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Joseph Bakhita Sanou: « Poètes du Burkina Faso, qui saurait mieux que nous réinventer le pays ? »

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« Poétesses et poètes du Burkina Faso, qui saurait mieux que nous réinventer le pays des hommes intègres au présent en étant présent à soi et présent à son peuple ? », s’est interrogé dans cet écrit poétique, Joseph Bakhita Sanou, poète, membre de la Société des Auteurs, des Gens de l’Écrit et des Savoirs (SAGES), à l’occasion de la Journée de la Poésie célébrée chaque 21 mars. M. Sanou veut jeter « un regard renouvelé qui remodèle notre monde si souvent défiguré par des iconoclastes dont les icônes sont des graffitis à mille lieues de la poésie ».

MESSAGE OFFICIEL DE LA JOURNÉE INTERNATIONALE DE LA POÉSIE
Écrire au présent…

Poétesses et poètes, cette journée est certes nôtre. Mais toute journée pourrait être aussi nôtre, qui a ses instants poétiques. C’est que la poétesse ou le poète, ni mage, ni voyant, ni un messie élu par Pan ou quelque muse, a continuellement un regard renouvelé sur ce monde originellement chaste et faste. Un regard renouvelé qui remodèle notre monde si souvent défiguré par des iconoclastes dont les icônes sont des graffitis à mille lieues de la poésie. Car la poésie, c’est de dire ou de redire, d’écrire ou de réécrire, de décrire ou de concevoir la vie au souffle d’un verbe et d’une verve constamment renouvelés pour recréer le monde.

En ce siècle de libéralisation, de démocratisation et de vulgarisation de toutes sortes de valeurs, il est heureux et salvateur pour l’humanité que la poésie, genre fédérateur, soit l’Alpha et l’Omega de tous les arts. Ainsi, fidèle à ses origines, elle se décline, par exemple, en slam ou rap loin des rhapsodies des griots, scandées, déclamées ou théâtralisées. Cependant, parfois aux antipodes des arcanes de la poésie, la parole est débridée, désarticulée, sans âme et sans état d’âme aboutissant bien des fois à la violence verbale, sœur de deux siamoises : la violence morale et la violence physique.

Dans ce contexte où nul n’a le monopole de la parole, la poétesse ou le poète africain(e), dans ses luttes légitimes pour la sécurité, la paix, la liberté et un monde plus équitable, même quand il sort de sa réserve, se doit de préserver son tempérament de poétesse ou de poète. Surtout, ne pas jeter des bûches sur les flammes du péril aux aguets.

Poétesses et poètes du Burkina Faso, qui saurait mieux que nous réinventer le pays des hommes intègres au présent en étant présent à soi et présent à son peuple ? Peuple souffrant le martyre d’être martyrisé dans sa propre patrie. Peuple tiraillé, tyrannisé et tenaillé par la stigmatisation ethnique, culturelle et religieuse.

Être présent à soi et présent à son peuple pour la poétesse et le poète, c’est être médiateur, facilitateur et bâtisseur de justice et de paix, leviers indispensables au progrès et au développement. C’est donc d’écrire et de sublimer l’insécurité devenue notre réalité. Réalité qui nous assaille et ne saurait nous enchaîner. Réalité qui nous oppresse et ne saurait nous comprimer. Réalité qui nous entoure et ne saurait nous emprisonner ; qui nous torture et ne saurait nous anéantir.

Car la poésie, sans oriflamme, sans arme ni alarme, porte la flamme d’espérance salvatrice, feu sacré de la vie et de l’âme des peuples, qui jamais ne s’éteindra. Flamme d’espérance pour détruire le culte travesti de Vulcain par des pyromanes sans nom. Flamme d’espérance pour consumer les paradis sur brûlis établis par les dieux de la mort. Flamme d’espérance pour reconvertir les disciples de la terre brûlée en adeptes de la restauration du legs ancestral en havre de fraternité paisible. Avec en prime … la promesse de mille et une journées sabbatiques.

Bobo-Dioulasso, le 21 mars 2023

Joseph Bakhita SANOU

Poète – Membre de la Société des Auteurs, des Gens de l’Écrit et des Savoirs (SAGES)