Accueil A la une Report de la présidentielle au Mali: encore la France!

Report de la présidentielle au Mali: encore la France!

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Le colonel Assimi Goïta (à droite) et son Premier ministre Choguel Maïga

Un «léger report»! C’est ainsi que la junte malienne, sans en préciser un nouvel échéancier, a décidé de renvoyer la présidentielle prévue pour février 2024 à plus tard. Rien ne presse, la démocratie peut attendre!

Trois raisons techniques sous-tendent ce bouleversement du chronogramme qui aura, sans aucun doute, des répercussions sur le reste du calendrier des élections en vue pour redonner des couleurs constitutionnelles au Mali. «La prise en compte de nouvelles dispositions constitutionnelles dans la loi électorale, en particulier l’augmentation de délais entre les 2 tours des élections présidentielles; la prise en compte par l’AIGE (Autorité indépendante de la gestion des élections, NDLR) des résultats de la révision annuelle des listes électorales (1er Octobre au 31 Décembre 2023) dans le fichier électoral à partir de Janvier 2024, seul moyen d’assurer une large participation des maliens aux prochaines élections.» Ce sont les deux premières raisons qui ont conduit au «léger report».

Mais comme il fallait justifier davantage ce «léger report», il fallait le prétexte infaillible à la mode:  fait porter une fois de plus à la France une faute lourde. Dans ce cas, le bouc émissaire n’a pas été difficile à trouver! Et c’est la troisième raison qui permet à la junte militaire de mettre en accusation la société française IDEMIA qui, selon le pouvoir des colonels, a pris «en otage la Base de données du recensement administratif à vocation d’état civil».

Ainsi, dès que la France est mise au pilori, les prétextes pour rallonger la transition sans fin, passent comme lettre à la poste. C’est d’ailleurs dans cette logique que «la gestion de la prise en otage de la base du RAVEC» est longuement présentée comme le blocage le plus mis en exergue dans le communiqué produit par la junte militaire pour faire avaler plus facilement des couleuvres au peuple et à la communauté internationale.

Sinon, peu sont dupes sur cette situation qui ne constitue en rien un scoop. Sauf qu’on attendait davantage la situation sécuritaire comme alibi pour ne pas tenir ces élections, qui devraient déboucher sur le retour du Mali à l’ordre constitutionnel. Pourtant, un référendum pour adopter une nouvelle constitution taillée sur mesure comme une vareuse de colonel, a bien été tenu, avec «succès», même si des zones entières, sous occupation terroriste, ont été soigneusement contournées. Fort heureusement, et il faut en féliciter la junte militaire, elle a trouvé la parade pour sortir, comme à l’accoutumée, des traquenards qu’elle dit lui avoir été tendus par l’ancienne puissance colonisatrice, qui est chassée pour la Russie et Wagner, au nom de la diversité des partenariats et de la souveraineté malienne inaliénable!

Si ce n’est pas que la France a bon dos pour porter les sept péchés capitaux du Sahel, tout le monde savait que les putschistes du Mali, n’allaient pas nettoyer la maison, et laisser un autre locataire s’y installer. Sous d’autres cieux, le scénario a été ainsi et on ne voit pas pourquoi le colonel Assimi Goïta dérogerait à cette règle non écrite, mais très usitée. Du reste, «sa» constitution permet de droit au colonel, de se refaire une virginité civile par les urnes, en troquant le treillis de Kati contre le boubou blanc de Bamako.

En attendant, le bail de la transition se poursuit pour le patron de Bamako qui a encore de beaux jours devant lui, que ce soit en président de la transition ou comme président élu, la société civile contestatrice dans sa partie qui n’a pas l’onction de la junte et les partis politiques n’ayant plus voix au chapitre. Le boulevard sera ainsi ouvert pour Assimi Goïta pour devenir président civil après avoir été président militaire.

Pourvu qu’il n’oublie pas qu’il est là pour débarrasser le Mali de ses jihadistes et assainir la gouvernance publique, des fautes qu’il a fait porter à son prédécesseur, Feu Ibrahim Boubacar Keïta, pour le tomber par les armes, le 18 août 2020, et devenir khalife à la place du khalife.

Par Wakat Séra