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Burkina: la révolution agricole, une réalité sous le président Traoré?

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Le président de la Transition burkinabè, le capitaine Ibrahim Traoré

Le capitaine Ibrahim Traoré, nouveau leader du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR), a évincé le dimanche 2 octobre 2022, le président de la Transition burkinabè, le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, exilé au Togo. Le nouvel homme fort du Burkina avait clairement signifié dans plusieurs de ses sorties que lui et ses camarades sont venus pour reconquérir l’intégrité du territoire national, occupé par endroits par des terroristes, et pour faire du développement, une réalité au Faso. Sur le deuxième point, on note une lisibilité dans les propos et les actes que pose le capitaine qui veut notamment redonner au système agricole du pays des «Hommes intègres», ses lettres de noblesse. Alors, peut-on croire que la révolution agricole sera une réalité sous le président Ibrahim Traoré?

Le capitaine Ibrahim Traoré et ses fidèles ont mis fin au règne du lieutenant-colonel, Paul-Henri Sandaogo Damiba en évitant de justesse lors des évènements du coup d’Etat qui s’est déroulé du 30 septembre au 2 octobre, un affrontement entre des frères d’armes. Sur la lutte contre les attaques terroristes et les autres phénomènes de banditisme, la nouvelle équipe du Mouvement patriotique pour la Sauvegarde et la Restauration (MPSR) rejoint le groupe du président démis pour en faire la priorité des priorités du moment vu que le pays traverse une catastrophe humanitaire avec plus de deux millions de Personnes Déplacés Internes (PDI). Mais, le chef de l’Etat Ibrahim Traoré, en plus de cette préoccupation, veut faire aussi de la question du développement, plus précisément de la révolution, son cheval de bataille.

«Nous avons écrit plusieurs documents pour que l’Armée participe au développement de cette nation. Il faut révolutionner notre production, il faut révolutionner notre agriculture. On conquiert les terres, on les installe et on les aide à produire pour qu’on ne soit pas dépendant de l’extérieur. Nous avons des terres (bien fertiles, NDLR), nous pouvons produire. Donc c’est tout notre combat comme ça», a déclaré le capitaine Ibrahim Traoré sur les ondes de la radio Oméga, le samedi 1er octobre. «Lorsque nous rentrons dans la brousse et que nous voyons des Burkinabè, comme dans les images qu’on voit en Somalie, la peau sur les os, ça fait pleurer. On n’arrive pas à supporter ça. On demande à ce qu’on change de contexte et ça ne change jamais. Ca nous pose énormément problème», avait soutenu celui que les assises nationales ont confirmé président le 14 octobre dernier.

Comme pour donner un cachet indélébile à ses déclarations, son idée de la révolution agricole, le président du Faso, lors de la tenue de son tout premier Conseil des ministres, tenu mercredi 9 novembre 2022, a validé un rapport relatif à l’adoption d’un plan opérationnel d’appui à la campagne agricole de saison sèche 2022-2023. Et, le coût prévisionnel de ce plan opérationnel est de «10 624 603 326) F CFA dont 8 140 019 716 F CFA déjà mobilisés», précise la note du Conseil des ministres.

Ce plan permettra entre autres, la sécurisation de barrages, la mise en valeur agricole de grands périmètres irrigués de plus de 100 hectares, la mise en valeur agricole de petits et moyens périmètres irrigués de moins de 100 hectares ainsi que la réalisation et la mise en valeur de périmètres irrigués autour de forages à gros débit, sur 250 sites déjà aménagés et 100 nouvelles fermes agricoles. Mais, souligne le rapport de la réunion hebdomadaire du Gouvernement, au-delà des objectifs de production, ce plan s’intègre dans la vision globale de reconquête du territoire à travers la création d’opportunités pour l’ensemble des acteurs, en particulier pour les jeunes et les personnes déplacées internes.

«Le combat que nous menons, c’est pour le Burkina Faso. Il faut aller dans les fins fonds du Burkina pour comprendre certaines choses. Moi je patrouille dans la brousse avec mes hommes. Il y a des villages, quand vous arrivez, les hommes mangent des feuilles (faute de céréales)», s’était offusqué le chef de l’Etat, le capitaine Ibrahim Traoré, lors d’une interview le 1er octobre dans la soirée. «On propose des solutions qui pourraient nous permettre de produire et de protéger et rendre dignes ces gens-là, on ne nous écoute pas», avait-il regretté.

Le président de la Transition burkinabè, investi le 21 octobre devant les sages du Conseil constitutionnel, dans son discours officiel prononcé à l’endroit de la population, a indiqué que «nos objectifs au-delà de la reconquête de nos territoires occupés ne sont autre que de donner un souffle de vie nouveau à tous nos compatriotes affligés par la double crise sécuritaire et humanitaire». A cette cérémonie solennelle retransmise par les chaînes radio et télévisions nationales, le capitaine Traoré a saisi l’occasion pour réitérer à son peuple, l’un des points de développement qui lui tient à cœur. L’objectif du MPSR, deuxième version, «est aussi d’envisager un développement endogène en ne comptant que sur nous-mêmes et en essayant de repenser profondément notre agriculture, notre élevage et notre technologie et en interrogeant donc les socles des actions de nos aspirations à la prospérité».

Selon la vision du président, il faut travailler à ce que le Burkina Faso recouvre sa souveraineté alimentaire. Cela aura pour double avantage de juguler le problème de l’alimentation des PDI et par ricochet rendre le coût de la vie supportable pour toute la population.

Situé au cœur de l’Afrique de l’Ouest, le Burkina Faso, enregistre depuis 2019, plus de 20 millions d’habitants, d’une soixantaine d’ethnies vivant essentiellement de l’agriculture et de l’élevage. Le pays a connu sous la période coloniale, une profonde transformation en matière agricole. En effet, cette période a habitué les Burkinabè à faire des productions dites de rentes destinées essentiellement aux pays occidentaux, comme le coton.

Pays enclavé, le Burkina continue, depuis son indépendance (1960) de vivre cette situation qui lui impose d’importer de quoi se nourrir, au point d’y consacrer presque toutes ses énergies et ses ressources financières. Seule une parenthèse, entre 1984 et 1987 a donné l’espoir d’une souveraineté alimentaire grâce à une profonde réforme agraire menée par le président, feu le capitaine Noël Isidore Thomas Sankara.

Par Bernard BOUGOUM