Accueil A la une Attaques armées: le Burkina pleure ses morts, le Mali inquiète à l’ONU

Attaques armées: le Burkina pleure ses morts, le Mali inquiète à l’ONU

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Au Burkina, le flot des Personnes déplacées internes ne fait qu'enfler (Photo d'archives)

Le carnage de Seytenga continue de hanter les nuits des Burkinabè. Le bilan officiel, toujours provisoire, est passé de la cinquantaine à 79 morts. Va-t-il progressivement monter pour atteindre les centaines de personnes massacrées, chiffres alarmants évoqués par des sources locales et des témoignages qui font froid dans le dos? Rien n’est moins sûr, car ce sont des chiffres qui font mal tant ils sont choquants et traumatisants. Les rescapés, pour ne pas dire les miraculés du massacre odieux de ce week-end, qui ont afflué par milliers vers la ville voisine de Dori, distante de 47 km de Seytenga, se demandent encore, comment ils ont pu échapper à cette tuerie aveugle.

Mais ils sont loin d’être sortis du tunnel de la mort, car l’autre danger qui les guette c’est la pénurie d’eau, conséquence directe du saccage des installations par les forces du mal. L’eau étant la vie, son absence ne peut que compromettre la…vie. La menace des maladies d’origine hydrique, pend déjà comme une épée de Damoclès sur la tête des Personnes déplacées internes (DPI) qui, pour la plupart vivent, pour ne pas dire survivent, dans l’extrême précarité.

Les fuyards qui n’ont pas eu la chance de trouver refuge dans des familles et sont contraintes de se diriger vers des sites implantés à la sauvette et qui manquent de presque tout, sont, surtout, les plus malheureux. En tout cas, après la tragédie de Solhan, le drame de Seytenga, l’interrogation qui s’impose est à quelle ville ou quel village le tour. L’inquiétude des populations est d’autant plus justifiée et leur angoisse pesante, que les assaillants, se livrent non seulement à des assassinats en masse, mais opèrent également des razzias en bonne et due forme, pour se constituer des provisions vivrières conséquentes.

De même, l’argent étant le nerf de la guerre, qu’ils soient des combattants de ces groupes qui ont érigé la zone des Trois frontières en sanctuaire meurtrier, notamment le Groupe de soutien à l’islam (Jnim) ou l’Etat islamique au Grand Sahara (EIGS), ou encore des «Hommes armés non identifiés», les terroristes sévissent de plus en plus dans les localités qui regorgent de sites miniers ou d’exploitation artisanale d’or.

Questions à une balle blanche ou réelle: au Burkina, les militaires qui ont chassé l’ancien président Roch Marc Christian Kaboré du palais présidentiel de Kosyam, lui reprochant de ne pas avoir trouvé l’antidote contre les assauts meurtriers au quotidien des terroristes manqueraient-ils, eux-aussi, de l’arsenal adéquat pour anéantir l’ennemi? Si oui, pourquoi ne pas privilégier la coalition avec les Etats voisins qui sont confrontés à la même réalité? Pourquoi continuer à miser sur le tout militaire au lieu de tirer sur des leviers comme les leaders religieux et coutumiers et même les chefs de famille?

Surtout que le constat est désormais établi que ce sont des Burkinabè qui ont pris des armes contre leurs propres frères et sœurs. Et, même si ce serait paradoxal pour eux qui ont pris le pouvoir pour éradiquer le terrorisme, de crier au secours, pourquoi ne pas tirer profit de partenariats avec des forces qu’elles soient Barkhane de la France, Takuba de l’Europe, ou turques, américaines, russes, allemandes, etc., tant que ce ne sont pas des groupuscules de mercenaires qui commettront des exactions contre les populations civiles?

Il est temps de rassembler tout le peuple sous la bannière de la lutte, en faisant fi des clivages politiques qui consistent à cataloguer tel ou tel comme appartenant à l’ancien ou au nouveau régime. Comme on le dit trivialement, si le feu doit brûler le Burkina, il n’épargnera aucun «homme de». Sauf que le Mali s’étant ostracisé, serait-il possible de «déterroriser» le Burkina et le Niger, sans la crainte que le danger revienne de chez leur voisin, compte tenu de l’extrême porosité des frontières et de la forte mobilité reconnue de groupes terroristes de surcroît «indisciplinés»? D’où l’inquiétude légitime de l’ONU sur la situation sécuritaire au Mali où la junte militaire au pouvoir, fait feu de tout bois contre la Minusma et d’autres structures sous-régionales et institutions internationales.

En attendant, le vote, le 29 juin sur le renouvellement du mandat de la mission des Nations unies au Mali, c’est la crainte des autorités locales de Ménaka, d’une attaque jihadiste d’envergure à laquelle la Minusma ferait difficilement face, même en composant avec l’armée locale, qui hante les esprits. Surtout depuis le départ officiel, ce lundi de la force française Barkhane de cette ville du nord-ouest malien.

A Seytenga, ville fantôme et Dori, ville sur laquelle l’étau terroriste se resserre inexorablement si rien n’est fait, les populations qui n’ont pas fini de pleurer leurs morts et continuent de réfléchir sur leur triste sort, sont, en tout cas bien loin des soucis de l’ONU de ramener à la raison, et à la maison, les nouveaux maîtres du Mali, depuis leur putsch militaire du 18 août 2020.

Par Wakat Séra