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Barkhane: vers le face à face entre Macron et dirigeants du G5 Sahel

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Des soldats français dans le sahel africain (Ph. defense.gouv.fr)

A l’issue d’un sommet de l’Otan tenu à Watford, non loin de Londres, en Angleterre, le président français a jeté les pieds dans le plat en annonçant qu’il conditionnera le maintien de Barkhane dans la région du Sahel par un positionnement sans ambiguïté, de la part des pays de cette région où la force française est engagée dans la lutte contre le terrorisme. Morceaux choisis, selon nos confrères de Reuters: «J’attends d’eux qu’ils clarifient et formalisent leurs demandes à l’égard de la France et de la communauté internationale». Le locataire de l’Elysée sans doute excédé par le fort sentiment anti-français qui ne fait que monter dans ces pays où les soldats français combattent les terroristes, est on ne peut plus clair dans ses propos. «Souhaitent-ils notre présence et ont-ils besoin de nous?». Interrogation de Emmanuel qui attend de la part des dirigeants de la Mauritanie, du Tchad, du Niger, du Burkina Faso et du Mali, pays membres du G5 Sahel, «des réponses claires et assumées sur ces questions». Acculé par l’opinion française et jugeant sans doute incompréhensible ce fort sentiment anti-français alors que ses troupes enregistrent des pertes en vies humaines, dont la plus importante fut de 13 morts le 25 novembre dernier au Mali dans une collision d’hélicoptères de l’armée française au Mali, Macron a exprimé son ras-le-bol et peut-être un sentiment d’impuissance dans une lutte qui devient comme sans fin. «Je ne peux ni ne veux avoir des soldats français sur quelque sol du Sahel que ce soit à l’heure même que l’ambiguïté persiste à l’égard de mouvements anti-français, parfois portée par des responsables politiques», a affirmé le président français, qui dévoile ainsi le rôle, avéré ou faux, de dirigeants dans l’amplification du sentiment anti-français.

En tout cas, en les invitant le 16 décembre prochain à Pau, ville française, où est basé le régiment d’où sont partis la plupart des 13 soldats français morts le 25 novembre dernier, Emmanuel Macron veut de la part des chefs d’Etat du G5 Sahel, «des réponses précises» sur les questions qu’il a soulevées. «Leurs réponses sont aujourd’hui une condition nécessaire à notre maintien», a annoncé le président français. Quelle sera l’attitude des dirigeants africains face à cette sortie de Emmanuel Macron? En tout cas, il faut que ceux qui nous dirigent saisissent cette opportunité pour dire tout de même au «grand sachem» que plus que la France, les armées nationales des pays du G5 Sahel sont endeuillées au quotidien par cette lutte contre le terrorisme. Certes, un mort est toujours de trop et on ne peut que pleurer avec la France la quarantaine de ses fils tués au Sahel dans ce combat contre le terrorisme qui s’éternise, mais les Forces de défense et de sécurité, du Mali, du Burkina Faso, du Niger et du Tchad ne sont même plus en mesure de compter leurs morts, de vaillants soldats tombés courageusement dans une guerre où la puissance de feu de l’ennemi est toujours plus forte. Les dirigeants du G5 Sahel doivent pouvoir dire à Macron que ce sont des milliers de civils et militaires de leurs pays qui sont morts par la faute des attaques terroristes qui font également des milliers de déplacés dans leurs propres pays. Ils doivent également être en mesure de montrer au président français que la lutte de longue haleine contre le terrorisme qui a mis à genoux les économies et l’éducation dans leurs pays est un «same fight» pour la France et le Sahel, surtout que ce sont des intérêts et des ressortissants occidentaux qui sont le plus dans le viseur de ces nombreux groupes djihadistes que ceux qui nous gouvernent appellent «individus armés non identifiés».

En tout cas, Emmanuel Macron n’a pas tort de demander une clarification car la question est là, plus pertinente que jamais: seuls et sans l’aide de Barkhane, les pays du G5 Sahel aux armées pour la plupart en pleine reconstitution, aux frontières poreuses, aux territoires minés par les conflits inter-communautaires, aux économies exsangues, et gérés par des dirigeant dont la préservation du fauteuil est la seule préoccupation, peuvent-ils venir à bout du terrorisme? Une chose est certaine, même si la formule d’invitation rappelle les temps coloniaux, il importe de discuter en mettant de côté, pour la France tout esprit paternaliste, et pour les Africains cette passion et ce nationalisme exacerbés d’un autre siècle.

Par Wakat Séra