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Burkina: des journalistes dénoncent le deux poids deux mesures de la justice

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Des associations professionnelles de journalistes, à travers cette déclaration, réclament justice pour les médias et les acteurs qui y travaillent. Ils dénoncent le deux poids deux mesures qui prévaut pour les dossiers en justice qui fait diligence pour juger les journalistes et qui a du plomb dans les ailes quand il s’agit de plaintes déposées par les journalistes.

Nous avons aussi droit à la justice !

Le lundi 1er mars 2021, le Parquet du Tribunal de grande instance de Ouagadougou a requis contre le journaliste Yacouba Ladji Bama une peine de deux mois de prison et une amende de 250 000 F CFA,  le tout assorti de sursis. Yacouba Ladji Bama, Rédacteur en chef du journal Courrier confidentiel est poursuivi pour diffamation, suite à une plainte du parti au pouvoir, le   Mouvement du Peuple pour le Progrès (MPP). Dans un post sur sa page Facebook daté du 16 décembre 2020, Yacouba Ladji Bama soupçonnait le parti au pouvoir d’être lié à la tentative d’assassinat qui l’a visé alors qu’il revenait de Dori le 10 novembre 2020, après une conférence publique sur la corruption électorale.

L’on se rappelle qu’au lendemain de cet incident, Yacouba Ladji Bama avait porté plainte contre X  pour tentative d’assassinat au Commissariat de Bogodogo  (Ouagadougou) et que le dossier n’a pas encore abouti.

En janvier 2020 déjà, le domicile de Yacouba Bama était la cible d’une attaque au cocktail Molotov. La plainte consécutive à cette autre affaire reste également dans les tiroirs de la justice, sans suite.

En 2020, plusieurs autres journalistes ont subi des attaques donnant lieu à des plaintes demeurées jusque-là sans nouvelles :

  • Sery Baoula, Journaliste à la RTB/Radio dont le domicile a essuyé des tirs en décembre 2020,
  • Siriki Dramé, Secrétaire général du Syndicat autonome des travailleurs de l’information et de la culture (SYNATIC), en novembre 2020,
  • Marcel Ouoba, Directeur de publication de Gulmu.info dont le domicile a essuyé des tirs à Fada en avril 2020,
  • Cambriolage du siège des éditions Faso actu en décembre 2020,
  • Cambriolage du siège du Journal Le Reporter en août 2019.

Certains dossiers remontent à plus de 20 ans, c’est notamment le cas emblématique de l’assassinat de Norbert Zongo et de ses compagnons.

Il y a plus de 10 ans, le journal Le Reporter  portait plainte après avoir reçu des menaces de mort suite à la publication d’articles sur les villas de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) que des membres du gouvernement avaient acquis à crédit et qu’ils ne remboursaient pas.

Depuis 1998, nous ne comptons pas les journalistes qui sont passés à la barre. Les journalistes et les médias sont agressés, menacés. Mais depuis, rares sont les journalistes à qui justice a été rendue dans le cadre de l’exercice de leur profession.

Le jour où la justice du Burkina Faso va s’assumer et mettre un visage sur un seul cas de crime  contre un journaliste, nous sommes certains que beaucoup d’apprentis sorciers n’oseront plus franchir le pas.

En attendant ce « jour historique » pour ne pas dire « procès historique », nous nourrissons le sentiment légitime d’un abandon entre les mains de nos agresseurs par la justice de notre pays. Seul un signal fort peut changer ce sentiment largement partagé dans la corporation, surtout lorsque nous voyons la diligence avec laquelle les plaintes contre les journalistes sont instruites et vidées.

A chacune des atteintes  à la liberté de la presse, nous n’avons de cesse de fustiger le silence des autorités politiques, administratives et judiciaires, devenu la règle. C’est le cas pour la demande d’audience adressée au ministre de la Sécurité en décembre 2020 suite à la récurrence des menaces et agressions contre les journalistes.  C’est le lieu pour nous de :

  • Condamner les agressions contre les journalistes d’où qu’elles viennent,
  • Exiger vérité et justice pour tous les journalistes agressés dans l’exercice de leur profession,
  • Signifier aux officiers de police judiciaires, aux procureurs, aux juges d’instruction et aux juges que nous avons aussi droit à la « Justice », c’est-à-dire de connaitre les visages de nos agresseurs et de les voir répondre de leurs actes.

Halte à l’impunité des crimes commis contre les journalistes !

N’an Lara, an sara !

Ouagadougou, le 8 mars 2021

Pour le Centre national de presse Norbert Zongo

Le Président du Comité de pilotage

Inoussa Ouédraogo

Pour l’AJB,

Le Président

Guézouma Sanogo

Pour la SEP,

Le Président

Boureima Ouédraogo

Pour le SYNATIC,

Le Secrétaire général

Siriki Dramé