé la mort?  Question.

Et c’est pour partager cette douleur nationale qui fait désormais partie du quotidien des Burkinabè ébranlés mais pas coulés, que les présidents togolais, Faure Gnassingbé et nigérien, Mahamadou Issoufou, respectivement présidents en exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) et du G5 Sahel ont séjourné à Ouagadougou. Les chefs d’Etat, au-delà de perpétuer la tradition africaine qui est de vivre les joies et les peines du voisin ne font que chercher à consolider le bloc commun contre le cancer devenu planétaire du terrorisme. Mais s’ils ont réussi peut-être à sécher les larmes encore chaudes qui tombent sur les 7 cadavres des vaillantes Forces de défense et de sécurité du Burkina, ils sont loin d’avoir calmé la soif des Burkinabè de comprendre ce qui se passe et surtout de quoi demain sera fait. Si la vie a presque repris son cours normal à Ouagadougou, il n’en demeure pas moins que la psychose tant redoutée s’installe. La moindre déflagration ou la plus petite des rumeurs d’attentat suffisent pour semer la panique. Il est évident que sans le savoir, les Burkinabè, à raison tout de même, entrent dans le scénario des terroristes dont le but est de déstabiliser l’ordre établi et ce faisant mettre toute la population sous coupe réglée.

En attendant de savoir si nos héros, morts au front, surpris par des «bandits lâches», bénéficieront d’obsèques nationales, marqués par le traditionnel «deuil de trois jours» ou plus, c’est la peur qui est l’ennemi premier à combattre. Et pour cela il faudra continuer à vivre comme avant, tout en sachant que plus rien n’est comme avant. Dilemme à première vue compliqué mais qui peut être résolu en rendant chacun de nous combattant contre le terrorisme, dans l’esprit et les actes. Comme le préconise le syndicat de la police burkinabè, il faut mener «une veille constante». Compter sur les seules autorités visiblement débordées par le mal et qui ne savent plus où donner de la tête, sera l’erreur fatale à ne pas commettre. Il est même prioritaire de sortir des rengaines de condamnation éculées, des jérémiades sans fin et les accusations sans fondement qui se jouent sur des airs de règlements de compte haineux pour s’abriter derrière des remparts comme le patriotisme dans l’unité nationale. Même des alliés historiques dans la lutte contre le terrorisme, comme la France, pour ne pas la citer, à qui il est reproché sur les réseaux sociaux et dans des discours enflammés d’avoir servi la cause terroriste dans l’attaque de l’Etat-major, en prennent pour leur grade. Non, il faut rassembler les énergies pour remporter cette guerre, aussi asymétrique qu’elle soit, afin de convaincre une fois de plus l’ennemi, qu’entre «la Patrie ou la mort, nous vaincrons».

Par Wakat Séra