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Production de semences améliorées: une mine d’or pour des cultivateurs burkinabè

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Depuis quelques années, le Burkina Faso s’est lancé dans la production semencière dans le but de contribuer à l’amélioration de la sécurité alimentaire. C’est ainsi que pour mieux s’organiser afin de tirer de bons rendements de cette production, des producteurs se sont réunis et ont créé en novembre 2004, l’Union nationale des sociétés coopératives des producteurs semenciers du Burkina (UNPS-B), qui compte en son sein 4 000 membres. Aujourd’hui, des agriculteurs se réjouissent d’avoir fait le « bon choix » en se lançant dans la production de semences améliorées.

« Par saison je peux avoir deux tonnes de sorgho de la variété flayon par hectare, une tonne à l’hectare pour le sésame, 2,5 tonnes à l’hectare pour ce qui est du maïs », nous confie Yirossi Kohoun, producteur semencier dans la Boucle du Mouhoun, daba en bandoulière, indexant fièrement ses champs de sorgho, sésame, niébé et maïs, entre autres. Avec ces exploitations agricoles, il s’en sort avec au moins une somme de 20 millions F CFA par saison et un bénéfice de 12 millions la plupart du temps.

Cela fait maintenant dix ans que, M. Kohoun s’est lancé dans la production semencière dans son village à Kamandéna dans la région de la Boucle du Mouhoun où nous nous sommes rendus début octobre 2020. A 36 ans, M. Kohoun, marié à trois femmes et père de dix enfants, pratique l’exploitation familiale sur une superficie de plus de 30 hectares. Il dispose de quatre hectares de sorgho, le Sésame quatre hectares, le Niébé trois hectares, 12 hectares pour le maïs, six pour le coton et l’arachide, un hectare, que nous avons eu l’occasion d’admirer la vitalité et la verdure de ses semences.

Yirossi Kohoun qui ne cache pas sa joie, à notre présence dans ses champs verdoyants de pieds de sorgho, sésame, niébé, maïs, cotons et arachide, ne tarit pas d’éloges quant à la production des semences améliorées, produit de la recherche issue, notamment, du laboratoire de génétique et biotechnologies végétales de l’Institut de l’Environnement et de Recherches Agricoles (INERA). Pour lui, elle est plus rentable que la production locale. « L’avantage de la production des semences, c’est sa rentabilité et son adaptation à la pluviométrie », a soutenu ce producteur semencier.

Ce cultivateur très motivé dans son travail, dispose de trois tracteurs dont un en panne actuellement, nous dit-il. Quinze personnes, des membres de sa famille, travaillent dans ses différents champs. Bénéficiant déjà des retombés de la production semencière, il invite les autres producteurs à s’y engager, même si c’est pour la consommation.

Culture semencière, un secteur attrayant

Dans ces dernières années, on note de plus en plus d’engouement des agriculteurs dans la culture des semences améliorées. Cette pratique culturale, selon les témoignages, nourrit bien son homme, ce qui explique cette attraction.

El hadj Hamadé Sawadogo, est aussi un producteur semencier. Douanier à la retraite, il passe les beaux jours de sa retraite dans la production des semences améliorées et exploite une superficie de 20 hectares à Bona, un village du département de Lena dans la région des Hauts-Bassins où il possède une ferme agro-sylvo-pastorale.

Pour la présente campagne il a produit cinq hectares de mil hybride de la variété « Komsaya », quatre hectares de Niébé de « Tiligré », quatre hectares d’arachide et du sésame « S42 ». « Depuis que je suis dans la production semencière, je ne me plains pas », nous fait savoir M. Sawadogo tout en confiant que « les prix des produits semenciers sont meilleurs par rapport à ceux de la consommation ».

Ce douanier à la retraite reconverti dans l’agriculture s’en sort le plus souvent avec plus d’une dizaine de millions F CFA par saisons, avec des bénéfices allant de six à sept millions F CFA.

VIDEO-Burkina: la production semencière, une mine d’or

De Kaya dans le Centre-Nord du Burkina Faso en passant par Loumbila (Plateau Central), Dédougou (Boucle du Mouhoun), Bona, Bama (Hauts-Bassins), Gaoua et Diébougou (Sud-Ouest), les producteurs semenciers se frottent les mains, selon leurs témoignages.

Et pour cette année, malgré l’installation tardive de la saison pluvieuse dans certaines localités du pays, les cultures se présentent relativement bien dans les différents champs semenciers que nous avons pu visiter, et les producteurs se réjouissent déjà. 

Dans la ferme semencière de Loumbila, de nouvelles techniques de production pour un bon rendement y sont menées avec des variétés de niébé, de sorgho, du mil, notamment, du mil chinois.

Hamado Sebgo, après quelques années d’aventures en Côte d’Ivoire, a décidé de revenir au pays et s’investir dans l’agriculture. Aujourd’hui, il est le président régional de l’Union des producteurs semenciers du Plateau Central. Il affirme que grâce à la production semencière, il arrive à subvenir à ses besoins. Aujourd’hui, il est propriétaire de trois parcelles et des non-lotis.

Le secteur semencier du Burkina, un des plus dynamiques de l’Afrique de l’Ouest

La production des semences améliorées présente une bonne rentabilité et a un cycle très court et adapté au climat du pays, par rapport à la production de la semence locale. Plusieurs variétés de semences sont utilisées dans les différents champs. Il y a, entre autres, les variétés Komcallé, Flagnon, Tiligré, Komsaya, Bondofa, Komsaya, S42. Et cela est dû aux efforts des chercheurs dans le domaine agricole.

Encadré: Des caractéristiques de quelques variétés cultivées au Burkina Faso

-Bondofa qui signifie en langue Dioula « le grenier est plein », est une variété de cycle de 97 jours. Elle a un rendement de sept à huit tonnes à l’hectare. Cette variété peut nourrir 35 adultes et 5 bovins durant toute une année.

-Komsaya signifie « La faim est finie » en langue mooré. C’est une variété de cycle de 91 jours avec un rendement de 8 à 9,5 tonne à l’hectare. Elle a un fourrage de 15 à 25 tonne à l’hectare. Ses feuillages restent verts à maturité. Elle est riche en protéine assimilable (lysine, tryptophane) et en vitamine A. Ces rendements peuvent être plus si les règles techniques sont bien suivies.

Variété S 42: c’est une variété à cycle court. Elle est adaptée aux conditions locales du Burkina Faso particulièrement les climats sahélien et subhumide.

-Tiligré: c’est une variété à port semi-érigé avec un cycle de 70 jours, ayant une bonne vigueur à la levée, résistante au striga et tolérante à la sécheresse. Elle a un rendement de 1,800 tonne à 2 tonnes à l’hectare.

-Flagnon: c’est une variété de cycle semis-maturité de 115 à 120 jours et ayant une bonne vigueur à la levée, résistante au striga et tolérante à la sécheresse. Elle a un rendement de grain potentiel de 3 200 kg/ha et 1 750 kg/ha de grain moyen en milieu paysan. Elle est cultivée sur un sol de type argilo-sableux ou sablo-argileux.

-Komcallé est une variété de cycle semi-maturité de 60 jours. Elle peut être produite jusqu’à 1,8 tonnes à l’hectare et un rendement grain moyen en milieu paysan de 750 Kg/ha. Cette variété a une bonne vigueur à la levée, résistante au striga et tolérante à la sécheresse.  

Au Burkina Faso les semences constituent l’un des principaux déterminants des rendements agricoles, selon le document intitulé « Secteur semencier au Burkina Faso, Recommandations pour une meilleure intégration des producteurs » de Patrice Djamen et Souleymane Ouattara, paru en janvier 2017. « Le secteur semencier du Burkina Faso est l’un des plus dynamiques d’Afrique de l’Ouest tant au plan institutionnel, d’orientation stratégique, de dispositions réglementaires que des capacités des acteurs », poursuit le document.

Une culture adaptée au changement climatique

« Aujourd’hui, nous sommes dans la phase des changements climatiques, il faut faire en sorte que les variétés que les producteurs utilisent soient adaptées à nos climats. On avait du sorgho qui faisait sept mois, mais aujourd’hui si vous semez ce sorgho avec le même cycle, il n’est pas sûr que vous allez récolter », a fait savoir Nonyiza Bonzi, président de l’Union régionale des sociétés coopératives des producteurs semenciers de la Boucle du Mouhoun.

VIDEO-Burkina : les normes de production semencière

Pour le technicien du ministère burkinabè en charge de l’agriculture, Martin Sawadogo, il y a une grande différence entre les semences améliorées et les semences locales, car « (leurs) rendements sont encore plus grands que les semences traditionnelles ».

Les différents producteurs semenciers bénéficient de l’accompagnement des techniciens du ministère en charge de l’Agriculture, avec des conseils sur la pratique culturale.

Mais quelques soucis sont relevés par les producteurs. Il s’agit de l’accessibilité à la semence de base et la main d’œuvre.

Par Daouda ZONGO