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Caravane «Nos voix pour la paix»: « Nous sommes sûrs que le message est passé » (Alif Naaba, promoteur)

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Alif Naaba, promoteur de la caravane Nos voix pour la paix

Dans un entretien bilan, Alif Naaba, promoteur de la caravane «Nos voix pour la paix», à la fin de la tournée, a dressé un bilan «plus que satisfaisant» du projet «artistique et humain». La star de la musique burkinabè, le « Prince aux pieds nus », s’est dit convaincu que le message de paix véhiculé est passé. « Nous sommes sûrs qu’il est passé parce que nous recevons des retours de tout le monde entier, des Etats-Unis, de l’Europe, de l’Afrique », a-t-il affirmé quand il répondait aux questions des médias dont Wakat Séra qui ont suivi toute la tournée ayant concerné huit villes.

Wakat Séra : Quel bilan faites-vous de la tournée qui a sillonné huit villes à savoir Ouagadougou, Kaya, Tenkodogo, Pô, Gaoua, Koudougou, Ouahigouya et Bobo-Dioulasso ?

Alif Naaba : C’est un bilan plus que satisfaisant parce que nous étions confiants quant au fait que le projet allait être un bon projet. Mais voir comment il a pris et comment il est devenu si grand et si bon, vraiment on ne peut que dire que c’est au-delà de nos espérances. Donc, merci à Dieu pour cela. C’est le résultat de beaucoup de travail, trois années de travail précisément pour aboutir à ce résultat. Donc nous réitérons nos remerciements à Dieu pour ce qu’il fait pour ce projet que nous avons réfléchi, mûri et travaillé méticuleusement, et élaboré.

Le car de la caravane « Nos voix pour la paix »

Nos remerciements s’adressent également à l’ensemble de tous les artistes, tous les acteurs culturels, toute la presse et les influenceurs qui l’ont accompagné, qui ont travaillé autour de ce projet original. Je dis aussi grandement merci aux autorités administratives, militaires, coutumières et religieuses qui ont soutenu le projet. Je dis merci à notre partenaire l’Union européenne qui a compris l’essence même de ce projet qui est d’abord humain et culturel.

Pensez-vous que votre message est passé auprès des populations, notamment des jeunes après la tournée ?

Nous sommes convaincus que le message est passé car tout s’est déroulé sans problème. En tout cas, il n’y a pas eu d’égratignure. Le message est passé parce que nous savons la force de la musique comme moyen efficace de pouvoir véhiculer le message et éventuellement de changer les tendances. Je suis sûr et certain que le message porté par les artistes et leurs musiques, par les personnes ressources qui nous ont accompagné à certaines étapes, les échanges que nous avons eus avec les jeunes sont des moyens efficaces pour éventuellement faire passer ce message de paix et surtout du vivre-ensemble. Et ce message du vivre-ensemble, les jeunes que nous avons rencontrés l’ont entendu. Ce message de paix qui se profile à l’horizon pour notre pays, nous pensons aussi qu’il est réel.

Alif Naaba sur la scène à Koudougou

Et au-delà de cela, c’est aussi le message que nous avons fait passer pour le monde entier qui est à noter. Ce message est pour nous-même et ensuite dans le sens de donner une cartographie bien fréquentable de notre pays pour dire surtout qu’il est toujours sur la carte des rangs de toutes les nations. C’est un message fort et nous sommes sûr qu’il est passé parce que nous recevons des retours de tout le monde entier, des Etats-Unis, de l’Europe, de l’Afrique, etc. Le projet est bien connu et donc c’est un message qui est grandement passé et les jeunes que nous avons touchés par les concerts et les rencontres éventuellement sont des vecteurs qui amèneront encore le message plus loin.

Un projet d’une telle envergure certainement ne s’est pas mené sans difficultés. Qu’est-ce que vous pouvez dire sur ce point ?

Oui, un projet d’une telle envergure comme vous l’avez dit et surtout dans une situation exceptionnelle que notre pays traverse, nous en avons rencontré mais ce sont des problèmes que nous surpassons. Vous savez, la musique est une arme redoutable et comme l’a dit Fela (Kuti, artiste nigérian, NDRL), « Music is a weapon ». Et nous, nous connaissons sa force. Nous sommes restés focus malgré les problèmes que nous avons rencontrés, sur le fait que l’essence même de notre démarche, c’est la paix. Et chaque fois qu’il y a eu une incompréhension, nous avons cherché à les résoudre pour pouvoir avancer. Donc, ce sont des problèmes qui ne peuvent pas arrêter la paix, qui ne peuvent pas arrêter notre engagement. Nous sommes décidés envers et contre tout, en tant qu’artistes, à apporter notre message positif qui est un message comme l’a dit Bob Marley, de « One love ». Alors, on est sûr qu’il est véritablement passé depuis octobre à maintenant.

Quels sont les critères qui ont prévalu pour les différentes programmations des concerts qui se sont déroulés dans les huit villes ?

Ça c’est mon secret (sourie…). J’ai quand-même cette chance d’être un artiste et aussi d’avoir une casquette d’entrepreneur. Cela a permis qu’on fasse avec l’équipe, des castings qui répondent aux besoins des mélomanes, en fonction de chaque ville. On a voulu pour cette tournée, garder ce projet rien que pour la musique burkinabè, démontrer qu’on est capable de mobiliser et de faire passer le message. Il n’y a pas eu une technique précise, c’est juste qu’au niveau de chaque région, ont fait intervenir aussi des artistes ressortissants de la zone. Vous savez que toutes nos régions ont des richesses et on a essayé de valoriser cela.

Comment avez-vous pu regrouper tous ces artistes autour de ce projet artistique innovant ?

Ça été simple et il n’y a vraiment pas eu de complication. J’ai approché mes pairs à qui j’ai expliqué le projet. Les premiers qui sont venus et on a écouté le refrain ont compris tout de suite que c’était tellement vrai et tout le monde a adhéré. C’est d’ailleurs l’un des seuls projets où des artistes appellent pour demander qu’on les programme pour qu’ils viennent jouer gratuitement. Ça veut dire que le projet connait une adhésion mais aussi parce que nous sommes ouverts à tout le monde, toutes les générations. Personnellement je reste très ouvert et très disponible pour tous les artistes de toutes générations confondues et ils le savent.

Don de la caravane à Ouahigouya

On a suivi que parallèlement à l’acte majeur de la caravane qui est le concert musical, vous avez associé d’autres activités à savoir des visites, des communications auprès des scolaires et étudiants et des dons de vivres pour soulager des couches vulnérables. Qu’est-ce qui a motivé cette démarche ?

Vous êtes d’accord avec moi que les jeunes, il faut les rencontrer, il faut parler avec eux. Mais nous avons aussi nos mamans, nos sœurs et nos frères qui sont véritablement touchés par l’insécurité. Qui parle de paix parle de partage aussi. Dans les villes que nous avons arrêtées pour la caravane, il y en a certaines qui ont été touchées et il y a des déplacés. Et donc, on voudrait s’arrêter pour partager quelque chose avec eux, notre humanité. C’est pour ça qu’on a fait des dons à Kaya et à Ouahigouya afin de démontrer aussi que nous artistes devons montrer l’exemple. Que nous devons être un miroir pour que les autres nous regardent, que nous puissions les inspirer positivement.

Alors quand vous arrivez dans un endroit où les gens souffrent, allez quand-même les voir, entendez-les et partager un peu leurs moments. C’est ce qu’on a essayé de faire et c’est pour cela que j’ai défini cette caravane comme artistique et humaine. Voilà, entre autres, les motivations qui ont fait qu’on a aussi associé cette démarche sociale. C’était important pour nous d’associer le volet des rencontres avec plusieurs couches sociales dont les chefs coutumiers et religieux, les leaders d’opinion, les élèves et les étudiants, etc. Ceci nous a facilité beaucoup de choses et nos interlocuteurs nous ont orienté dans le bon sens.

Des spectateurs entonnant l’hymne national

Vous aviez commencé depuis vos premiers mots par des remerciements mais dites-nous comment vous avez apprécié l’implication des autorités coutumières et administratives ?

Je voudrais remercier et donner comme on le dit, un carton vert à toutes nos autorités coutumières. Elles se sont vraiment mobilisés et nous ont accueilli avec beaucoup de respect et d’estime. Elles ont véritablement béni la caravane et vous avez vu que tout s’est bien passé. C’est grâce à leurs bénédictions. Cette caravane est historique car c’est la première fois dans l’histoire du Burkina Faso qu’une telle tournée a lieu. Et vous en tant que journalistes qui avez suivi la tournée devez être fiers de faire partie de cette aventure de jeunes artistes, de jeunes culturels qui apportent un message de paix. Je voudrais donc remercier grandement toute la chefferie traditionnelle, remercier avec un carton vert également, toutes nos autorités administratives.

Je remercie le ministre de la Communication, de la Culture, des Arts et du Tourisme (Jean-Emmanuel Ouédraogo, NDLR) qui m’a reçu avant que nous commencions ce projet, de même que le ministère de l’Action humanitaire et de la Solidarité nationale qui a été aussi au lancement de ce projet. Ma gratitude également à toutes les autorités déconcentrées à savoir les gouverneurs, les hauts commissaires, les commandants, les capitaines. En tout cas, tous ceux qui dans toutes les régions où nous sommes passés, se sont investis pour la réussite de l’évènement. Côté administratif, il y a eu un travail en amont avec nos équipes qui ont été formidables. Elles ont démontré que même si on est ensemble, on réussit les choses. Tout ce que nous avons comme succès, vraiment incroyable de cette tournée, c’est grâce à tous ces gens, tous ces anonymes.

Le présentateur attitré de la tournée, Daouda Sané

J’interpelle tout le monde pour dire que Ouahigouya, Kaya, Tenkodogo, Pô, Gaoua, Koudougou et Bobo-Dioulasso sont des villes burkinabè qui vivent avec des jeunes qui travaillent tous les jours. Ce sont des endroits où on peut aller de manière saine et revenir sain et sauf.

Vous avez su également impliquer, des points focaux au niveau des différentes villes, des acteurs culturels majeurs pour vous appuyer. Qu’avez-vous à dire sur cette collaboration ?

C’est un projet culturel dont la tête de proue est Alif Naaba parce qu’il faut quelqu’un pour imaginer un projet mais derrière, il y a tous ces gens qui travaillent autour de l’initiative. Ce sont des acteurs culturels confirmés, c’est de nombreux de jeunes, des bénévoles qui travaillent derrière. A Bobo-Dioulasso où nous avons clôturé la caravane, toute la communauté culturelle a été impliquée dans l’organisation. Je profite de l’occasion pour tous les remercier, particulièrement nos amis points focaux comme Lam de Dioulasso, Dembélé, Ablo Managa. Ils sont pleins, ces acteurs culturels qui ont pris le projet à bras le corps, qui nous ont permis de pouvoir mettre les petits plats dans les grands et c’est ce qui a donné la magie qu’on a vécue. C’est cela qui dans l’ensemble a contribué au succès de la caravane. On a associé tout le monde parce que dans une démarche de paix, tu ne peux pas mettre certains à l’écart.

Visuel de la caravane Nos voix pour la paix

Ce projet s’inscrira-t-il dans le long terme ou la caravane s’arrêtera-t-elle seulement à cette édition ?

Nous espérons que d’autres pages vont s’ouvrir, que ce soit la continuité de ce projet ou dans un autre volet ou d’autres projets. En tout cas, nous sommes très engagés pour tout ce qui est cohésion sociale, tout ce qui est paix, ce qui concerne le vivre-ensemble. Vous savez, mon album Sowok l’avait annoncé. Retournez et réécoutez le premier titre M’Tenga de cet album et vous comprendrez pourquoi tout ce combat, tout cet acharnement de Alif Naaba pour qu’on ait un pays uni, soudé, pour la cohésion sociale. Vous comprendrez beaucoup quand vous écouterez cette chanson.

Panel dans un amphithéâtre à Koudougou

Et j’ai la chance d’avoir une très belle équipe de ma structure la Cour du Naaba qui m’accompagne dans cette aventure. Ils ne dorment pas la nuit depuis octobre quand on a commencé cette aventure. Ils bossent en y mettant de leur amour, de leur cœur. Je voudrais rendre hommage à toute cette équipe qui est derrière moi. Je voudrais encore réitérer mes remerciements à l’Union européenne qui a compris l’importance de ce projet. Nous avons cru ensemble, trois ans à travailler, à réfléchir pour trouver la bonne formule. Comme on le dit, quand vous êtes animés d’une bonne volonté vous y arrivez toujours. Et donc, c’est un travail d’ensemble qui a donné le succès de cette tournée historique.

En termes de chiffre, quelle estimation faites-vous de la mobilisation qu’il y a eue ?

Pour cette caravane, il y a eu au moins 50 artistes qui ont été programmés, on a autour de 2 700 kilomètres parcourus, nous sommes à 120 000 spectateurs touchés. On a mobilisé cinq camions pour le matériel technique à Bobo-Dioulasso. On a eu une équipe de 80 personnes qui ont été déployées sur la tournée. On a 67 à 70 personnes en moyenne pour chaque date qu’on a faite.

Entretien réalisé par Bernard BOUGOUM