Accueil Editorial Libye: au nom du père, le fils Kadhafi s’annonce!

Libye: au nom du père, le fils Kadhafi s’annonce!

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Saïf al-Islam Kadhafi est-il en mesure de relever le challenge de la présidentielle? (Ph. rfi.fr)

Le scénario est en pleine écriture quelque part dans le monde, le réalisateur et acteur principal vivant incognito depuis sa libération de la prison de Zintan en juin 2011. Si l’annonce de sa candidature à la prochaine élection présidentielle libyenne se confirme, Saïf al-Islam puisque c’est de lui qu’il s’agit, décide ainsi, de ressusciter ce patronyme qui a marqué la Libye, l’Afrique et même le monde du vivant de son père, Moammar Kadhafi. L’affaire est loin de ressembler à un canular, l’information des intentions du fils coïncidant avec les premières frappes de l’aviation de l’Otan contre la Libye du père en 2011. Le choix du timing pourrait donc être le signe précurseur et surtout la détermination de l’héritier Kadhafi à ramener sous les projecteurs, un clan qui visiblement n’a pas dit son dernier mot dans une Libye où les nostalgiques ressassent encore les moments où les alouettes tombaient rôties du ciel. En tout cas, ils peuvent déjà se réjouir du programme de campagne de Saïf, qui selon son représentant, a la ferme volonté de reconstruire la Libye, non pas seul mais avec l’aide des pays voisins. Si ce n’est pas avoir de la vision, ça y ressemble fort bien, le fils Kadhafi misant sur l’unité et surtout l’union qui fait la force.

Sans être foultitude, les chances de Saïf al-Islam de reprendre le témoin arraché des mains de son père par cette coalition emmenée à l’époque par la France de Nicolas Sarkozy, n’en sont pas moins réelles. Le chaos provoqué par la chasse à mort lancée contre le «guide» reste un lourd préjudice pour ce pays, mais aussi pour ses voisins fragilisés par la disparition de Muammar Kadhafi, qui servait de stabilisateur dans cette région exposée aux crises de toutes sortes et cible de bandits et terroristes de tout acabit. Non seulement, le «guide» faisait parler les pétrodollars pour permettre à ses voisins de survivre, mais il éteignait aussi beaucoup d’incendies socio-politiques que les mauvaises langues n’hésitaient pas à lui attribuer. Pyromane-pompier, Muammar Kadhafi l’était peut-être mais son leadership et parfois ses lubies qui inquiétaient l’Occident en ont fait un facteur de paix et de quiétude pour le Sahel africain, transformé depuis lors en un vaste repaire de djihadistes lourdement équipés, ironie du sort, grâce aux armes sorties de la poudrière libyenne. On ne saurait non plus occulter que malgré le qualificatif peu flatteur de dictateur à lui collé par une certaine presse et des dirigeants occidentaux déterminés à avoir sa peau, Kadhafi père avait construit un véritable havre de bien-être pour ses compatriotes qui bénéficiaient d’une bonne couverture sociale, éducative et sanitaire.

Mais à force de vivre, pour des raisons de sécurité, dans une clandestinité qui ne dit pas son nom, Saïf al-Islam est-il en mesure de mener à terme son projet de retour aux affaires des Kadhafi? Comment faire opérer la magie du dialogue et de la réconciliation internationale qu’il prône, dans un environnement mondial où son feu père ne compte pas que des amis, lui dont le régime a endeuillé bien des familles par des attentats qui portent sa griffe? Saïf revient-il juste pour une vengeance personnelle sur fond de revanche familiale ou tribale? En tout cas, la tâche de Saïf al-Islam ne sera pas des plus faciles, lui qui porte le péché originel d’être un fils Kadhafi, dont le scalp est de surcroît réclamé par la Cour pénal internationale.

Par Wakat Séra