Accueil Editorial Niger: Mahamadou Yssoufou à Paris, les terroristes à Diffa

Niger: Mahamadou Yssoufou à Paris, les terroristes à Diffa

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Emmanuel Macron et son hôte Mamadou Issoufou (boubou), inquiets de l'avenir du G5 Sahel (Ph. reuters

Alors que le chef de l’Etat nigérien se trouve à Paris en visite de travail avec son homologue français, ses compatriotes restés au pays, eux, pleurent leurs proches, au moins neuf, morts des suites de trois explosions provoquées par des attentats-suicides. Si le Niger n’en est pas à sa première attaque terroriste, il faut dire que les populations, notamment celles de Diffa, la capitale régionale du pays presque coutumière du fait, doivent désormais faire face à un modus operandi plus sournois et lâche de la part des assaillants. Sans doute affaiblis par les frappes conjuguées des armées nationales du Nigeria, du Cameroun et du Tchad, les éléments de Boko Haram qui écument cette zone, développent maintenant les attentats-suicides, tout autant ravageurs. La nébuleuse islamiste qui sort régulièrement de son fief nigérian dans des raids meurtriers impose donc une autre stratégie d’attaque à des Nigériens déjà éprouvés par le jeûne du ramadan, mais aussi une situation socio-politique marquée par des grèves d’étudiants et de travailleurs, le tout sur fond d’arrestations et de procès interminables. Ce bilan de 9 morts et 37 blessés au moins pourrait bien enfler par la suite. Mais il accentue certainement la psychose générale qui règne non seulement à Diffa, mais aussi dans les autres parties du Niger que l’hydre terroriste a enlacées de ses tentacules qui poussent aussitôt tranchées.

Il est temps de changer le fusil d’épaule pour espérer resserrer l’étau autour de ce cancer de l’humanité qui visiblement ne s’en prend plus qu’aux seules forces de défense et de sécurité dans les rangs desquelles il a pendant longtemps semé pleurs et désolation. La lutte contre ces forces du mal qui ont pris le Sahel ouest-africain pour repaire doit évoluer d’un cran et épouser les nouveaux modes d’attaque des terroristes. A quelque chose malheur étant bon, il importe que chaque Nigérien devienne un soldat contre le terrorisme. Ce n’est plus un secret que ce sont les cellules dormantes locales de djihadistes qui sont le plus souvent en action maintenant. Et elles sont d’une efficacité chirurgicale, maîtrisant les habitudes des uns et des autres, se faisant passer pour des voisins exemplaires, jusqu’au jour où elles montrent leur face hideuse. Comment donc combattre ces assassins pour qui la vie de l’autre ne représente pas grand-chose, la leur propre étant sans grande valeur vu qu’ils sont prêts à la perdre à tout moment, au nom de Dieu qui paradoxalement est amour du prochain?

Pour des pays africains où tout est priorité et dans lesquels un repas par jour est presqu’un privilège, la lutte contre Boko Haram au Niger, au Nigéria ou au Cameroun, la guerre contre les djihadistes au Burkina Faso ou au Mali ne sont pas une mince affaire. Surtout pour des armées qui, malgré la volonté de leurs soldats, se trouvent très souvent démunis face à la puissance de feu d’adversaires dont l’objectif est de mourir pour… «vivre heureux» dans le paradis, où les attendent les «vierges» promises. Peut-être que le secours viendra de la force du G5 Sahel au profit de laquelle Mahamadou Issoufou et Emmanuel Macron ont une fois de plus plaidé, lors de leur tête-à-tête. Pourtant, la pérennité de cette coalition des armées du Mali, du Burkina Faso, de la Mauritanie, du Tchad et du Niger est bien en pointillé car, contrairement au souhait du président nigérien de la «placer sous le chapitre 7 de la Charte des Nations unies», les Etats Unis ne l’entendent pas de cette oreille. Et, ce serait un miracle que l’ONU outrepasse les volontés de son plus gros contributeur, par ailleurs «régent» du monde. C’est donc le cœur en lambeaux qu’il faut reconnaître que le terrorisme a encore de beaux jours devant lui.

Par Wakat Séra