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Sahel: les deux premiers sauts de puce du général Tiani

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Le capitaine Ibrahim Traoré (béret rouge) et son hôte nigérien, le général Abdourahamane Tiani

Pour sa première sortie officielle depuis son coup d’Etat du 26 juillet, le général Abdourahamane Tiani a porté, en toute logique, son choix sur le Mali et le Burkina Faso qu’il a visités ce jeudi. Si sur extrait de naissance il est le grand frère du haut de ses 62 ans, et le plus gradé, bardé de ses étoiles de général de brigade, le nouvel homme fort de Niamey n’en n’est pas moins le benjamin des chefs de transition de l’Alliance des Etats du Sahel (AES).

A Bamako il a été accueilli par son cadet et moins gradé, mais aîné au pouvoir, le colonel Assimi Goïta, 40 ans, venu aux affaires le 18 août 2021 après avoir renversé le président malien Feu Ibrahim Boubacar Keïta. A Ouagadougou, c’est le benjamin en âge et en galon des trois dirigeants militaires, le capitaine Ibrahim Traoré, 35 ans, lui aussi arrivé au pouvoir avant lui, soit le 30 septembre 2022, qui a déroulé le tapis rouge à Abdourahamane Tiani. Que ce soit dans l’une ou l’autre des deux capitales, il a été rendu au général Tiani, un accueil des grands jours, avec les honneurs militaires, la traditionnelle eau de bienvenue dans une calebasse ou la gerbe de fleurs classique offerte par une jeune fille.

A Bamako comme à Ouagadougou, l’opportunité a été saisie par le général pour dire sa reconnaissance à ses homologues qui lui sont d’un grand soutien, notamment, pour essayer de faire passer la pilule très amère des sanctions drastiques de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) et de la communauté internationale qui condamnent la prise de pouvoir par les armes. A Ouagadougou, le Nigérien a apprécié «ce soutien du peuple burkinabè et de ses autorités –qui- a permis à son pays de résister face aux menaces de la CEDEAO d’attaquer le Niger et de faire face à l’embargo de l’institution imposé au Niger.»

Abdourahamane Tiani n’a pas manqué de saluer la déclaration conjointe du Burkina Faso et du Mali en soutien au Niger et «la création de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) qui permet désormais aux trois pays de faire face à tout agresseur contre l’un des trois.» Mais l’AES qui pourrait ressembler sur bien des points au défunt, sinon tout au moins agonisant G5 Sahel, montrera réellement son utilité, si elle, libère les populations de ces trois pays des terroristes qui se sont enkystés dans cette région endeuillée au quotidien par des attaques de ces hommes sans foi ni loi.

Plus singulièrement, la zone dite des «Trois frontières» infestée par le groupe Etat islamique a, plus que jamais, besoin de cette coalition des armées malienne, nigérienne et burkinabè, pour se sortir d’affaire, avec le départ de la force française Barkhane dont les éléments ont mis hors d’état de nuire, bien des chefs terroristes et anéanti leurs bases. Du reste, une lutte sans merci est engagée par les armées respectives des trois pays, mais elle ne pourra aboutir qu’avec la mise en commun des stratégies et des forces.

L’autre raison de ces «visites d’amitié et de travail», elle non précisée dans le discours officiel, qui a fait sortir le général pour la première fois, de son antre de Niamey, est sans aucun doute, l’urgence de trouver du cash pour tenter de desserrer l’étau financier autour de son pays, où, suite aux différentes mesures prises contre le coup de force des militaires, les liquidités commencent à faire défaut, mettant en grosse difficulté les entreprises nigériennes, qu’elles soient publiques ou privées.

Et comme pour rappeler au général Abdourahamane Tiani que demain n’est pas la veille de la fin de ce calvaire, c’est alors que son avion volait entre deux frontières voisines du Niger que le parlement européen, dans une proposition de résolution, entre autres,  «condamne fermement le coup d’État militaire qui a eu lieu le 26 juillet 2023; exige la libération immédiate et inconditionnelle du président Bazoum, de sa famille et de toutes les personnes détenues arbitrairement, ainsi que l’abandon de toutes les charges qui pèsent sur lui».

Dans la foulée, les parlementaires européens exigent «la restauration immédiate de Mohamed Bazoum, qui a été démocratiquement élu, en tant que président du Niger et le rétablissement immédiat de l’ordre constitutionnel». Les élus européens en invitant «le Conseil à appliquer des sanctions à l’encontre des dirigeants de la junte nigérienne», et se félicitant «de la suspension de l’appui budgétaire et de la coopération en matière de sécurité, tandis que l’aide humanitaire se poursuit», saluent «la décision de la CEDEAO d’imposer des sanctions économiques et financières» au Niger.

S’il faut reconnaître que les embargos ont rarement eu les effets escomptés, il faut dire que les nouvelles sont peu réjouissantes pour le général Abdourahamane Tiani qui, doit, désormais, fonder davantage d’espoir sur ses voisins malien et burkinabè. En tout cas, la solidarité est une valeur africaine séculaire!

Par Wakat Séra