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Burundi: mort subite pour le président footballeur!

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Fin de partie pour Pierre Nkurunziza (Ph. financialafrik.com)

Le président du Burundi, Pierre Nkurunziza est mort! La nouvelle est tombée comme un coup de tonnerre dans un ciel burundais déjà quelque peu assombri par la parodie d’élections à huis-clos que venaient de vivre ce pays. Cette disparition brutale du chef de l’Etat intervient alors que celui-ci venait de placer brillamment son poulain, le général major, Evariste Ndayishimiye, dans le fauteuil présidentiel qu’il a cédé, résistant aux sirènes d’un…quatrième mandat, après ceux de 2005, 2010 et 2015. C’est une crise cardiaque, selon le communiqué officiel du gouvernement, qui a emporté ce féru de football, même si des bruits de couloirs évoque le Covid-19, maladie dont le défunt président a longtemps ignoré l’existence, confiant le sort de son pays entre les mains de Dieu.

Une chose est certaine, ce dernier match a tourné en défaveur du président qui espérait sans doute continuer à tirer les ficelles du pouvoir dans l’ombre, après avoir passé, au mois d’août prochain, le gouvernail de la barque à son frère d’arme. Il ne chaussera plus les crampons et ne foulera plus les pelouses où il était formellement interdit à ses adversaires de le tacler. Et il fallait surtout s’arranger pour le laisser marquer le but présidentiel durant chaque partie de foot. Ainsi allait le Burundi qui, après les meurtrissures de la guerre civile hutu-tutsi, aura servir de terrain de jeu à un chef qui a régné sans partage.

S’il a dirigé le pays d’une main de fer, contraignant ses opposants au silence en les tenant loin de Bujumbura ou en les mettant simplement à l’ombre dans ses geôles qui en ont vu défiler, s’il a muselé la presse et empêché toutes les formes de la liberté d’expression, s’il a affronté, sans jamais céder, la communauté internationale, lorsque celle-ci voulait trop fouiner dans sa gouvernance très critiquée du pays, notamment dans la gestion cavalière des droits de l’homme, Pierre Nkurunziza, 55 ans, a tout de même organisé la première élection qui conduira à une passation de pouvoir entre deux présidents élus depuis l’indépendance du pays il y a 58 ans. Et ça, ce n’est pas rien. C’était même loin d’être gagné d’avance, vu l’appétit prononcé de l’homme pour le pouvoir, un régime dont les piliers reposent solidement sur la police. De plus, Nkurunziza était soutenu par un appareil partisan dont il a tiré la maîtrise de son expérience de patron du principal groupe armé hutu pendant la guerre civile burundaise et de membre influent du Conseil national pour la défense de la démocratie-Forces pour la défense de la démocratie (CNDD-FDD).

Comment se passeront les deux mois de transition avant l’investiture officielle du successeur déjà contesté de Pierre Nkurunziza? Certes, le Burundi est doté d’institutions, mais tout l’appareil étatique était entre les mains de l’homme fort qui s’en est allé sans crier gare. Une autre question: Evariste Ndayishimie marchera-t-il dans les sillons tracés par son mentor, ou avec lui, une nouvelle ère s’ouvrira-t-elle pour un pays dont les populations voudraient également humer le délicieux parfum de la démocratie, la vraie? En tout cas, le destin lui fait un clin d’œil inespéré, avec la disparition de celui qui pouvait le tenir par la laisse, ayant largement porté son ascension au sommet de l’Etat. Débarrassé de ce poids qu’il aurait eu à porter durant tout son mandat, le nouveau président élu, a toute la latitude d’insuffler à son pays un air de libération, et même de liberté. Même là aussi le combat est loin d’être gagné, car le système Nkurunziza, vieux de 15 ans, ne peut être effacé d’un simple coup de chiffon.

Et plus qu’une solution, la mort de l’homme fort de Bujumbura pourrait devenir le problème. Surtout que l’opposition qui a toujours été persécutée et bâillonnée pourrait bien vouloir sortir de sa léthargie forcée. Moment de délivrance ou période d’incertitudes pour le Burundi? Seul l’avenir nous le dira.

Par Wakat Séra