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Libye: le salut viendra-t-il de Brazza?

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Faites vos jeux, plus rien ne va en Libye. Les armes continuent de rythmer le quotidien des Libyens, n’épargnant ni hôpitaux, ni écoles, au grand dam des populations civiles, qui ne savent plus d’où viendra leur salut. La Russie, l’Allemagne et tout dernièrement l’Algérie s’y sont frottées sans succès. L’ONU et sa fameuse communauté internationale sembles impuissantes, réussissant juste à faire séjourner à Berlin, le 19 janvier les deux frères ennemis, le maréchal Khalifar Haftar et Fayez el-Sarraj, sans pouvoir les faire asseoir sur la même table. Et tout espoir de leur faire fumer le calumet de la paix semble s’éloigner de plus en plus. Comme tous les bons accords qui malheureusement touchent à des intérêts géo-stratégiques et économiques énormes, le cessez-le-feu entre Haftar et el-Sarraj n’a duré que le temps d’être décrété. Il a volé en éclats à peine les rideaux de la conférence de Berlin, tombés. Les protagonistes et leurs soutiens étrangers, notamment avec comme têtes de proue, la Russie pour Haftar et la Turquie pour el-Sarraj voudraient faire un pied de nez aux médecins venus de toutes parts au chevet de la Libye dans la capitale allemande, qu’ils ne s’y seraient pris autrement. Donc, que fera Brazzaville pour ne pas mordre la poussière comme ces prédécesseurs qui n’ont pas pu amener les belligérants à baisser les canons?

A l’instar des camps sur le champ de combat, la communauté internationale qui a habitué l’opinion à sa stratégie du pyromane-pompier et en fonction des intérêts des puissants du jour n’a pas failli à sa réputation. Surtout avec les enjeux du pétrole libyen très convoité et qui avait déjà conduit au bombardement du pays par la France et ses alliés, sous l’œil bienveillant de la…communauté internationale bien aidée par le silence ingrat des Africains. La «banque de développement» informelle de l’Afrique, le très généreux Mouammar Kadhafi, a même été assassiné dans la foulée, le 20 octobre 2011. Et la Libye est devenue une poudrière à ciel ouvert où s’approvisionnent tous les terroristes et bandits qui écument la bande sahélo-saharienne. Pire, passage presque obligé pour les nombreux migrants à l’assaut de l’Europe, la Libye s’est transformée en un pays de non droit où les pauvres migrants sont dépouillés, violés, vendus comme de vulgaires objets, etc. Donc, sur presque tous les plans, la Libye est «une affaire juteuse» et les prédateurs occidentaux, ne pouvaient rester indifférents à ce gibier que certains d’entre eux se disputaient par pions libyens interposés. Pour leurs premiers pas, Sassou et ses hôtes projettent de faire accepter aux frères ennemis libyens d’aller vers l’organisation d’un forum de réconciliation. L’idée n’est pas mauvaise en soi. Mais la fin de la guerre arrange-t-elle les parrains de camps rivaux qui continuent d’approvisionner, en armements et en combattants, leurs protégés, malgré l’embargo sur les armes décrété à Berlin? En tout cas, la guerre est loin d’être finie entre clans rivaux, soutenus militairement ou autrement par des parrains influents comme la Russie pour le camp Khalifar Haftar et la Turquie pour le camp Fayez el-Sarraj. La communauté internationale a pourtant bien vu venir ce nouveau conflit. Elle savait bien également que le chaos s’installerait suite au bombardement de la Libye de Kadhafi par la France et ses alliés. Surtout qu’après le déluge de feu, aucun service après-vente n’a suivi.

Et maintenant on fait quoi pour sortir la Libye de l’impasse? Le président congolais, Sassou N’Guesso et l’Union africaine qui sont maintenant aux commandes auront-ils la marge de manœuvre nécessaire pour conduire cette opération de médiation délicate à souhait, là où l’Onu, avec tout son arsenal juridico-diplomatique, a coulé? Certes, ce serait heureux pour les Africains de pouvoir régler leurs différends entre eux sur le continent. Mais le cas de la Libye, un pays où l’Africain noir de surcroît est considéré comme un moins que rien, ressemble à une montagne bien difficile à grimper. Et le chemin pour aller au forum de réconciliation sera bien compliqué, sous cette pluie incessante de roquettes et d’obus. Il manque de sincérité dans tout ce cycle de médiations, tous les acteurs ayant fait de l’hypocrisie et de la mauvaise foi, leurs sports favoris. Si ceux qui nous dirigent pouvaient au moins une fois faire mentir notre légendaire afro-pessimisme, en tout cas, les populations du Sahel qui subissent au quotidien les assauts des terroristes qui profitent de la situation de chaos en Libye, leur en seront très reconnaissantes.

Par Wakat Séra