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Togo: ça coince encore!

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A quand la fin des manifestations et contre manifestations au Togo? (Ph. voaafrique.com)

Le énième dialogue politique togolais bloque. Ce n’est pas un scoop. C’était même prévisible, les deux parties en conflit tirant sur une corde devenue aussi raide que la position de chaque camp. Si dans un passé récent, d’autres crises politiques nées de la même contestation du trop long règne de la famille Gnassingbé sur le Togo, ont connu des négociations qui ont débouché sur des accords certes non respectés par la suite, l’actuel dialogue politique risque de donner encore bien des nuits blanches au facilitateur ghanéen. Nana Akufo-Addo vient pourtant de décrocher deux victoires d’étapes importantes dans cette tentative de remise à flots du bateau togolais. Dans un premier temps, amener les deux protagonistes sous l’arbre à palabres, le 19 février dernier n’était pas gagné d’avance. Ensuite, convaincre la coalition des partis d’opposition togolais à renoncer à ses marches de la semaine prochaine  n’était pas non plus chose aisée. Sauf que ces succès sont loin de plaider pour une issue forcément heureuse et rapide de ce face-à-face entre pouvoir et opposition togolais. Car sans que les politiciens togolais ne se soient tourné le dos définitivement, il n’en demeure pas moins que les négociations coincent et demain ne semble pas être la veille pour leur reprise.

Deux points essentiels bloquent la suite des discussions. A raison, l’opposition tient au respect de la matérialisation des mesures d’apaisement sans laquelle ses membres ne pourraient être à l’abri des «persécutions, arrestations, poursuites et violences» de la part des sbires de Faure Gnassingbé. Certes, quelques détenus ont été élargis dans la logique des fameuses «mesures d’apaisement», mais l’opposition regrette qu’un nombre important de ses militants ou sympathisants se trouve encore dans les geôles du régime. Dans sa détermination à ne plus se faire rouler dans la farine par le boulanger de service, les opposants exigent également que tout processus visant à l’organisation de futures élections soit arrêté pour permettre de renouer les fils du dialogue. Cependant, il faut reconnaître que le véritable point d’achoppement entre le régime de Faure Gnassingbé et ses contempteurs est le retour à la constitution de 1992 qui sonnerait le départ hic et nunc du président togolais des affaires. Comment trouver un modus vivendi quand les opposants pensent tenir le bon bout pour enfin se débarrasser du pouvoir de cinquante ans des Gnassingbé, la loi fondamentale dans sa version de 1992 stipulant péremptoirement, entre autres, que nul ne doit faire plus de deux mandats présidentiels. Faure Gnassingbé et son pouvoir ne l’entendent pas de cette oreille, se rabattant sur les réformes par eux opérés et de ce fait, sur la non rétroactivité de la loi.

En tout cas, Faure Gnassingbé étant toujours en plein mandat, ce serait faire un coup d’état parfait, que de l’empêcher ainsi, d’aller au bout de ce quinquennat qui est lui très constitutionnel. Soutenu par ses partisans et nombre de ses pairs africains, le président togolais reste droit dans ses bottes. En face, les opposants, qui mobilisent depuis août 2017, une bonne partie des populations dans la rue se dit également en droit de réclamer le changement. Trouver-t-on la solution à cette guerre entre légitimité et légalité pour enfin permettre le retour à la table des négociations et parvenir à une paix des braves? A tout point de vue le Togo en a besoin, le pays s’enlisant davantage dans la gadoue du sous-développement, du fait de la mauvaise foi de ses politiciens accrochés à des intérêts égoïstes et très personnels. En attendant, c’est Nana Akufo-Addo qui continue de se triturer les méninges, cherchant date pour la reprise de «son» dialogue!

Par Wakat Séra