Accueil A la une Tabaski au Burkina: les moutons de la vie chère

Tabaski au Burkina: les moutons de la vie chère

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Madi Sawadogo en pleine discussion avec un client

A quelques jours de la fête de la Tabaski, les moutons sont à l’honneur sur les marchés des bétails dans la ville de Ouagadougou. Une équipe de Wakat Séra a fait un tour le vendredi 16 juillet 2021, au marché de bétail de Tanghin dans l’arrondissement n°4 de la capitale, où les commerçants, à la recherche de clients, expriment les difficultés qu’ils rencontrent à vendre leurs animaux. Le mouton de la vie chère qui trouve difficilement preneur.

Il est 12 heures 45 à notre montre-bracelet lorsque nous arrivons ce vendredi 16 juillet 2021 au marché de bétails de Tanghin. Difficile de se frayer un passage, tant l’endroit grouille de monde et surtout à cause de la boue due aux mouvements incessants de vendeurs et acheteurs, après une bonne pluie. Des bêlements mêlés aux marchandages. C’est toute l’ambiance d’un marché de bétails où les animaux, en majorité des moutons, sont estampillés de la marque de leurs différents propriétaires, qui les regroupent en mini troupeaux pour attirer les éventuels acheteurs.

Certains commerçants sont en pleines discussions avec des clients pendant que d’autres s’occupent de donner à manger à leurs bêtes. Nous approchons un groupe de vendeurs avec qui nous engageons une conversation. Le chef de ce groupe de six personnes, Issa Sawadogo, nous confie qu’ils sont venus de Gourcy, chef-lieu de la province du Zondoma dans la région du Nord, à environ 140 kilomètres de Ouagadougou. M. Sawadogo et ses camarades sont dans la capitale depuis trois jours pour y vendre les 250 moutons qu’ils ont emmenés avec eux. «C’est la première fois que nous venons ici pour vendre nos moutons», nous dit Issa Sawadogo, qui explique que c’est dans l’espoir d’avoir plus de clients qu’ils sont venus à Ouagadougou avec leur bétail. Les prix de leurs moutons vont de 70 000 à 120 000 francs et en ce qui concerne le marché, le quinquagénaire soupire qu’il n’est pas «reluisant». «Nous sommes ici depuis trois jours, et sur les 250 moutons, nous n’avons réussi qu’à en vendre une cinquantaine», précise-t-il.

Des commerçants dégoutés par la cherté des aliments des animaux et par l’attitude des clients revendeurs

A l’instar de Issa Sawadogo et ses camarades, plusieurs autres commerçants ont quitté d’autres localités pour rejoindre la capitale pour vendre leurs animaux. C’est le cas de Madi Sawadogo, qui est venu de Kongoussi, chef-lieu de la province du Bam dans le Centre-Nord à 115 kilomètres de Ouagadougou, avec ses fils pour vendre leur bétail. L’affluence des clients n’est pas à la hauteur des espérances de Madi et ses fils. «Le marché est assez moyen. Nous avons vendu, sur les 160 moutons, environ 50 têtes et nos prix varient entre 35 000 et 200 000 francs», nous fait savoir Madi Sawadogo.

En plus d’un marché dont l’affluence des clients n’est pas à leur goût, le père Sawadogo et ses enfants sont confrontés à un autre problème. Il s’agit du coût élevé des aliments pour nourrir leurs animaux. Un de ses fils, Gérard Sawadogo, témoigne que pour acheter à manger aux moutons, il faut payer cher. Et le prix de l’eau pour donner à boire aux animaux leur est également coûteux. «La barrique d’eau, on nous la vend à 1000 francs», se plaint Gérard Sawadogo.

Traînant dans la boue, nous nous dirigeons vers un autre groupe de vendeurs qui, nous prenant  pour des clients, nous demande de nous approcher. Malgré sa déception de voir que nous n’étions pas des acheteurs, Nassirou Zonga accepte se prêter à nos questions et nous apprend que lui et ses amis sont également venus de Kongoussi avec des moutons qu’ils ont élevés et en ont achetés d’autres. Séjournant depuis cinq jours à Ouagadougou, Nassirou et ses camarades se plaignent du marché de leur marchandise. En effet, ils ont avec eux une centaine de têtes de moutons, mais c’est «seulement une trentaine» qu’ils ont pu vendre. Eux, ils ont fixé les prix de leurs bêtes entre 50 000 et 300 000 francs. Mais Nassirou et son équipe déplorent le comportement des clients revendeurs qui «viennent acheter leurs moutons à un bas prix pour ensuite les revendre à leurs clients qu’ils connaissent bien à un prix bien meilleur». En plus, ils affirment avec regret qu’il leur arrive de vendre des moutons à un prix inférieur au prix d’achat. «Nous n’avons pas d’autres options. Si on n’arrive pas à les vendre et on se retourne avec, c’est une perte pour nous», s’attriste Oumarou Zonga qui déplore également la cherté des aliments des animaux.

Des revendeurs à la recherche de profit

Nous prenons attache avec des jeunes qui nous confirment qu’ils sont venus acheter des moutons pour ensuite les revendre. L’un d’entre eux confie à notre micro que les moutons sont chers mais ils achètent et espèrent les revendre avec un gain pouvant avoisiner 10 000 francs.

 Un autre jeune se faisant appeler Souley, et ses amis sont également des revendeurs. Ils achètent les moutons, les entretiennent, les nourrissent. Il nous apprend qu’ils fixent leurs prix entre 125000 et 150 000 francs et veulent juste avoir un bénéfice d’au moins 2 500 francs.

L’affluence des clients vers les commerçants était toujours importante lorsque nous quittions les lieux. Chacun veut agrémenter sa Tabaski en offrant à sa famille et proches un mouton, même si le prix de celui-ci n’est pas à la portée de toutes les bourses. La fête de l’Eïd El Kébir, est programmée pour le 20 juillet prochain au Burkina Faso et dans bien d’autres pays à travers le monde.

Siaka CISSE (Stagiaire)